Читаем Catherine Il suffit d'un Amour Tome 2 полностью

La seconde journée de marche fut à peu près semblable à la première. Le paysage se coupait parfois de profondes vallées qui en rompaient la monotonie. Le train que l'on menait semblait mortellement lent pour l'impatience de Catherine, tenaillée par la hâte de voir à l'horizon les remparts d'Orléans, mais si l'on voulait ménager les chevaux, une allure raisonnable s'imposait. On ne pouvait faire plus de douze à quinze lieues par jour pour que les bêtes allassent sans souffrir jusqu'au bout du voyage. Une auberge de pèlerins accueillit ce soir-là les voyageurs et les soldats employèrent une partie de leur soirée à nettoyer et aiguiser leurs armes. Dès le lendemain, on quitterait les territoires de Bourgogne et le danger de mauvaises rencontres deviendrait sérieux. Mais, de ce danger-là, Catherine n'avait cure. Une seule chose comptait désormais pour elle : rejoindre Arnaud.

Une pluie diluvienne noyait le paysage quand, au matin du troisième jour de marche, la petite troupe se mit en route.

Des trombes d'eau se déversaient sur la terre, brouillant les contours, trempant jusqu'aux os les six cavaliers.

— Il faut nous arrêter, Catherine, dit Sara vers le milieu du jour.

— Nous arrêter où ? fit Catherine nerveusement. Nous ne sommes plus en terrain assuré et même les maisons-Dieu peuvent cacher des pièges. Il nous reste encore une lieue à peine pour atteindre Coulanges-la-Vineuse.

Nous nous y arrêterons.

— Coulanges n'est pas sûr, objecta l'un des archers d'escorte. Un brigand Armagnac, Jacques de Pouilly, qui se fait appeler Fortépice, en tient le château. Il vaudrait mieux gagner Auxerre.

Auxerre n'est pas plus engageante, coupa Catherine fermement. Au surplus, notre troupe n'a rien d'attirant pour un brigand. Par ce temps affreux, votre Fortépice doit être enfermé dans sa grande salle, devant un feu bien flambant, à jouer aux échecs avec un de ses hommes. Il y a bien un couvent quelconque à Coulanges ?

— Oui, mais...

— C'est là que nous nous arrêterons, sans entrer dans le bourg. Nous n'en bougerons jusqu'à l'aube où nous repartirons. Ah ! çà, messires soldats, auriez- vous peur ? En ce cas, il vaudrait mieux pour vous regagner la Bourgogne encore si proche...

— Madame, Madame..., reprocha frère Etienne. Il faut beaucoup de courage pour s'avancer ainsi en pays ennemi. Ces hommes ne font que leur devoir en vous mettant en garde.

Pour toute réponse, Catherine haussa les épaules, piqua légèrement son cheval des éperons et força l'allure. Bientôt, le coteau de Coulanges-la-Vineuse, couronné de son château, se silhouetta en grisaille derrière le rideau de pluie. Mais, à mesure que l'on approchait, une inquiétude vague se glissait dans l'âme de la jeune femme. Le paysage, qui avait dû être autrefois riant et fertile, était étrangement sinistre. Les terres paisibles et encore protégées de Bourgogne avaient disparu. Le sol noir paraissait brûlé et ne montrait que de rares chicots de bois tordu qui avaient dû être des ceps de vigne. De loin en loin, une maison écroulée, un tas de cendres froides ou, pire encore, un corps pendu à quelque branche qui achevait de se corrompre sous la pluie... Au passage d'une maison encore debout, Catherine et Sara, horrifiées, se cachèrent les yeux : barrant la porte de la grange d'une sinistre croix blême, il y avait le corps nu, crucifié et éventré d'une femme aux longs cheveux noirs.

— Mon Dieu ! murmura Catherine épouvantée... Mais où sommes-nous donc ?

Le soldat qui avait tenté de la détourner de sa route intervint encore :

— Je vous l'ai dit, Madame, ce Fortépice est un bandit... mais je ne pensais pas que c'était à ce point ! Voyez, devant nous, ces bâtiments en ruine : c'est le couvent où vous espériez vous arrêter. Il a dû l'incendier, le misérable ! Il faut fuir, Madame, pendant qu'il est temps encore. Le mauvais temps, comme vous le pensiez, aura peut-être retenu au château Fortépice et ses brigands. Mais il ne faut pas tenter le diable ! Voyez ce sentier, sur la gauche, qui s'enfonce dans le bois, prenons-le. À deux lieues d'ici, environ, nous trouverons les carrières de Cour- son où nous pourrons prendre abri pour la nuit car, du château de Courson, je ne suis guère plus sûr, ne sachant pas qui le tient.

Glacée par l'affreux spectacle qu'elle venait de contempler, Catherine n'objecta rien. Elle laissa l'homme prendre son cheval par la bride et le diriger vers le chemin qui s'enfonçait à travers bois. Le sentier serpentait entre deux impénétrables taillis qui semblaient des murs de branchages enchevêtrés. De loin en loin, un rocher gris faisait une trouée. A mesure que l'on s'enfonçait dans le bois, la route se rétrécissait et les branches des arbres se rejoignant d'un bord à l'autre finirent par en faire une sorte de tunnel qui allait s'assombrissant. On n'entendait pas d'autre bruit que le pas des chevaux et, de temps à autre, le cri d'un oiseau en vol. Et, soudain, ce fut l'attaque...

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