Читаем La Famille du Vourdalak полностью

« Je ne vous fatiguerai pas, mesdames, des détails de mon voyage, ni des observations que je fis sur les Hongrois et les Serbes, ce peuple pauvre et ignorant, mais brave et honnête et qui, tout asservi qu’il était par les Turcs, n’avait oublié ni sa dignité, ni son ancienne indépendance. Il me suffira de vous dire qu’ayant appris un peu de polonais lors d’un séjour que j’avais fait à Varsovie, je fus bientôt au courant du serbe, car ces deux idiomes, ainsi que le russe et le bohême, ne sont, comme vous le savez sans doute, qu’autant de branches d’une seule et même langue qu’on appelle slavonne.

« Or donc, j’en savais assez pour me faire comprendre, lorsqu’un jour j’arrivai dans un village dont le nom ne vous intéresserait guère. Je trouvai les habitants de la maison où je descendis dans une consternation qui me parut d’autant plus étrange que c’était un dimanche, jour où le peuple serbe a coutume de s’adonner à différents plaisirs, tels que la danse, le tir à l’arquebuse, la lutte, etc. J’attribuais l’attitude de mes hôtes à quelque malheur nouvellement arrivé, et j’allais me retirer quand un homme d’environ trente ans, de haute stature et de figure imposante, s’approcha de moi et me prit par la main.

« – Entrez, entrez, étranger, me dit-il, ne vous laissez pas rebuter par notre tristesse ; vous la comprendrez quand vous en saurez la cause.

« Il me conta alors que son vieux père, qui s’appelait Gorcha, homme d’un caractère inquiet et intraitable, s’était levé un jour de son lit et avait décroché du mur sa longue arquebuse turque.

« – Enfants, avait-il dit à ses deux fils, l’un Georges, l’autre Pierre, je m’en vais de ce pas dans les montagnes me joindre aux braves qui donnent la chasse à ce chien d’Alibek (c’était le nom d’un brigand turc qui, depuis quelque temps, dévastait le pays). Attendez-moi pendant dix jours, et, si je ne reviens pas le dixième, faites-moi dire une messe de mort, car alors je serai tué. Mais, avait ajouté le vieux Gorcha, en prenant son air le plus sérieux, si (ce dont Dieu vous garde) je revenais après les dix jours révolus, pour votre salut ne me laissez point entrer. Je vous ordonne dans ce cas d’oublier que j’étais votre père et de me percer d’un pieu de tremble, quoi que je puisse dire ou faire, car alors je ne serais qu’un maudit vourdalak qui viendrait sucer votre sang.

« Il est à propos de vous dire, mesdames, que les vourdalaks, ou vampires des peuples slaves, ne sont, dans l’opinion du pays, autre chose que des corps morts sortis de leurs tombeaux pour sucer le sang des vivants. Jusque-là leurs habitudes sont celles de tous les vampires, mais ils en ont une autre qui ne les rend que plus redoutables. Les vourdalaks, mesdames, sucent de préférence le sang de leurs parents les plus proches et de leurs amis les plus intimes qui, une fois morts, deviennent vampires à leur tour, de sorte qu’on prétend avoir vu en Bosnie et en Hongrie des villages entiers transformés en vourdalaks. L’abbé Augustin Calmet, dans son curieux ouvrage sur les apparitions, en cite des exemples effrayants. Les empereurs d’Allemagne nommèrent plusieurs fois des commissions pour éclaircir des cas de vampirisme. On dressa des procès-verbaux, on exhuma des cadavres qu’on trouva gorgés de sang et on les fit brûler sur les places publiques après leur avoir fait percer le cœur. Des magistrats témoins de ces exécutions affirment avoir entendu les cadavres pousser des hurlements au moment où le bourreau leur enfonçait un pieu dans la poitrine. Ils en ont fait la déposition formelle et l’ont corroborée de leur serment et de leur signature.

« D’après ces renseignements, il vous sera facile de comprendre, mesdames, l’effet qu’avaient produit les paroles du vieux Gorcha sur ses fils. Tous deux s’étaient jetés à ses pieds et l’avaient supplié de les laisser partir à sa place, mais, pour toute réponse, il leur avait tourné le dos et s’en était allé en chantonnant le refrain d’une vieille ballade. Le jour où j’arrivai dans le village était précisément celui où devait expirer le terme fixé par Gorcha, et je n’eus pas de peine à m’expliquer l’inquiétude de ses enfants.

« C’était une bonne et honnête famille. Georges, l’aîné des deux fils, aux traits mâles et bien marqués, paraissait un homme sérieux et résolu. Il était marié et père de deux enfants. Son frère Pierre, beau jeune homme de dix-huit ans, trahissait dans sa physionomie plus de douceur que de hardiesse, et paraissait le favori d’une sœur cadette, appelée Sdenka, qui pouvait bien passer pour le type de la beauté slave. Outre cette beauté incontestable sous tous les rapports, une ressemblance lointaine avec la duchesse de Gramont me frappa de prime abord. Il y avait surtout un trait caractéristique au front que je ne retrouvai dans toute ma vie que chez ces deux personnes. Ce trait pouvait ne pas plaire au premier coup d’œil, mais on s’y attachait irrésistiblement dès qu’on l’avait vu plusieurs fois.

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