Читаем Le compte de Monte-Cristo Tome II полностью

Mme de Villefort ferma la porte avec le plus grand soin derrière l’enfant; le comte ne parut pas s’en apercevoir.

Puis, en jetant un dernier regard autour d’elle, la jeune femme revint s’asseoir sur sa causeuse.

«Permettez-moi de vous faire observer, madame, dit le comte avec cette bonhomie que nous lui connaissons, que vous êtes bien sévère pour ce charmant espiègle.

– Il le faut bien, monsieur, répliqua Mme de Villefort avec un véritable aplomb de mère.

– C’est son Cornelius Nepos que récitait M. Édouard en parlant du roi Mithridate, dit le comte, et vous l’avez interrompu dans une citation qui prouve que son précepteur n’a point perdu son temps avec lui, et que votre fils est fort avancé pour son âge.

– Le fait est, monsieur le comte, répondit la mère flattée doucement, qu’il a une grande facilité et qu’il apprend tout ce qu’il veut. Il n’a qu’un défaut, c’est d’être très volontaire; mais, à propos de ce qu’il disait, est-ce que vous croyez, par exemple, monsieur le comte, que Mithridate usât de ces précautions et que ces précautions pussent être efficaces?

– J’y crois si bien, madame, que, moi qui vous parle, j’en ai usé pour ne pas être empoisonné à Naples, à Palerme et à Smyrne, c’est-à-dire dans trois occasions où, sans cette précaution, j’aurais pu laisser ma vie.

– Et le moyen vous a réussi?

– Parfaitement.

– Oui, c’est vrai; je me rappelle que vous m’avez déjà raconté quelque chose de pareil à Pérouse.

– Vraiment! fit le comte avec une surprise admirablement jouée; je ne me rappelle pas, moi.

– Je vous demandais si les poisons agissaient également et avec une semblable énergie sur les hommes du Nord et sur les hommes du Midi, et vous me répondîtes même que les tempéraments froids et lymphatiques des Septentrionaux ne présentaient pas la même aptitude que la riche et énergique nature des gens du Midi.

– C’est vrai, dit Monte-Cristo; j’ai vu des Russes dévorer, sans être incommodés, des substances végétales qui eussent tué infailliblement un Napolitain ou un Arabe.

– Ainsi, vous le croyez, le résultat serait encore plus sûr chez nous qu’en Orient, et au milieu de nos brouillards et de nos pluies, un homme s’habituerait plus facilement que sous une chaude latitude à cette absorption progressive du poison?

– Certainement; bien entendu, toutefois, qu’on ne sera prémuni que contre le poison auquel on se sera habitué.

– Oui, je comprends; et comment vous habitueriez-vous, vous, par exemple, ou plutôt comment vous êtes-vous habitué?

– C’est bien facile. Supposez que vous sachiez d’avance de quel poison on doit user contre vous… Supposez que ce poison soit de la… brucine, exemple…

– La brucine se tire de la fausse angusture, je crois, dit Mme de Villefort.

– Justement, madame, répondit Monte-Cristo; mais je crois qu’il ne me reste pas grand-chose à vous apprendre; recevez mes compliments: de pareilles connaissances sont rares chez les femmes.

– Oh! je l’avoue, dit Mme de Villefort, j’ai la plus violente passion pour les sciences occultes qui parlent à l’imagination comme une poésie, et se résolvent en chiffres comme une équation algébrique; mais continuez, je vous prie: ce que vous me dites m’intéresse au plus haut point.

– Eh bien, reprit Monte-Cristo, supposez que ce poison soit de la brucine, par exemple, et que vous en preniez un milligramme le premier jour, deux milligrammes le second, eh bien, au bout de dix jours vous aurez un centigramme; au bout de vingt jours, en augmentant d’un autre milligramme, vous aurez trois centigrammes, c’est-à-dire une dose que vous supporterez sans inconvénient, et qui serait déjà fort dangereuse pour une autre personne qui n’aurait pas pris les mêmes précautions que vous; enfin, au bout d’un mois, en buvant de l’eau dans la même carafe, vous tuerez la personne qui aura bu cette eau en même temps que vous, sans vous apercevoir autrement que par un simple malaise qu’il y ait eu une substance vénéneuse quelconque mêlée à cette eau.

– Vous ne connaissez pas d’autre contrepoison?

– Je n’en connais pas.

– J’avais souvent lu et relu cette histoire de Mithridate, dit Mme de Villefort pensive, et je l’avais prise pour une fable.

– Non, madame; contre l’habitude de l’histoire, c’est une vérité. Mais ce que vous me dites là madame, ce que vous me demandez n’est point le résultat d’une question capricieuse, puisqu’il y a deux ans déjà vous m’avez fait des questions pareilles, et que vous me dites que depuis longtemps cette histoire de Mithridate vous préoccupait.

– C’est vrai, monsieur, les deux études favorites de ma jeunesse ont été la botanique et la minéralogie, et puis, quand j’ai su plus tard que l’emploi des simples expliquait souvent toute l’histoire des peuples et toute la vie des individus d’Orient, comme les fleurs expliquent toute leur pensée amoureuse, j’ai regretté de n’être pas homme pour devenir un Flamel, un Fontana ou un Cabanis.

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