Читаем Piège pour Catherine полностью

Sans cesser de hurler, une dizaine de soudards étaient entrés dans l'eau et maîtrisaient les chevaux. Désespérément, les deux garçons tirèrent leurs armes et tentèrent de s'en servir, mais leurs efforts furent vains. En un clin d'œil, tous trois se retrouvèrent jetés sur le sable de la petite grève aux mains de démons aux faces noircies, qui entreprirent de les ficeler avec une habileté dénotant une longue pratique, tandis que deux d'entre eux ramenaient les chevaux par la bride.

— Bérenger, assommé, avait perdu bienheureusement conscience.

Bonne prise ! s'écria l'un des assaillants. De belles bêtes et peut-être des gens riches ! Des marchands sans doute...

— Des marchands ! gronda Gauthier qui se débattait comme un diable. Est-ce que nous avons l'air de marchands ? Nous sommes gentilshommes, racaille, et notre compagnon...

11 s'interrompit. Celui qui paraissait le chef s'était agenouillé auprès de Catherine dont la tête avait heurté une souche quand on l'avait jetée à terre et qui en était restée un peu étourdie. Brutalement, il arracha le camail noir qui enveloppait la tête de la jeune femme et qui avait glissé à moitié. L'épaisse chevelure dorée apparut, presque rousse dans la lumière des torches.

— Tiens ! tiens !... fit-il. On dirait que nous avons là une agréable visite...

Pour s'en assurer, il tira sa dague et, d'un coup rapide, sectionna les lacets qui fermaient le justaucorps de la jeune femme. Les bandes de toile dont elle se serrait la poitrine quand elle s'habillait en garçon apparurent. Le fil de la dague les coupa en une seconde et les preuves formelles de la féminité de la prisonnière s'épanouirent sous les yeux des pillards.

Le chef eut un sifflement admiratif.

— Une très... très agréable visite ! Achevons d'éplucher cette savoureuse amande. C'est bien une femme, garçons. Et des plus réussies...

— Bandits ! Sauvages ! hurla Gauthier qui s'étranglait à moitié. Ce n'est pas une femme, c'est une dame ! Une haute dame et si vous osez seulement y toucher...

Pourpre d'impuissante fureur, il se tordait dans ses liens et s'étranglait. Le chef, qui cependant avait suspendu le geste ébauché de dépouiller Catherine, eut un haussement d'épaules ennuyé.

Faites-moi taire ce braillard ! Il m'empêche de réfléchir... Dites donc, garçons, si j'ai bonne mémoire, personne jusqu'ici ne nous a défendu les nobles dames, que je sache ? Le tout est de savoir d'où elles viennent. Allons, poulette ! Réveillons-nous ! Tandis que, de son poing ferré, l'un des soudards étourdissait Gauthier, un autre lançait au visage de Catherine le contenu d'un casque plein d'eau. Elle sursauta, ouvrit les yeux, se redressa d'un mouvement nerveux en sentant des mains rudes qui caressaient sa poitrine et cracha comme un chat en colère.

Repoussant de toutes ses forces l'homme qui, déséquilibré, tomba les quatre fers en l'air, elle sauta sur ses pieds, tira la dague de sa ceinture et la tint serrée dans son poing fermé, la pointe en avant :

— Bande de truands ! J'éventre le premier qui approche !

Un énorme éclat de rire salua cette menace. Le chef se relevait, torchant sa figure noire de poussière et de suie à sa manche de cuir.

— Ça va, fit-il, on va causer ! Mais uniquement parce qu'on nous a dit que tu étais une « noble dame », sinon faut pas t'imaginer que c'est ta quenouille qui nous empêcherait de faire de toi ce qu'on veut ! Qui es-tu ? D'où viens-tu ?

— De Tours où voici dix jours j'étais au mariage de Monseigneur le Dauphin ! Je suis dame de parage de la Reine !

— Dis donc, le Boiteux ! Ça a l'air sérieux ! Faudrait peut-être mener tout ça au Capitaine ?

— Quand j'aurai besoin de ton avis, je te le demanderai ! aboya l'autre.

Puis, revenant à Catherine :

— Comment que tu t'appelles, belle dame ?

— Je suis la comtesse de Montsalvy. Mon époux est célèbre parmi les capitaines du roi Charles !

Le Boiteux garda le silence, fourragea un instant parmi sa tignasse hirsute, remit son casque puis se détourna en haussant les épaules.

Ça va ! Menez tout ça au Capitaine La Foudre ! Moi j'aime autant ne pas avoir d'ennuis avec lui... Mais, tu sais, la belle, si tu m'en as conté, il le saura parce qu'il les connaît, les dames de la Cour. De toute façon, comme tu es belle fille, tu as une chance de n'être pendue qu'après un sursis. Les belles filles, il les aime, La Foudre. Allez, vous autres, on continue ! Toi, Cornisse, tu vas me hisser ces deux jouvenceaux sur les chevaux, tu attaches tout de même les mains de la dame, parce qu'elle joue un peu facilement du couteau, et tu conduis tout ça au village. Je m'en lave les mains.

Tandis que Cornisse attachait Gauthier et Bérenger toujours évanouis, chacun sur un cheval, puis liait les mains de Catherine, le Boiteux et le reste de sa troupe regrimpaient la pente et reprenaient le chemin de la maison-forte, toujours noire et silencieuse sur son coteau.

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