Читаем Piège pour Catherine полностью

Tout en parlant, il disposait sur le coffre que Gauthier, aidé de Bérenger, venait de porter auprès du lit, un crucifix, deux petits cierges, un brin de buis, deux petits flacons dont l'un contenait l'huile sainte et l'autre de l'eau bénite. Il demanda de l'eau dans un bassin et un peu de linge.

Catherine, cependant, s'agenouillait contre le lit. Elle chercha le regard de Landry qu'elle ne quittait pas des yeux, comme si elle craignait de le voir disparaître dans un nuage de fumée. C'était tellement extraordinaire, quoi qu'il en dise, de retrouver ici Landry Pigasse, le gamin du Pont-au-Change, qu'elle avait laissé, jadis, à l'abbaye de Saint-Seine. Il est vrai qu'en réfléchissant ladite abbaye n'était pas si loin...

— Ma mère ? souffla-t-elle.

— Elle n'a pas pu t'attendre, Catherine ! Voici une semaine qu'elle s'est endormie, saintement, dans le Seigneur ! Sois tranquille, ajouta-t-il en voyant se crisper les traits de la jeune femme, elle est morte sans souffrir, parlant jusqu'au bout de toi et de ses petits-enfants. Mais je crois qu'elle était heureuse de rejoindre enfin ton père. Elle ne regrettait pas la vie...

— Je crois, moi, qu'elle ne s'est jamais remise de sa mort, murmura Catherine. Pendant bien longtemps, je ne m'en suis pas rendu compte, car on ne pense jamais à ces choses quand il s'agit de ses parents... On voit en eux des êtres à part, un peu déshumanisés...

mais je crois qu'ils se sont beaucoup aimés.

— N'en doute pas ! C'était un amour sans histoire et sans bruit, tout simple et qui, sans ce drame que nous avons déchaîné, aurait duré longtemps.

Les yeux de Catherine s'emplirent de larmes. Elle n'avait jamais imaginé ses parents comme des amoureux. Elle les avait connus calmes, paisibles, vivant l'un auprès de l'autre presque sans paroles, peut-être parce qu'ils n'en avaient pas besoin pour s'entendre. Un amour sage, mais vrai, mais vécu jusqu'au bout car, si la vie de Gaucher s'était brisée d'un seul coup dans le bruit et la fureur d'une foule déchaînée, celle de Jaquette n'avait fait, ensuite, que s'étirer quotidienne et silencieuse, résignée, jusqu'à ce jour où enfin elle avait pu à son tour prendre ce grand départ que durant tant d'années elle avait préparé. Un jour qui avait dû être réellement le bienvenu...

Le front contre la courtepointe de satin, Catherine se mit à prier à la fois pour celle qui n'était plus et pour celui qui, bientôt, allait prendre le même chemin obscur. Leur amour, à eux, avait été tissé de contrastes : drame et bonheur, violence et douceur, joie et souffrance, mais la dame de Montsalvy savait déjà que lorsque son seigneur ne serait plus, sa vie à elle deviendrait semblable à celle de sa mère, à celle d'Isabelle de Montsalvy, sa belle-mère, et à celle de toutes les femmes qu'un époux bien-aimé abandonne sur la terre : une longue attente, une lente usure, un cheminement continu vers la porte noire qui, cependant, ouvre une éternité de lumière...

Landry, tandis qu'elle priait, avait achevé ses préparatifs, passé l'étole de soie sur la bure de sa robe. Il considérait le moribond.

— Qui est cet homme ? demanda-t-il doucement.

Catherine tressaillit, réalisant seulement qu'il ne pouvait pas savoir car, si Ermengarde lui avait dit attendre Catherine, elle n'avait pu imaginer ni prévoir ce qui venait de se passer. Et les soudards qui étaient allés chercher le moine n'avaient pas dû prendre la peine de mentionner son nom. L'eussent-ils fait, d'ailleurs, que celui du capitaine La Foudre n'eût pas beaucoup éclairé Landry.

Elle prit sur la courtepointe la grande main, s'étonna de la trouver si chaude, alors qu'elle s'attendait à toucher une chair déjà froide.

Mais elle brûlait de fièvre.

— C'est mon seigneur, soupira-t-elle. Le comte de Montsalvy...

Elle sentit que Landry ne comprenait pas, et cependant il ne posa pas d'autre question. Mais son regard débordait de pitié en se posant tour à tour sur la tête blonde et sur cette autre qui reposait, à demi cachée sous ses linges sanglants.

— Tu me diras plus tard ! chuchota-t-il. Nous aurons tout le temps.

Puis, trempant dans l'eau bénite le brin de buis qu'il avait apporté avec lui, il aspergea l'a chambre, tandis que tous s'agenouillaient.

Pcix huic domui ! fit-il d'une voix forte. Adjuto- rinum nostrum in nomine Domini...

Le rituel de l'extrême-onction, apaisant et simple, ronronna dans la chambre sur la musique douce du latin.

Se penchant sur le corps d'Arnaud, Landry prit un peu d'huile sainte et, du pouce, fit une onction sur chacun des sens du blessé, sur les yeux, les oreilles et les lèvres, autant que le pansement le permettait, sur les mains ouvertes et sur les pieds, tandis que Gauthier et Bérenger, se souvenant tous deux de leur formation, religieuse, donnaient les répons et entamaient la litanie des agonisants.

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