J'en vis un tout petit, de 8 ans à peine, qu'emmenaient deux
agents en civil. Ils s'étaient mis à deux, car le petit se
débattait comme un gibier; il sanglotait, hurlait,
trépignait, cherchait à mordre... Près d'une heure après,
repassant presque au même endroit, j'ai revu le même enfant,
calmé. Il était assis sur le trottoir. Un seul des deux
agents restait debout près de lui et lui parlait. Le petit
ne cherchait plus à fuir. II souriait à l'agent. Un grand
camion vint, s'arrêta; l'agent aida l'enfant à y monter,
pour l'emmener où? Je ne sais. Et si je raconte ce menu
fait, c'est que peu de choses en U.R.S.S. m'ont ému comme le
comportement de cet homme envers cet enfant: la douceur
persuasive de sa voix (ah! que j'aurais voulu comprendre ce
qu'il lui disait) tout ce qu'il savait mettre d'affection
dans son sourire, la caressante tendresse de son étreinte
lorsqu'il le souleva dans ses bras... Je songeais au
Imp. CHANTENAY, 15, rue de l'Abbé-Grégoire, Paris-VIe — 11-36
[Note 1]
Tocqueville,
[Note 2] «Et vous trouvez que c'est un bien?» s'écrie mon ami X.., à qui je disais cela. «Moquerie, ironie, critique, tout se tient. L'enfant incapable de moquerie fera l'adolescent crédule et soumis, dont plus tard vous, moqueur, critiquerez le «conformisme». J'en tiens pour la gouaille française, dût-elle s'exercer à mes dépens.
[Note 3] Jeunesse communiste.
[Note 4] Ce qui me plaît aussi en U.R.S.S., c'est l'extraordinaire prolongement de la jeunesse; ce à quoi, particulièrement en France (mais je crois bien: dans tous nos pays latins), nous sommes si peu habitués. La jeunesse est riche de promesses; un adolescent de chez nous cesse vite de promettre pour tenir. Dès quatorze ans déjà tout se fige. L'étonnement devant la vie ne se lit plus sur le visage, ni plus la moindre naïveté. L'enfant devient presque aussitôt Jeune Homme. Les jeux sont faits.
[Note 5] Coupoles de cuivre et flèches d'or.
[Note 6] C'est du moins ce qui m'a été plusieurs fois affirmé. Mais je tiens tous les «renseignements», tant que non contrôlés, pour suspects, comme ceux qu'on obtient dans les colonies. J'ai peine à croire que ce kolkhose soit privilégié au point d'échapper à la redevance de 7% sur la production brute qui pèse sur les autres kolkhoses; sans compter de 35 à 39 roubles de capitation.
[Note 7] Je relègue en appendice quelques renseignements plus précis. J'en avais pris bien d'autres. Mais les chiffres ne sont point ma partie, et les questions proprement économiques échappent à ma compétence. De plus, si ces renseignements sont très précisément ceux que l'on m'a donnés, je ne puis pourtant pas en garantir l'exactitude. L'habitude des colonies m'a appris à me méfier des «renseignements». Enfin, et surtout, ces questions ont été déjà suffisamment traitées par des spécialistes; je n'ai pas à y revenir.
[Note 8] Dans nombre d'autres, il n'est point question de demeures particulières; les gens couchent dans des dortoirs, des «chambrées».
[Note 9] Cette impersonnalité de chacun me permet de supposer aussi que ceux qui couchent dans des dortoirs souffrent de la promiscuité et de l'absence de recueillement possible beaucoup moins que s'ils étaient capables d'individualisation. Mais cette dépersonnalisation, à quoi tout, en U.R.S.S., semble tendre, peut-elle être considérée comme un progrès? Pour ma part, je ne puis le croire.
[Note 10] Ou du moins n'en connaît que ce qui l'encouragera dans son sens.
[Note 11] Devant notre stupeur non dissimulée, l'étudiant ajoutait il est vrai: «Je comprends et nous comprenons aujourd'hui que c'est un raisonnement absurde. La langue étrangère, quand elle ne sert plus à instruire, peut bien servir encore à enseigner.»
[Note 12]
J'entendis, peu après ce petit prodige exécuter
sur son Stradivarius du Paganini, puis un
[Note 13]
Eugène Dabit avec qui je parlais de ce complexe de
supériorité, auquel son extrême modestie le rendait
particulièrement sensible, me tendit le second volume des