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Car tu te trompes sur ma démarche quand tu crois me nier. Tu es de la race des logiciens, des historiens et des critiques, lesquels discutent les matériaux du visage et ne connaissent point le visage. Que m'importent les textes de loi et les ordonnances particulières? C'est à toi de les inventer. Si je désire fonder en toi la pente vers la mer je décris le navire en marche, les nuits d'étoiles et l'empire que se taille une île dans la mer par le miracle des odeurs. «Vient le matin, te dis-je, où tu entres, sans que rien ne change pour les yeux, dans un monde habité. L'île invisible encore, comme un panier d'épices, installe son marché sur la mer. Tu retrouves tes matelots, non plus hirsutes et durs, mais brûlants, et ils ignorent eux-mêmes pourquoi, de convoitises tendres. Car on songe à la cloche avant de l'entendre qui tinte, la conscience grossière exige beaucoup de bruit alors que les oreilles déjà sont informées. Et me voilà déjà heureux, lorsque je marche vers le jardin, aux lisières du climat des rosés… C'est pourquoi tu éprouves sur mer, selon les vents, le goût de l'amour, ou du repos, ou de la mort.»

Mais toi tu me reprends. Le navire que j'ai décrit n'est pas à l'épreuve de l'orage et il importe de le modifier selon tel détail ou tel autre. Et moi j'approuve. Change-le donc! Je n'ai rien à connaître des planches et des clous. Puis tu me nies les épices que j'ai promises. Ta science me démontre qu'elles seront autres. Et moi j'approuve. Je n'ai rien à connaître de tes problèmes de botanique. M'importe exclusivement que tu bâtisses un navire et me cueilles des îles lointaines au large des mers. Tu navigueras donc pour me contredire. Tu me contrediras. Je respecterai ton triomphe. Mais plus tard, lentement, dans le silence de mon amour, je m'en irai visiter, après ton retour, les ruelles du port.

Fondé par le cérémonial des voiles à hisser, des étoiles à lire et du pont à laver à grande eau, tu seras revenu, et, de l'ombre où je me tiendrai, je t'écouterai chanter à tes fils, afin qu'ils naviguent, le cantique de l'île qui installe son marché sur la mer. Et je m'en retournerai satisfait.


Tu ne peux espérer ni me prendre en défaut, ni véritablement me nier dans l'essentiel. Je suis source et non conséquence. Prétends-tu démontrer au sculpteur qu'il eût dû sculpter tel visage de femme plutôt que tel buste de guerrier? Tu subis la femme ou le guerrier. Ils sont, en face de toi, tout simplement. Si je me tourne vers les étoiles je ne regrette point la mer. Je pense étoiles. Lorsque je crée, peu me surprend ta résistance car j'ai pris tes matériaux pour construire un autre visage. Et tu protesteras d'abord. «Cette pierre, me diras-tu, est d'un front et non d'une épaule. — Cela est possible, te répondrai-je. Cela était. — Cette pierre, me diras-tu, est d'un nez et non d'une oreille. — Cela est possible, te répondrai-je. Cela était. — Ces yeux…», me diras-tu, mais à force de me contredire et de reculer et d'avancer, et de te pencher de gauche à droite pour me critiquer mes opérations, viendra bien l'instant où se montrera dans sa lumière l'unité de ma création, tel visage et non un autre. Alors se fera en toi le silence.

Peu m'importent les erreurs que tu me reproches. La vérité loge au-delà. Les paroles l'habillent mal et chacune d'elles est critiquable. L'infirmité de mon langage m'a souvent fait me contredire. Mais je ne me suis point trompé. Je n'ai point confondu le piège et la capture. Elle est commune mesure des éléments du piège. Ce n'est point la logique qui noue les matériaux mais le même dieu qu'ils servent ensemble. Mes paroles sont maladroites et d'apparence incohérente: non moi au centre. Je suis, tout simplement. Si j'ai habillé un corps véritable, je n'ai pas à me soucier de la vérité des plis de la robe. Lorsque la femme est belle, si elle marche, les plis se détruisent et se recomposent, mais ils se répondent les uns aux autres nécessairement.

Je ne connais point de logique des plis de la robe. Mais tels, et non d'autres, font battre mon cœur et m'éveillent au désir.


CCII


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