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Pourquoi me serais-je offusqué de détails qui faussement te semblent futiles? Le marin célébrait un art dont il savait par expérience qu'il permettait de transfigurer une simple corde en câble de remorque et sauvetage. El, puisqu'il se trouvait qu'il fût pour nous condition de notre ascension, j'accordais au jeu valeur de prière. Mais, certes, peu à peu, au long des jours, quand ta caravane s'est usée, tu ne sais plus agir sur elle et te manque le pouvoir des simples prières qui sont des nœuds de cordes ou des sangles de cuir ou du désensablement des puits secs ou de la lecture des étoiles. Autour de chacun s'est épaissie la carapace de silence et chacun se fait aigre de langage, ombrageux d'oreille et dur de cœur.

Ne t'inquiète point. Déjà la chrysalide se brise.

Tu as contourné quelque obstacle, tu as escaladé un tertre. Rien ne distingue encore le silex et les ronces du désert où tu peines, des silex et des ronces d'hier, et voici que tu cries: «La voilà!» avec de grands battements de cœur. Tes compagnons de caravane se pressent, pâles, autour de toi. Tout vient de changer dans vos cœurs comme au lever du jour: Toutes les soifs, toutes les ampoules des pieds et des paumes, tous les épuisements de midi sous le soleil, tous les gels nocturnes, tous les vents de sable qui crissent aux dents et qui aveuglent, toutes les bêtes abandonnées, tous les malades et jusqu'aux compagnons bien-aimés que vous avez ensevelis, vous sont remboursés d'un seul coup au centuple, non par l'ivresse d'un banquet, non par la fraîcheur des ombrages, non par les miroitantes couleurs des jeunes filles lavant leur linge dans l'eau bleue, ni même par la gloire des coupoles qui couronnent la ville sainte, mais par un signe imperceptible, par la simple étoile dont le soleil bénit la plus haute d'entre les coupoles, invisible qu'elle est elle-même d'être tellement lointaine encore, dont il se peut que te séparent les craquelures de l'écorce où la piste croulante s'enfonce en lacets dans l'abîme, puis les falaises à gravir où ton poids te tire vers le bas, puis encore le sable et le sable et, parmi tes outres taries et tes malades et tes mourants, un dernier repas du soleil. Les provisions de joie murées en vous et qu'il n'était point de discours pour déverrouiller, voici que brusquement, au cœur des silex et des ronces, là où le sable a des serpents pour muscles, une étoile invisible, plus pâle que Sirius, observée par les nuits de simoun, si lointaine que ceux d'entre vous qui n'ont point le regard d'un aigle n'en reçoivent rien, si incertaine qu'à peine le soleil aura-t-il quelque peu tourné elle s'éteindra, un clin d'œil d'étoile, et non même pas ce clin d'œil d'étoile, mais, pour ceux qui n'ont point vision d'aigle, le reflet, dans les yeux de celui qui voit, d'un clin d'œil d'étoile, le reflet d'un reflet d'étoile vous transfigure. Toutes les promesses ont été tenues, toutes les récompenses ont été accordées, toutes les misères ont été remboursées au centuple parce qu'un seul d'entre vous, dont le regard est d'aigle, a brusquement fait halte, et, montrant de son doigt une direction dans l'espace, a dit: «Voilà!»

Tout est conclu. Tu n'as rien reçu en apparence. Cependant tu as tout reçu. Te voilà rassasié, pansé, abreuvé. Tu dis: «Je puis mourir, j'ai vu la ville, je meurs béni!» Ne s'agit point ici non plus d'un contraste de faible vertu, comme il en serait de l'étanchement de la soif après la soif. Je t'ai dit leur pouvoir de misère. Et où vois-tu que le désert ait déjà dénoué son étreinte? Ne s'agit point ici de changement de destinée, car ne t'ampute point de ta joie l'approche de la mort, si l'eau manque, mais il se trouve que t'a fondé le cérémonial du désert et que, de t'y être soumis jusqu'au bout, tu accèdes à la fête, laquelle est apparition pour toi d'une abeille d'or.

Ne crois point qu'en rien j'exagère. Je me souviens du jour où m'étant égaré sur des plateaux inviolés, me parut tendre, quand je retrouvai les traces de l'homme, de mourir parmi les miens. Or, rien ne distinguait un paysage de l'autre, sinon de faibles marques dans le sable à demi effacées par le vent. Et tout était transfiguré.

Et moi qu'ai-je vu, qui prends pitié de toi, mon peuple, dans le silence de mon amour? Je t'ai observé qui sanglais les bêtes, qui marchais vidé de toi-même par le soleil, qui crachais le sable, qui injuriais parfois ton voisin, à moins que, d'accumuler des pas semblables, tu ne préférasses le silence. Je ne t'ai rien donné que repas avares, soif permanente, brûlure du soleil et ampoules des paumes. Je t'ai nourri de silex et abreuvé de ronces. Puis, l'heure venue, je t'ai montré le reflet du reflet d'une abeille. Et tu m'as crié ta reconnaissance et ton amour.

Ah! mes dons sont légers d'écorce. Mais qu'impor-tent le poids ou le nombre? Je puis, rien qu'en ouvrant la main, délivrer une armée de cèdres qui escaladera la montagne. Suffit d'une graine!


CC


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