Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome II полностью

– C’est un temps d’épreuve.

– Folle! Folle!

– Vous guérirez.

– Oh! jetez-moi tout de suite dans un hôpital de fous! Enfermez-moi tout à fait dans une vraie prison!

– Non pas! vous m’avez trop bien prévenu de ce que vous feriez contre moi.

– Eh bien! hurla Lorenza, la mort alors! la mort tout de suite!

Et, se relevant avec la souplesse et la rapidité d’une bête fauve, elle s’élança pour se briser la tête contre la muraille.

Mais Balsamo n’eut qu’à étendre la main vers elle et à prononcer du fond de sa volonté, bien plus encore que des lèvres, un seul mot pour l’arrêter en route: Lorenza, lancée, s’arrêta tout à coup, chancela et tomba endormie dans les bras de Balsamo.

L’étrange enchanteur, qui semblait s’être soumis tout le côté matériel de cette femme, mais qui luttait en vain contre le côté moral, souleva Lorenza entre ses bras et la porta sur son lit; alors il déposa sur ses lèvres un long baiser, tira les rideaux de son lit, puis ceux des fenêtres, et sortit.

Quant à Lorenza, un sommeil doux et bienfaisant l’enveloppa comme le manteau d’une bonne mère enveloppe l’enfant volontaire qui a beaucoup souffert, beaucoup pleuré.

<p id="_Toc103005001">Chapitre LVIII La visite</p>

Lorenza ne s’était pas trompée: une voiture, après être entrée par la barrière Saint-Denis, après avoir suivi dans toute sa longueur le faubourg du même nom, avait tourné entre la porte et l’angle formé par la dernière maison, et longeait le boulevard.

Cette voiture renfermait, comme l’avait dit la voyante, Mgr Louis de Rohan, évêque de Strasbourg, que son impatience portait à venir trouver, avant le temps fixé, le sorcier dans son antre.

Le cocher, que bon nombre d’aventures galantes du beau prélat aguerrissaient contre l’obscurité, les fondrières et les dangers de certaines rues mystérieuses, ne se rebuta pas le moins du monde, lorsque, après avoir suivi les boulevards Saint-Denis et Saint-Martin, encore peuplés et éclairés, il lui fallut aborder le boulevard désert et sombre de la Bastille.

La voiture s’arrêta au coin de la rue Saint-Claude, sur le boulevard même, et, d’après l’ordre du maître, alla se cacher sous les arbres, à vingt pas.

Alors M. de Rohan, en habit de ville, se glissa dans la rue et vint frapper trois fois à la porte de l’hôtel, qu’il avait facilement reconnu à la description que lui en avait faite le comte de Fœnix.

Le pas de Fritz retentit dans la cour, la porte s’ouvrit.

– N’est-ce point ici que demeure M. le comte de Fœnix? demanda le prince.

– Oui, monseigneur, répondit Fritz.

– Est-il au logis?

– Oui, monseigneur.

– Bien, annoncez.

– Son Éminence le cardinal de Rohan, n’est-ce pas, monseigneur?

Le prince demeura tout étourdi. Il regarda sur lui, autour de lui, si quelque chose pouvait, dans son costume ou dans son entourage, avoir trahi sa qualité. Il était seul et vêtu en laïque.

– Comment savez-vous mon nom? demanda-t-il.

– Monsieur vient de me dire, à l’instant même, qu’il attendait Son Éminence.

– Oui, mais demain, après-demain?

– Non, monseigneur, ce soir.

– Votre maître vient de vous dire qu’il m’attendait ce soir?

– Oui, monseigneur.

– Bien, annoncez-moi alors, dit le cardinal en mettant un double louis dans la main de Fritz.

– Alors, dit Fritz, que Votre Éminence prenne la peine de me suivre.

Le cardinal fit de la tête un signe annonçant qu’il y consentait.

Fritz marcha d’un pas empressé vers la porte de l’antichambre, qu’un grand candélabre de bronze doré éclairait de ses douze bougies.

Le cardinal suivait tout surpris et tout rêveur.

– Mon ami, dit-il en s’arrêtant à la porte du salon, il y a sans doute méprise, et, dans ce cas, je ne voudrais pas déranger le comte; il est impossible que je sois attendu par lui, puisqu’il ignore que je devais venir.

– Monseigneur est bien Son Éminence le cardinal prince de Rohan, évêque de Strasbourg? demanda Fritz.

– Oui, mon ami.

– Alors, c’est bien monseigneur que M. le comte attend.

Et, allumant successivement les bougies de deux autres candélabres, Fritz s’inclina et sortit.

Cinq minutes s’écoulèrent pendant lesquelles le cardinal, en proie à une singulière émotion, regarda l’ameublement plein d’élégance de ce salon et les huit tableaux de maîtres suspendus à ses lambris.

La porte s’ouvrit et le comte de Fœnix parut sur le seuil.

– Bonsoir, monseigneur, dit-il simplement.

– On m’a dit que vous m’attendiez! s’écria le cardinal sans répondre à cette salutation, que vous m’attendiez ce soir? C’est impossible.

– J’en demande pardon à monseigneur, mais je l’attendais, répondit le comte. Peut-être doute-t-il de la vérité de mes paroles en voyant l’accueil indigne que je lui fais; mais, arrivé à Paris depuis quelques jours, je suis installé à peine. Que Son Éminence veuille donc m’excuser.

– Vous m’attendiez! Et qui vous a prévenu de ma visite?

– Vous-même, monseigneur.

– Comment cela?

– N’avez-vous pas arrêté votre voiture à la barrière Saint-Denis?

– Oui.

– N’avez-vous pas appelé votre valet de pied, qui est venu parler à Son Éminence à la portière de son carrosse?

– Oui.

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