Après tant de discussions il reste un point sur lequel je ne puis m’en rapporter au jugement de la Commission à moins de trahir mes devoirs, le point des 10,000 Rbl. pour les pensions. D’abord après avoir trouvé la chose bonne en soi on me l’avait refusée uniquement parce que l’on voulait trouver les 6000 Rbl. qui manquent pour la Commission des écoles du département de Dorpat2
. V. M. trouvant injuste de nous charger de ces frais auxquels on ne pensait pas lors de l’acte de fondation et pour lesquels on a augmenté les revenus des autres universités russes, et ayant bien voulu me promettre de réparer cette injustice, je croyais toutes les difficultés levées. Non, il s’est trouvé une autre objection – la rivalité des universités russes.Sire! Je ne m’étonnerais pas du tout que Vous crussiez que je fais ici la satyre non l’histoire de mes négociations. Vous ne pourrez pas croire que, nos revenus étant fixés, on nous en défende un emploi sage et prévoyant, qui met à l’abri des événements et inocule à l’Université un principe d’agrandissement futur, un emploi qui assure à nos descendants des ressources que nous nous refusons à présent malgré notre désir brûlant de donner à notre Université tout le lustre possible. Vous ne concevez pas, dis-je, que l’on nous défende cet emploi de peur que nous ne gagnions par là sur les universités russes. Mais que direz-Vous, Sire, lorsque Vous apprendrez que le noble Novossilzof, à qui je dois presque tous mes succès, à qui notre brave athlète Klinger doit tant de victoires, que Novossilzof est un des fauteurs principaux de cette objection?
J’ai percé au travers de cette feinte, j’ai senti que son dessein était de procurer le même avantage aux autres universités, et sur le champ j’ai proposé ouvertement ce que lui comme membre de la Commission ne pouvait guère proposer, et il n’a pas manqué de m’appuyer. Mais pour cela il eût fallu changer l’état prescrit des universités russes, peut-être abandonner des idées favorites qui feront la ruine de ces établissements, il eût fallu annoncer qu’on a fait des constitutions sans connaître à fond la nature de la chose.
Sire! Quand le Comte Savadofsky Vous présentera nos Statuts, daignez Vous souvenir de ce point au chapitre de l’État, et veuillez exiger que le Ministre insère l’article des pensions tels que je l’ai demandé. Par là Vous rendez un service non seulement à Dorpat mais à toutes les universités de l’Empire, et un très grand service. Par là Vous les autorisez à des réclamations sur leur état et ces réclamations mèneront à une révision absolument indispensable de toute leur constitution viciée par l’esprit de fabrique qui y règne. Cet esprit de fabrique est là le vrai ennemi des universités russes; c’est lui qui en fera des établissements en sous-ordre infiniment inférieur à celui de Dorpat, c’est le ver qui minera leur grandeur future, qui réalisera les craintes pusillanimes que l’on prise dans ma prétendue ambition et dans ma prédication pour Dorpat. Vous savez, Sire, si je m’intéresse à la nation russe. Quand mes principes ne m’en feraient pas la loi, mon cœur me la ferait; c’est Votre nation. Mais laissez-moi la douce vengeance de ne pas les tirer d’erreur. Que ces idées soient utiles à la Russie et que jamais la Russie n’apprenne que j’y ai eu part.