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— Feignez de leur donner ce qu’ils viennent chercher, avança Zmera.

— Encore faudrait-il savoir ce qu’ils…

— Ce sont des hommes, des animaux sauvages. Et la nature nous a dotées, nous les femmes, de tous les atouts pour les apprivoiser. »

Qval Frana fixa la mathelle d’un air offusqué.

« Ai-je bien compris que vous me suggérez d’offrir mes sœurs à la concupiscence de ces monstres ?

— Ils les prendront de toute façon. Autant que vous restiez les maîtresses du jeu. C’est la seule façon d’éviter le massacre. »

Les protecteurs des sentiers avaient accéléré l’allure après le franchissement de l’obstacle de boue. Ils ne tarderaient plus maintenant à atteindre le conventuel. Les djemales avaient fermé le grand portail de bois de l’entrée principale, mais, même si elles avaient réussi à glisser les trois grosses barres de bois dans leurs supports respectifs, même si elles avaient calé les vantaux avec des pierres, les constructions présentaient un peu partout des failles, des passages. Chaudeterre n’avait pas été conçu dans l’optique de soutenir un siège mais pour résister au mieux aux offensives parfois virulentes des vents et des averses de cristaux de glace de l’hivernage. Les assaillants trouveraient rapidement le moyen de s’introduire dans les bâtiments, soit en se faufilant par les ouvertures qui, à certains endroits, n’exigeaient qu’une brève escalade, soit en se glissant dans les bouches d’aération, soit en exploitant les brèches mal rebouchées du mur qui longeait l’enclos des nanziers.

« Alma n’a pas tout à fait tort, fit soudain Qval Anzell. Nous avons la possibilité de nous réfugier dans le labyrinthe qui mène à la grotte de Djema. Nous ne sommes qu’une poignée à connaître le passage. Les protecteurs des sentiers ne pourront pas nous suivre.

— Ils n’en auront pas besoin, objecta Zmera. Il leur suffira de nous attendre à la sortie. »

D’un geste impatient, la belladore écarta les mèches collées à son front, ses tempes et ses joues.

« Ils ne connaissent pas l’existence de ce labyrinthe. Si nous agissons vite, si nous effaçons nos traces, ils ne devineront pas où nous sommes passées. Prenons des vivres et de l’eau. Lorsqu’ils en auront assez d’attendre, il ne leur restera plus qu’à lever le camp.

— Risqué, dit Zmera. Nous prenons le pari de leur stupidité. Nous n’aurons aucune possibilité de nous échapper au cas où les choses ne tourneraient pas comme…

— Il suffit ! coupa Qval Frana. La suggestion de Qval Anzell me paraît la plus judicieuse. Nous avons perdu assez de temps. »

Le labyrinthe souterrain s’ouvrait dans les sous-sols du bâtiment principal. Il ne s’agissait pas d’une véritable entrée d’ailleurs, mais d’une inclinaison progressive du terrain qui s’enfonçait dans une forêt de stalagmites consolidées avec des roches et se resserrait peu à peu jusqu’à prendre la forme d’un tunnel. Les six cents djemales du conventuel de Chaudeterre s’y engouffrèrent après avoir entassé des pains de manne, des gâteaux, des morceaux de viande fumée, des fruits et des légumes secs dans de grands sacs en laine végétale. Après, également, avoir rempli des dizaines de cruches et d’autres récipients d’une eau directement puisée dans la réserve extérieure d’où on avait retiré le matin même les deux cadavres des nanziers.

La vitesse à laquelle les djemales s’étaient organisées avait sidéré Alma. C’était comme si, tout à coup, un seul cœur s’était mis à battre, comme si chaque sœur, chaque novice était devenue la cellule d’un même et grand corps. Le voisinage de la mort, l’instinct de survie avaient dissipé l’inertie qui régnait habituellement sur le conventuel. Les rancœurs, les jalousies, les mesquineries, les querelles s’étaient tues devant l’urgence de la situation.

Devant le présent.

Elle ne se tenait pas dans les séances d’éveil, la puissance infinie du présent, ni dans les interprétations plus ou moins absconses de l’enseignement de Qval Djema, mais dans cette conscience aiguë de chaque geste, de chaque instant, dans ce creuset primordial, fondamental, où se fondaient la vie et la mort. Les djemales s’étaient réparti les tâches sans un mot ni un geste superflu, sans un grincement ni un soupir, avec cette seule idée que leur survie reposait entièrement sur leur efficacité, sur leur harmonie. Alma elle-même avait rejoint l’un des groupes qui remplissaient les sacs de pains et de gâteaux de manne. Aucune ironie dans les regards qui l’avaient accueillie, mais une sérénité grave qui traduisait une adaptation, une ouverture totales aux contraintes du moment.

De même, le départ vers le labyrinthe souterrain s’était effectué sans précipitation ni bousculade, chacune venant naturellement occuper sa place dans le flot limpide qui s’écoulait vers les profondeurs de la terre. Les unes portaient les sacs, d’autres les cruches, d’autres encore des couvertures, des robes de rechange ou les fioles des belladores.

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