Читаем Piège pour Catherine полностью

Le premier, il s'engagea dans l'escalier, levant la lanterne afin de mieux en éclairer les marches et offrant la main à la châtelaine pour l'aider à descendre. Ce ne fut d'ailleurs pas long : une vingtaine de marches et leurs pieds foulèrent le sol de terre battue d'un étroit boyau qui semblait s'enfoncer sous l'église même.

Guidée par le prêtre, qui n'avait pas lâché sa main, Catherine le suivit en tâtonnant un peu. L'atmosphère humide et froide sentait fortement le moisi. On y respirait avec difficulté. Mais, au bout de quelques pas, le sol parut se dérober, tandis qu'un nouvel escalier apparaissait, plus raide que le premier, et sans doute plus long, car la lumière n'en éclairait pas l'extrémité.

Avant de s'y engager, l'abbé Bernard s'arrêta, leva sa lanterne et scruta le visage de sa compagne :

— Comment vous sentez-vous ? demanda-t-il avec une nuance d'inquiétude. Je me demande si je n'ai pas trop présumé de vos forces.

Pourrez-vous continuer ?

Elle eut un sourire.

— N'en doutez pas ! J'ai trop envie de voir ce que vous voulez me montrer. La curiosité, mon Père ! Avec elle, on emmène une femme à l'agonie jusqu'au bout de la terre.

Il lui rendit son sourire et baissa la lanterne.

— Allons, alors !

Se contentant de serrer plus fermement la main de la jeune femme, il s'engagea dans l'escalier. A mesure que l'on descendait, des coups sourds se faisaient entendre, joints au glissement soyeux de l'eau courante.

— Est-ce la fontaine que nous entendons ? demanda Catherine.

Celle qui coule sous l'église ?

— C'est bien elle. Dans un instant, nous serons au niveau du puits.

Il y avait, en effet, dans le chœur de l'église du monastère une trappe de bois qui couvrait un puits profond, dont on ignorait la provenance, mais dont le niveau ne baissait jamais. Aussi les moines s'étaient-ils bien gardés de le boucher, car ce puits était infiniment précieux, aussi bien en cas d'incendie qu'en cas de siège, comme cela se présentait alors, les gens de la cité étant toujours assurés, au moins, de ne pas mourir de soif. L'eau, d'ailleurs, en était d'une pureté et d'une fraîcheur remarquables, même au plus fort de l'été.

Cependant, les bruits qui montaient des profondeurs s'amplifiaient et Catherine s'en inquiéta :

— J'entends couler l'eau, dit-elle, mais d'où viennent ces coups sourds ?

— Encore quelques instants de patience et vous comprendrez...

Elle n'insista pas pour ne pas gâcher le plaisir du saint homme qui, de toute évidence, lui réservait une surprise, sans doute ce mystérieux moyen de quitter la ville. Mais, dans ce cas, pourquoi ne l'avait-il pas révélé plus tôt ?... Elle ne prolongea cependant pas ses cogitations intimes car sa curiosité venait de trouver une nouvelle matière à s'exercer : l'escalier longeait un mur qui, sous la lumière fugitive de la lanterne, se révélait peint à fresques. Ou, tout au moins, avait été, jadis, peint à fresques, car de larges plaques de plâtre colorié s'y montraient, dessinant la draperie angulaire d'un vêtement et d'étranges poissons stylisés qui semblaient pris dans un filet.

Mais on était parvenu au bas des marches et l'abbé levait sa lanterne en tournant, très lentement, sur lui- même.

— Regardez, dit-il seulement.

Suivant le trajet du halo lumineux, la jeune femme obéit, non sans une exclamation de surprise.

Elle se trouvait au fond d'une crypte, visiblement taillée dans le rocher dont les parois se montraient brutes sur la majeure partie de la pièce.

Mais ce roc avait des reflets mauves et pourprés qui dénonçaient les filons d'améthystes et composaient un décor aussi barbare que fastueux, encadrant le chœur arrondi d'une chapelle borné d'un arc en plein cintre et de deux demi-piliers ronds.

Là, les fresques reparaissaient, moins abîmées que celles de l'escalier, reproduisant, mêlés à une théorie d'anges naïfs aux longues ailes pointues, les symboles des Quatre Evangélistes. Mais le plus étrange était le fond de cette chapelle : anges et symboles cheminaient vers un étonnant soleil d'or, dont les rayons rigides se bosselaient de toutes les pierres dont était si riche le sous-sol de la vieille Auvergne volcanique : aigues- marines et péridots, quartz roses et améthystes, topazes et citrines. Tout cela brillait doucement dans l'ombre, révélé par le feu de la lanterne, et tout cela brillait pour rien, car au centre du soleil se creusait une niche vide à l'exception d'une épaisse couche de poussière. Devant cette niche, il y avait une table de basalte vert criblé d'olivines, une espèce d'autel barbare où se voyaient encore les coulures noires des cierges qui y avaient brûlé.

De cette niche vide, de cet autel un instant arraché à la nuit sépulcrale par la flamme timide d'une lanterne, émanait une telle tristesse, une si pesante impression d'abandon, que Catherine en frissonna.

— Quel lieu étrange ! Pourquoi n'ai-je encore jamais entendu parler de cette chapelle ?

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