Читаем Sans famille полностью

Je passai ainsi deux journées dans l’angoisse, n’osant pas sortir de la cour de l’auberge, m’occupant de Joli-Cœur et des chiens, qui, tous, se montraient inquiets et chagrins.

Enfin, le troisième jour, un homme m’apporta une lettre de Vitalis.

Par cette lettre, mon maître me disait qu’on le gardait en prison pour le faire passer en police correctionnelle le samedi suivant, sous la prévention de résistance à un agent de l’autorité, et de voies de fait sur la personne de celui-ci.

« En me laissant emporter par la colère, ajoutait-il, j’ai fait une lourde faute qui pourra me coûter cher. Mais il est trop tard pour le reconnaître. Viens à l’audience ; tu y trouveras une leçon. »

Puis il ajoutait des conseils pour ma conduite ; il terminait en m’embrassant et me recommandant de faire pour lui une caresse à Capi, à Joli-Cœur, à Dolce et à Zerbino.

Pendant que je lisais cette lettre, Capi, entre mes jambes, tenait son nez sur le papier, flairant, reniflant, et les mouvements de sa queue me disaient que bien certainement, il reconnaissait, par l’odorat, qu’elle avait passé par les mains de son maître ; depuis trois jours, c’était la première fois qu’il manifestait de l’animation et de la joie.

Ayant pris des renseignements, on me dit que l’audience de la police correctionnelle commençait à dix heures. À neuf heures, le samedi, j’allai m’adosser contre la porte et, le premier, je pénétrai dans la salle. Peu à peu, la salle s’emplit, et je reconnus plusieurs personnes qui avaient assisté à la scène avec l’agent de police.

Je ne savais pas ce que c’était que les tribunaux et la justice, mais d’instinct j’en avais une peur horrible ; il me semblait que, bien qu’il s’agît de mon maître et non de moi, j’étais en danger ; j’allai me blottir derrière un gros poêle, et, m’enfonçant contre la muraille, je me fis aussi petit que possible.

Ce ne fut pas mon maître qu’on jugea le premier ; mais des gens qui avaient volé, qui s’étaient battus, qui, tous, se disaient innocents, et qui, tous, furent condamnés.

Enfin, Vitalis vint s’asseoir entre deux gendarmes sur le banc où tous ces gens l’avaient précédé.

Ce qui se dit tout d’abord, ce qu’on lui demanda, ce qu’il répondit, je n’en sais rien ; j’étais trop ému pour entendre, ou tout au moins pour comprendre. D’ailleurs, je ne pensais pas à écouter, je regardais.

Je regardais mon maître qui se tenait debout, ses grands cheveux blancs rejetés en arrière, dans l’attitude d’un homme honteux et peiné ; je regardais le juge qui l’interrogeait.

— Ainsi, dit celui-ci, vous reconnaissez avoir porté des coups à l’agent qui vous arrêtait ?

— Non des coups, monsieur le Président, mais un coup ; lorsque j’arrivai sur la place où devait avoir lieu notre représentation, je vis l’agent donner un soufflet à l’enfant qui m’accompagnait.

— Cet enfant n’est pas à vous ?

— Non, monsieur le Président, mais je l’aime comme s’il était mon fils. Lorsque je le vis frapper, je me laissai entraîner par la colère, Je saisis vivement la main de l’agent et l’empêchai de frapper de nouveau.

— Vous avez vous-même frappé l’agent ?

— C’est-à-dire que lorsque celui-ci me mit la main au collet, j’oubliai quel était l’homme qui se jetait sur moi, ou plutôt je ne vis en lui qu’un homme au lieu de voir un agent, et un mouvement instinctif, involontaire, m’a emporté.

— À votre âge, on ne se laisse pas emporter.

— On ne devrait pas se laisser emporter ; malheureusement on ne fait pas toujours ce qu’on doit ; je le sens aujourd’hui.

— Nous allons entendre l’agent.

Celui-ci raconta les faits tels qu’ils s’étaient passés, mais en insistant plus sur la façon dont on s’était moqué de sa personne, de sa voix, de ses gestes, que sur le coup qu’il avait reçu.

Pendant cette déposition, Vitalis, au lieu d’écouter avec attention, regardait de tous côtés dans la salle. Je compris qu’il me cherchait. Alors je me décidai à quitter mon abri, et, me faufilant au milieu des curieux, j’arrivai au premier rang.

Il m’aperçut, et sa figure attristée s’éclaira ; je sentis qu’il était heureux de me voir, et, malgré moi, mes yeux s’emplirent de larmes.

— C’est tout ce que vous avez à dire pour votre défense ? demanda enfin le président.

— Pour moi, je n’aurais rien à ajouter ; mais pour l’enfant que j’aime tendrement et qui va rester seul, pour lui je réclame l’indulgence du tribunal, et le prie de nous tenir séparés le moins longtemps possible.

Je croyais qu’on allait mettre mon maître en liberté. Mais il n’en fut rien.

Un autre magistrat parla pendant quelques minutes, puis le président, d’une voix grave, dit que le nommé Vitalis, convaincu d’injures et de voies de fait envers un agent de la force publique, était condamné à deux mois de prison et à cent francs d’amende.

Deux mois de prison !

À travers mes larmes, je vis la porte par laquelle Vitalis était entré, se rouvrir ; celui-ci suivit un gendarme, puis la porte se referma.

Deux mois de séparation.

Où aller ?

Chapitre 11

En bateau

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