Читаем Sans famille полностью

Un bateau était arrêté sur le canal, l’avant tourné vers la rive sur laquelle je me trouvais ; les deux chevaux qui le traînaient avaient fait halte sur la rive opposée.

C’était un singulier bateau, et tel que je n’en avais pas encore vu de pareil ; il était beaucoup plus court que les péniches qui servent ordinairement à la navigation sur les canaux, et au-dessus de son pont peu élevé au dessus de l’eau était construite une sorte de galerie vitrée ; à l’avant de cette galerie se trouvait une verandah ombragée par des plantes grimpantes, dont le feuillage accroché çà et là aux découpures du toit retombait par places en cascades vertes ; sous cette verandah j’aperçus deux personnes : une dame jeune encore, à l’air noble et mélancolique qui se tenait debout, et un enfant, un garçon à peu près de mon âge qui me parut couché.

C’était cet enfant sans doute qui avait crié « bravo ».

Remis de ma surprise, car cette apparition n’avait rien d’effrayant, je soulevai mon chapeau pour remercier celui qui m’avait applaudi.

— C’est pour votre plaisir que vous jouez ? me demanda la dame, parlant avec un accent étranger.

— C’est pour faire travailler mes comédiens et aussi… pour me distraire.

L’enfant fit un signe et la dame se pencha vers lui.

— Voulez-vous jouer encore ? me demanda la dame en relevant la tête.

Si je voulais jouer ! Jouer pour un public qui m’arrivait si à propos. Je ne me fis pas prier.

— Voulez-vous une danse ou une comédie ? dis-je.

— Oh ! une comédie ! s’écria l’enfant.

Mais la dame interrompit pour dire qu’elle préférait une danse.

— La danse, c’est trop court, s’écria l’enfant.

— Après la danse, nous pourrons, si l’honorable société le désire, représenter différents tours, « tels qu’ils se font dans les cirques de Paris. »

C’était une phrase de mon maître, je tâchai de la débiter comme lui avec noblesse. En réfléchissant, j’étais bien aise qu’on eût refusé la comédie, car j’aurais été assez embarrassé pour organiser la représentation, d’abord parce que Zerbino me manquait et aussi parce que je n’avais pas les costumes et les accessoires nécessaires.

Je repris donc ma harpe et je commençai à jouer une valse ; aussitôt Capi entoura la taille de Dolce avec ses deux pattes et ils se mirent à tourner en mesure. Puis Joli-Cœur dansa un pas seul. Puis successivement nous passâmes en revue tout notre répertoire. Nous ne sentions pas la fatigue. Quant à mes comédiens, ils avaient assurément compris qu’un dîner serait le paiement de leurs peines, et ils ne s’épargnaient pas plus que je m’épargnais moi-même.

Tout à coup, au milieu d’un de mes exercices, je vis Zerbino sortir d’un buisson, et quand ses camarades passèrent près de lui, il se plaça effrontément au milieu d’eux et prit son rôle.

Tout en jouant et en surveillant mes comédiens, je regardais de temps en temps le jeune garçon, et, chose étrange, bien qu’il parût prendre grand plaisir à nos exercices, il ne bougeait pas : il restait couché, allongé, dans une immobilité complète, ne remuant que les deux mains pour nous applaudir.

Était-il paralysé ? il semblait qu’il était attaché sur une planche.

Insensiblement le vent avait poussé le bateau contre la berge sur laquelle je me trouvais et je voyais maintenant l’enfant comme si j’avais été sur le bateau même près de lui : il était blond de cheveux, son visage était pâle, si pâle qu’on voyait les veines bleues de son front sous sa peau transparente ; son expression était la douceur et la tristesse, avec quelque chose de maladif.

— Combien faites-vous payer les places à votre théâtre ? me demanda la dame.

— On paye selon le plaisir qu’on a éprouvé.

— Alors, maman, il faut payer très-cher, dit l’enfant.

Puis il ajouta quelques paroles dans une langue que je ne comprenais pas.

— Arthur voudrait voir vos acteurs de plus près, me dit la dame.

Je fis un signe à Capi qui prenant son élan, sauta dans le bateau.

— Et les autres ? cria Arthur.

Zerbino et Dolce suivirent leur camarade.

— Et le singe !

Joli-Cœur aurait facilement fait le saut, mais je n’étais jamais sûr de lui ; une fois à bord, il pouvait se livrer à des plaisanteries qui n’auraient peut-être pas été du goût de la dame.

— Est-il méchant ? demanda-t-elle.

— Non, madame ; mais il n’est pas toujours obéissant et j’ai peur qu’il ne se conduise pas convenablement.

— Eh bien ! embarquez avec lui.

Disant cela, elle fit signe à un homme qui se tenait à l’arrière auprès du gouvernail, et aussitôt cet homme passant à l’avant jeta une planche sur la berge.

C’était un pont. Il me permit d’embarquer sans risquer le saut périlleux, et j’entrai dans le bateau gravement, ma harpe sur l’épaule et Joli-Cœur dans ma main.

— Le singe ! le singe ! s’écria Arthur.

Je m’approchai de l’enfant, et, tandis qu’il flattait et caressait Joli-Cœur, je pus l’examiner à loisir.

Chose surprenante, il était bien véritablement attaché sur une planche, comme je l’avais cru tout d’abord.

— Vous avez un père, n’est-ce pas, mon enfant ? me demanda la dame.

— Oui, mais je suis seul en ce moment.

— Pour longtemps ?

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