Читаем Сatherine et le temps d'aimer полностью

Sans un mot, Catherine détacha la grande poche de cuir solide dans laquelle elle gardait son chapelet, un peu d'or, la dague à l'épervier qui ne la quittait jamais et l'émeraude gravée de la reine Yolande. La simplicité voulue de son accoutrement d'errante ne lui permettait pas, en effet, de porter à son doigt un bijou de cette valeur et, d'autre part, elle ne voulait pas s'en séparer. D'autant moins qu'elle se dirigeait vers ces pays espagnols d'où était originaire la souveraine et où ses armes pouvaient être un secours, ainsi que Yolande elle-même le lui avait dit.

La nonne vida l'aumônière sur l'étroit autel de pierre et, voyant la dague, jeta sur Catherine un regard oblique.

— Un étrange objet pour une femme qui ne doit avoir autre défense que sa prière.

— Cette dague est celle de mon époux ! répliqua la jeune femme sèchement. Je ne m'en sépare jamais et j'ai appris à me défendre contre les brigands !

— Qui seraient fort intéressés par ceci, sans doute ! lit la sœur en désignant la bague.

Une bouffée de colère monta aux joues de Catherine. Le ton et les manières de cette femme lui déplaisaient. Elle ne résista pas au désir de lui clouer le bec.

— La reine Yolande, duchesse d'Anjou et mère de notre reine me l'a donnée elle-même. Y voyez-vous un inconvénient ? Je suis...

— Une grande dame, sans doute ? coupa l'autre avec un sourire sarcastique. Cela se devine sans peine quand on voit ces choses.

Qu'avez-vous à dire... noble dame ?

Sous les yeux ahuris de Catherine, elle venait de déplier un petit linge que la jeune femme n'avait pas encore remarqué. Et, sur sa blancheur douteuse, étincelaient, splendides, d'un magnifique rouge sombre, les cinq rubis de sainte Foy...

— Qu'est-ce que cela ? s'écria Catherine. Je ne les ai jamais vus.

Ermengarde !

— C'est de la sorcellerie ! s'écria la grosse dame. Comment ces pierres sont-elles venues ici ? Il faut...

— Sorcellerie ou pas, nous les tenons ! s'écria la sœur. Et vous allez répondre de ce vol.

D'une main, elle empoignait Catherine par le bras et la tirait dehors en criant :

Mes frères ! Arrêtez ! Nous avons les rubis ! Et voici la voleuse ! D'un geste brutal, Catherine, rouge de colère et de honte devant toutes ces paires d'yeux soudain tournés vers elle, arracha son bras à la main sèche de la nonne.

— Ce n'est pas vrai ! Je n'ai rien pris !... Ces pierres se sont trouvées, je ne sais comment, dans mon aumônière..."On a dû les y mettre.

Un grondement de colère poussé par les pèlerins lui coupa la parole. Elle comprit, avec terreur, qu'ils ne la croyaient pas. Exaspérés par la pluie, par le retard, par l'accusation qui pesait sur eux, tous ces braves gens étaient prêts à se changer en autant de loups. La panique s'enfla dans le cœur de Catherine. Elle était là, au milieu de ce cercle menaçant refermé autour d'elle, avec cette femme haineuse qui glapissait à ses côtés qu'il fallait la ramener à Conques, la livrer à la justice de l'Abbé, la pendre...

La sœur n'alla pas plus loin dans sa diatribe. Ermengarde, qui avait clopiné jusqu'à elle, venait de l'empoigner par le bras et la secouait comme un prunier.

— Cessez de brailler ! hurla-t-elle. Ah ! çà, ma fille, vous êtes complètement folle ! Accuser de vol une noble dame ?... Savez-vous bien de qui vous parlez ?

— D'une voleuse, glapit l'autre hors d'elle. D'une ribaude qui cache une dague sur elle avec le produit d'un autre vol. Car cette bague qu'elle ose prétendre lui avoir été donnée par la reine Yolande...

Une fois encore, elle dut se taire. La belle main d'Ermengarde s'était levée et de toute sa force s'était abattue sur sa joue. Les cinq doigts y demeurèrent imprimés en rouge.

— Voilà pour vous apprendre la politesse et la modération, ma «

sœur », s'écria-t-elle en appuyant sur le mot. Vrai Dieu, si tous les couvents sont peuplés de harpies dans votre genre, Dieu ne doit guère être heureux en ménage ! Puis, enflant sa voix, elle tonna : « Holà !

Béraud et les autres ! Aux armes ! »

Avant que les pèlerins stupéfaits eussent songé à les en empêcher, les trois Bourguignons avaient poussé leurs chevaux jusqu'au milieu du cercle dont l'oratoire formait la corde et prenaient position devant les trois femmes. Posément, Béraud tira sa longue épée tandis que ses hommes, décrochant le grand arc d'if qui pendait à leur épaule, y plaçaient déjà une flèche. Dans un profond silence, les pèlerins suivirent ces menaçants préparatifs. Ermengarde se permit un large sourire.

— Le premier qui bouge ne fera pas trois pas ! dit- elle durement.

Puis, changeant de ton et, soudain aimable : Les forces étant mieux équilibrées, causons, s'il vous plaît !

Malgré la menace, Gerbert Bohat fit deux pas en avant. L'un des hommes banda son arc, mais la comtesse retint sa main tandis que le chef des pèlerins levait la sienne.

— Puis-je parler ?

— Parlez, messire Bohat !

— Est-il exact que les rubis aient été trouvés sur cette...

Le terme qu'il ne se risqua pas à employer n'en fouetta pas moins la colère de Catherine.

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