Читаем Avé, Christ полностью

Pendant quelques jours, Anaclette racontait qu'elle avait veillé sur lui, niais fatiguée, elle avait fini par obéir aux instructions de la maîtresse de maison qui lui recommandait de se reposer. ET dès la première nuit où elle s'était livrée au repos dans sa chambre, Galba était mystérieusement décédé, alors que quelques esclaves de confiance assuraient en sourdine que le propriétaire des lieux avait été empoisonné par sa propre femme avec une tisane préparée par elle-même.

Face à ces catastrophes, Tatien et sa fille pleuraient.

La disgrâce morale de Lucile les atterrait.

Ils ont insisté pour que leur veille amie reste avec eux mais la dévouée servante a admis qu'elle était devenue chrétienne et qu'elle désirait se retrouver seule pour reconsidérer le chemin parcouru. Elle avait donc décidé de retourner sur l'île de Chypre répondant à la demande affectueuse des derniers parents qui lui restaient.

Accompagnée de deux neveux qui s'occupaient d'elle, elle ne s'est pas attardée plus d'une semaine prenant ainsi congé de ses chers amis pour toujours.

Impressionnée peut-être par les affligeantes nouvelles rapportées de Rome, Blandine ne s'est plus levée.

En vain Tatien l'entourait de surprises et de caresses... En vain, Celse Quint lui racontait de nouvelles histoires de héros et de martyrs.

Petit à petit, la malade renonçait à toute espèce de nourriture et ressemblait chaque fois davantage allongée dans son lit blanc à un ange sculpté dans l'ivoire uniquement animé par ses yeux sombres encore vivants et brillants.

Une nuit, juste à la veille d'un grand spectacle organisé en hommage à d'illustres patriciens où Tatien serait investi de grandes responsabilités, la patiente l'a appelé et lui a serré affectueusement les mains.

Ils ont échangé un inoubliable regard où s'exprimait toute l'immense douleur qui étranglait leur âme devinant des adieux tous proches.

Père — lui dit-elle mélancolique —, je sais que je ne tarderai pas à retrouver les nôtres...

Tatien a cherché, en vain, à retenir les larmes qui inondaient ses yeux.

Il aurait voulu lui parler pour la tranquilliser mais n'y parvint pas.

Nous avons toujours été unis, papa ! — a continué la jeune fille triste — à ce jour, je n'ai rien fait sans votre approbation... Mais aujourd'hui, je voudrais demander votre accord pour réaliser un désir avant de partir...

Et sans que son père ait eu le temps de poser des questions, elle a ajouté :

Permettrez-vous que je reçoive la mort dans la foi chrétienne ?

Le patricien a reçu cette demande comme s'il était poignardé dans les fibres les plus profondes de son âme.

Une douleur intraduisible où se mêlaient la tristesse et la jalousie, le fiel et l'angoisse lui fit plier l'échiné amèrement..

Toi aussi, ma fille ? — a-t-il demandé en pleurs. — Mon père lui appartenait, ma mère l'a étreint, Basil s'est immolé pour lui, Livia est morte louant son nom, Anaclette nous a quittés pour le chercher, Celse Quint, ce fils que la destinée m'a légué, est né en lui appartenant... Toujours le Christ !... Toujours le Christ à me chercher, à me tourmenter et à me poursuivre !... Tu étais le seul espoir de mes jours ! J'ai pensé que le menuisier galiléen t'épargnait !... Mais... toi aussi... Blandine, pourquoi n'aimes-tu pas ton père comme ton père t'aime ? Tous m'ont abandonné... pourquoi me quitterais-tu aussi ? Je suis affligé, vaincu, seul...

Difficilement, la jeune fille a bougé ses mains amaigries et pâles et lui a caressé sa tête prématurément vieillie qui se penchait sur elle en sanglots.

Ne souffrez pas, papa ! — dit-elle résignée.

Je veux Jésus, mais vous êtes tout ce que j'ai !... Je n'ai rien trouvé dans la vie égale à votre affection... Votre amour est ma richesse !... Je désire avant tout suivre vos pas... Ne voyez-vous pas que nous prions toujours ensemble au petit matin la prière de Cybèle? Je ferai tout selon votre volonté....

La jeune fille s'est interrompue pendant quelques instants, a montré les signes d'une indéfinissable allégresse sur son maigre visage amaigri et a continué :

Aujourd'hui, cet après-midi, Livia est venue ici... Elle avait apporté une énorme harpe ornée de rosés de lumière... Elle m'a chanté l'hymne aux étoiles avec la même voix que lors de notre rencontre au bord du Rhône... Elle m'a dit que nous serons tous ensemble très bientôt et que je ne devrais pas vous contrarier si vous n'approuviez pas que je devienne chrétienne maintenant... Elle a assuré que la vie est divine et éternelle et que nous n'avons pas de raison de nous tourmenter les uns, les autres... Elle m'a affirmé que l'amour de Jésus glorifie notre chemin et qu'avec le temps il brillera partout... D'ailleurs cher père, j amais j e n'entrerai dans un ciel où vous ne soyez...

Elle a fixé ses yeux profonds et fulgurants au plafond et s'est exclamée :

Jésus est aussi l'amour qui espère toujours... Le pardon sera pour tous...

Tatien a levé son visage et l'a regardée profondément affligé.

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