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Et je ne connais rien au monde qui ne soit d'abord cérémonial. Car tu n'as rien à attendre d'une cathédrale sans architecture, d'une année sans fêtes, d'un visage sans proportions, d'une armée sans règlements, ni d'une patrie sans coutumes. Tu ne saurais quoi faire de tes matériaux en vrac.

Pourquoi me dirais-tu de ces objets en vrac qu'ils sont réalité, et du cérémonial qu'il est illusion? Puisque l'objet lui-même est cérémonial de ses parties. Pourquoi l'armée selon toi serait-elle moins réelle qu'une pierre? Mais j'ai dénommé pierre un certain cérémonial de la poussière dont elle est composée. Et année le cérémonial des jours. Pourquoi l'année serait-elle moins vraie que la pierre?

Ceux-là n'ont découvert que les individus. Et certes, il est bon que les individus prospèrent et se nourrissent et s'habillent et ne souffrent point exagérément. Mais ils meurent dans l'essentiel et ne sont plus que pierres en vrac si tu ne fondes pas dans ton empire un cérémonial des hommes.


Car autrement l'homme n'est plus rien. Et tu ne pleureras pas plus ton frère, s'il meurt, que le chien quand l'autre de la même portée se noie. Mais tu ne tireras point de joie non plus du retour de ton frère. Car le retour du frère doit être d'un temple qui s'embellit, et la mort du frère un éboulement dans le temple.

Et chez les réfugiés berbères je n'ai point observé que l'on pleurât les morts.


Comment saurai-je te démontrer ce que je cherche? Il ne s'agit plus d'un objet qui parle aux sens mais à l'esprit. Ne me demande point de justifier le cérémonial que j'impose. La logique est de l'étage des objets et non de celui du nœud qui les noue. Ici je n'ai plus de langage.

Tu les as vues, les chenilles sans yeux s'acheminer vers la lumière ou faire l'ascension de l'arbre. Et toi qui les observes en homme, tu te formules ce vers quoi elles tendent. Tu conclus: «Lumière» ou «Sommet». Mais elles l'ignorent. Ainsi si tu reçois quelque chose de ma cathédrale, de mon année, de mon visage, de ma patrie, voilà ta vérité et peu m'importe ton vent de paroles qui n'est bon que pour les objets. Tu es chenille. Tu ne conçois point ce que tu cherches.

Si donc de ma cathédrale, de mon année, de mon empire tu sors embelli, sanctifié ou nourri de quelque invisible nourriture, je me dirai: «Voici une belle cathédrale pour hommes. Une belle année. Un bel empire.» Même si je ne sais point d'où considérer pour savoir la cause.

J'ai simplement, comme la chenille, trouvé quelque chose qui est pour moi. Ainsi d'un aveugle en hiver qui cherche le feu avec ses paumes. Et il le trouve. Et il pose son bâton et s'assied auprès, les jambes en croix. Bien qu'il ne sache rien du feu, à la façon dont tu sais quelque chose, toi qui vois. Il a trouvé la vérité de son corps, car tu l'observeras qui ne changera plus de place.

Et si tu reproches à ma vérité de n'être point une vérité, je te raconterai la mort du seul géomètre véritable, mon ami, qui, comme il s'apprêtait de mourir, me pria de l'assister.


CXXVI


Je m'en vins donc à lui de mes pas lents car je l'aimais.

«Géomètre, mon ami, je prierai Dieu pour toi.»

Mais il était las, ayant souffert.

«Ne t'inquiète point pour mon corps. J'ai la jambe morte et le bras mort et me voici comme un vieil arbre. Laisse faire le bûcheron…

— Tu ne regrettes rien, géomètre?

— Que regretterais-je? J'ai le souvenir d'un bras valide et d'une jambe valide. Mais toute la vie est naissance. Et l'on s'adopte tel que l'on est. As-tu jamais regretté ta première enfance, tes quinze ans ou ton âge mûr? Ces regrets-là sont regrets de mauvais poète. Il n'est point là regret, mais douceur de la mélancolie, laquelle n'est point souffrance, mais parfum dans le vase d'une liqueur évaporée. Certes ton œil, le jour où tu le perds, tu te lamentes car toute mue est douloureuse. Mais il n'est point de pathétique à se promener dans la vie avec un seul œil. Et j'ai vu rire les aveugles.

— On peut se souvenir de son bonheur…

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