Читаем Ensemble, c’est tout полностью

— Ta ta ta... Parle pas deu ce que tu connais pas. L'Enfer, c'est bien pire que ça, va... L'Enfer, c'est quand tu peux plus voir les gens que t'aimes... Tout le reste ça compte pas... Dis tu veux pas que j'aille te chercher des chiffons propres ?

— Tu peux sûrement trouver un boulot plus près... Faut pas que tes gamins y restent tout seuls le soir, on ne sait jamais ce qui peut arriver...

— Y a ma belle-sœur.

— Mais tu me dis que tu peux pas compter sur elle...

— Des fois si...

— C'est une grosse boîte Touclean, je suis sûre que tu pourrais trouver des chantiers plus près de chez toi... Tu veux que je t'aide ? Que je demande pour toi ? Que j'écrive à la direction du personnel ? fit Camille en se relevant.

— Non. Touche à rien, malheureuse ! La Josy, elle est comme elle est, mais elle ferme les yeux sur beaucoup deu choses, tu sais... Bavarde et grosse comme je suis, j'ai déjà deu la chance d'avoir du travail... Tu te souviens deu la visite médicale à la rentrée ? L'autre imbécile, le petit docteur... Il a voulu me chicaner parce que mon cœur il était trop noyé sous trop deu graisse ou je ne sais pas quoi... Eh ben, c'est elle qui m'a arrangé mon affaire, alors faut toucher à rien, je teu dis...

— Attends... On parle bien de la même, là ? De l'abrutie qu'est toujours en train de te traiter comme si t'étais la dernière des merdes ?

— Mais oui, on parle deu la même ! fit Mamadou en riant. J'en connais qu'une. Et heureusement dis donc !

— Mais tu viens de lui cracher dessus !

— Où t'as vu ça, toi ? se fâcha-t-elle, j'ai pas craché sur elle ! Je me permettrais pas dis donc...

Camille vida la déchiqueteuse en silence. La vie était un drôle de nuancier quand même...

— En tout cas, c'est gentil. T'es une gentille, toi... Il faut que tu viennes à la maison un soir pour que mon frère te fasse venir une belle vie avec un amour définitif et beaucoup d'enfants.

— Pff...

— Quoi, « pff » ? T'en voudrais pas des enfants ?

— Non.

— Dis pas ça, Camille. Tu vas faire venir le mauvais sort...

— Il est déjà venu...

Elle la dévisagea méchamment :

— Tu devrais avoir honte deu parler comme ça... T'as du travail, une maison, deux bras, deux jambes, un pays, un amoureux...

— Pardon ?

— Ah ! Ah ! exulta-t-elle, tu crois que je t'ai pas vue avec Nourdine en bas ? Toujours à lui flatter son gros chien, là... Tu crois que mes yeux y sont noyés dans deu la graisse aussi ?

Et Camille se mit à rougir.

Pour lui faire plaisir.

Nourdine qui était survolté ce soir-là et encore plus boudiné que d'habitude dans sa combinaison de justicier. Nourdine qui excitait son chien et se prenait pour l'inspecteur Harry...

— Ben qu'est-ce qui se passe, lui demanda Mamadou, pourquoi qu'y grogne comme ça ton veau ?

— Je sais pas ce que c'est, mais y a quequechose qui tourne pas rond.... Restez pas là, les filles. Restez pas par ici...

Ah ! Il était heureux là.... Il ne lui manquait plus que les Ray-Ban et la kalachnikov...

— Restez pas là, je vous dis !

— Hé, calme-toi, lui répondit-elle, te mets pas dans des états pareils...

— Laisse-moi faire mon travail, la grosse ! Je viens pas te dire comment tenir ton balai, moi !

Hum... Chassez le naturel...

Camille fit semblant de prendre le métro avec elle puis remonta les marches en empruntant l'autre sortie. Elle fit deux fois le tour du pâté de maisons et finit par les trouver dans le renfoncement d'un magasin de chaussures. Il était assis, dos à la vitrine et son chien dormait sur ses jambes.

— Ça va ? demanda-t-elle, désinvolte.

Il leva les yeux et mit un moment avant de la reconnaître :

— C'est toi ?

— Oui.

— Les provisions aussi ?

— Oui.

— Ben merci...

— ...

— Il est armé l'autre dingue ?

— J'en sais rien...

— Bon, ben... Salut...

— Je peux te montrer un endroit pour dormir si tu veux...

— Un squat ?

— Un genre...

— Y a qui dedans ?

— Personne...

— C'est loin ?

— Près de la tour Eiffel...

— Non.

— Comme tu voudras...

Elle n'avait pas avancé de trois pas qu'on entendit la sirène des flics qui s'arrêtaient devant un Nourdine surexcité. Il la rattrapa à la hauteur du boulevard :

— Tu demandes quoi en échange ?

— Rien.

Plus de métro. Ils marchèrent jusqu'à l'arrêt du Noc-tambus.

— Passe devant et laisse-moi ton chien... Toi, il te laissera pas monter avec... Comment il s'appelle ?

— Barbès...

— C'est là que je l'ai trouvé...

— Ah, ouais, comme Paddington...

Elle le prit dans ses bras et fit un grand sourire au chauffeur qui n'en avait rien à carrer.

Ils se rejoignirent au fond :

— C'est quoi comme race ?

— On est obligé de faire la conversation aussi ?

— Non.

— J'ai remis un cadenas mais c'est symbolique... Tiens, prends la clef. La perds pas surtout, j'en ai qu'une...

Elle poussa la porte et ajouta calmement :

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