Etant arrivé à Elua, il s’addressa au Sier Mo[...] Brigadier dans les troupes d’Angleterre et François réfugié: il lui témoigna qu’il etoit très mécontent du service d’Espagne, lui dit qu’on l’exp[loite ?] tous les jours à des courses périlleuses, sans lui do[nner] aucune recompense; qu’il avoit fait plusieurs [voya]ges à Lisbonne pour un traitté qui se negoc[i]roit en [tre] l’Espagne et le Portugal et qu’il avoit actuellement des lettres du M. de Bay pour Dom Diego de Mendoza, qu’il ne seroit pas fâché que ces lettres tombas [sent] entre les mains de Mylord Portmore pourvu qu’il ne parut point que ce fut de son consentement], que pour cela, il n’y auroit pas de meilleur moien que de le faire enlever dans quelque endroit de la rou[te].
Cela fut ainsi exécuté, le Baron de St Hilaire enlevé à St Ernos est mené à Mylord Portm[ore] qui etoit à Lisbonne.
Ce Milord aiant lu les lettres, même des art[icles] préliminaires qui paroissent par les memes [...] prest à signer fit grand bruit et se plaignit av[ec] beaucoup d’aigreur du prétendu traitté sur le point d’être signé. Ce Prin[ce] et ses ministres auront beaucoup protesté que ce n’etoit d’autre chose que des proposisions hazard[ées] sur le Marquis de Bay, auxquelles on n’au[roit] jamais fais aucune réponse favorable, les ter [mes] dans lesquels le Marquis de Bay s’exprimoit dans ses dernieres lettres, accomodées à son destein, les prétendus articles préliminaires, le temoinage du Baron de St Hilaire qui assuroit avoir f[ait] plusieurs voyages de Badajoz à Lisbonne, avoir eu plusieurs audiences des Ministres portugais, tout cela parut si serieux et si digne d’attention au Mylord Portmore qu’il jugea à propos d’envoier le Baron de St Hilaire à Londres pour instruire la Cour de toutes les circonstances de cette négociation.
Le Baron de St Hilaire étant arrivé à Londres n’oublia rien pour faire croire que le Roy de Portugal avoit des relations étroites avec le Roy d’Espagne et cette opinion se fortifia tellement dans l’esprit de la Reine Anne et de ses Ministres, qu’il y a de l’apparence qu’elle ne contribua pas peu à les determiner à conclurre la paix avec la France.
La Reine Anne fit donner cinq cens livres sterlings au Baron de St Hilaire et comme la religion catholique dont il fait profession etoit un obstacle à son avancement en Angleterre, on trouva bon de l’envoier à l’Empereur avec de fortes lettres de reccommandation et une ample instruction concernant le prétendu traitté entre les deux Couronnes et le Portugal.
L’empereur lui donna le tittre de Baron cinq mille florins et l’emploi d’intendant de la Marine à Naples.
Dans le mois de mars de l’année 1713, un sujet du Duc de Savoie de la Comté de Nice proposa à l’Empereur de brûler les vaisseaux et l’Arsenal de Thoulon, on l’envoia au Duc d’Usseda à Genes pour concerter avec lui les moiens de réussir dans cette entreprise.
Le Duc d’Usseda eut ordre en mesme te[mps] de prendre sur cela les avis du Baron de St Hilaire comme aiant une exacte connoissance de la situation des lieux se rendit de Naples à Genes où il fut pri[s] à plusieurs conferences qui se tinrent [à] ce sujet; voiant toutes les mesures pris[es] pour l’execution il en informa le Min[istre] de France qui etoit alors à Genes et en [suite] écrivit à Monsieur de Torcy. On prit [des] précautions convenables pour se garen[tir] contre ce dessein et le Duc d’Usseda l’a[vait] voulu mettre à exécution. Il y echoüa, il [y] eut meme des gens arretés et punis.
Le Duc d’Usseda ne pouvant comprendre comment son dessein avoit été eventé, soupçonna le Baron de St Hilaire et in [for] ma l’Empereur de ses soupçons, en sorte que lorsque le Baron de St Hilaire fit retour à Naples il y fut arreté. Au bout de neuf mois, il rompit son arrêt et se rendit à Vienne pour se justifier au [près] de l’Empereur.
Comme la paix etoit prête à se faire [entre ?] la France et l’Empereur et qu’il ne pou[vait] esperer aucune occasion d’être utile a[u] Roy, il passa au service du Czar.
Le Czar lui donna un brevet de consc[ien]ce avec le commandement de cinq cens gardes [marine] établis sur les mémoires et la Direction des Académies de Marine et établies aussi jusqu’[aux] plans qu’il en a fournis.
En décembre 1715 le Czar lui fis epouser la nièce du Baron de Schleinitz: il repassa en France lorsque le Baron de Schleinitz y fut envoié en qualité de Ministre plénipotentiaire de sa Majesté Czarienne.