– Alors, pourquoi Dumbledore tenait-il tant à me garder dans l’ignorance ? demanda Harry qui s’efforçait toujours d’adopter un ton détaché. Est-ce que vous avez… heu… pris la peine de le lui demander ?
Il leva la tête juste à temps pour les voir échanger un regard éloquent : de toute évidence, son comportement était exactement celui qu’ils avaient redouté. Ce qui ne fit rien pour améliorer son humeur.
– Nous avons expliqué à Dumbledore que nous voulions te raconter ce qui se passait, dit Ron. Tu peux nous croire, Harry. Mais il est très occupé en ce moment, nous ne l’avons vu que deux fois depuis que nous sommes arrivés ici et il n’avait pas beaucoup de temps à nous consacrer, il nous a simplement fait jurer de ne rien te communiquer d’important dans nos lettres, il avait peur que nos hiboux soient interceptés.
– Il aurait quand même pu me tenir informé s’il l’avait voulu, répliqua sèchement Harry. Vous n’allez pas me faire croire qu’il n’a aucun moyen de transmettre des messages autrement que par des hiboux.
Hermione jeta un coup d’œil à Ron avant de répondre :
– Je pensais la même chose. Mais en fait, il ne voulait pas que tu saches
– Il pense peut-être que je ne suis pas digne de confiance, dit Harry en observant l’expression de leur visage.
– Ne sois pas idiot, répondit Ron, qui ne savait plus où il en était.
– Ou que je suis incapable de prendre mes responsabilités.
– Ce n’est pas du tout ça ! s’exclama Hermione d’une voix anxieuse.
– Alors, expliquez-moi pourquoi j’ai dû rester chez les Dursley pendant que vous deux, vous étiez ici à participer aux événements ? interrogea Harry, ses paroles sortant en cascade de ses lèvres, sa voix s’intensifiant à chaque mot. Comment se fait-il que vous, vous ayez le droit de savoir ce qui se passe ?
– Ce n’est pas ça du tout ! l’interrompit Ron. Maman ne nous laisse jamais approcher des réunions, elle dit que nous sommes trop jeunes…
À sa propre surprise, Harry se mit alors à hurler :
– DONC, VOUS N’ASSISTEZ PAS AUX RÉUNIONS, ET ALORS ? VOUS ÊTES QUAND MÊME ICI, NON ? ET ENSEMBLE ! MOI, J’AI ÉTÉ COINCÉ CHEZ LES DURSLEY PENDANT TOUT UN MOIS. ET J’AI DÛ AFFRONTER DES SITUATIONS DONT VOUS N’AVEZ JAMAIS EU L’IDÉE. DUMBLEDORE LE SAIT ! QUI A RÉCUPÉRÉ LA PIERRE PHILOSOPHALE ? QUI S’EST DÉBARRASSÉ DE JEDUSOR ? QUI VOUS A SAUVÉS TOUS LES DEUX DES DÉTRAQUEURS ?
Toute l’amertume et la rancœur que Harry avait accumulées au cours du mois écoulé se déversaient à présent : sa déception de n’avoir aucune nouvelle, la peine qu’il avait ressentie à les savoir ensemble loin de lui, sa fureur en apprenant qu’on le suivait à son insu – tous les sentiments dont il avait à moitié honte finissaient par rompre les digues. Hedwige prit peur en entendant tout ce bruit et s’envola pour aller se poser à nouveau sur le sommet de l’armoire. Coquecigrue émit de petits cris de frayeur et voleta encore plus vite autour de leurs têtes.
– QUI EST-CE QUI A DÛ FAIRE FACE À DES DRAGONS, DES SPHINX ET TOUTES SORTES D’AUTRES HORREURS, L’ANNÉE PASSÉE ? QUI EST-CE QUI
Ron restait bouche bée, visiblement paralysé et incapable de répondre quoi que ce soit tandis qu’Hermione paraissait sur le point de fondre en larmes.
– MAIS POURQUOI DEVRAIS-JE ÊTRE AU COURANT DE CE QUI SE PASSE ? POURQUOI SE DONNERAIT-ON LA PEINE DE ME DONNER DES NOUVELLES ?
– Harry, nous voulions te tenir au courant, crois-moi…, commença Hermione.
– VOUS N’AVEZ PAS DÛ VOULOIR BEAUCOUP, SINON VOUS M’AURIEZ ENVOYÉ UN HIBOU, MAIS DUMBLEDORE VOUS A FAIT JURER…
– C’est la vérité…
– PENDANT QUATRE SEMAINES ENTIÈRES, JE SUIS RESTÉ COINCÉ À PRIVET DRIVE, OBLIGÉ DE FOUILLER LES POUBELLES À LA RECHERCHE DE JOURNAUX OÙ JE POURRAIS TROUVER DES INDICATIONS SUR CE QUI SE PASSAIT…
– On voulait…
– J’IMAGINE QUE VOUS VOUS ÊTES BIEN AMUSÉS, ICI, TOUS LES DEUX…
– Non, crois-moi…
– Nous sommes vraiment désolés ! assura Hermione au désespoir, les yeux brillants de larmes. Tu as parfaitement raison, Harry… à ta place, j’aurais été furieuse !
Harry lui jeta un regard noir, en respirant profondément, puis il se détourna et se mit à faire les cent pas. Perchée au sommet de l’armoire, Hedwige hululait d’un air sombre. Il y eut un long silence que seuls venaient briser les grincements sinistres du parquet sous les pas de Harry.
– Et d’ailleurs, on est où, ici ? lança-t-il à Ron et à Hermione.
– Au quartier général de l’Ordre du Phénix, répondit aussitôt Ron.
– Est-ce que quelqu’un va enfin consentir à m’expliquer ce qu’est l’Ordre du Phénix ?
– C’est une société secrète, dit précipitamment Hermione. Dumbledore en est le président, il l’a fondée lui-même. Elle rassemble tous ceux qui ont lutté contre Tu-Sais-Qui la dernière fois.
– Qui en fait partie ? demanda Harry en s’immobilisant, les mains dans les poches.
– Pas mal de gens…
– On en a vu une vingtaine, précisa Ron, mais nous pensons qu’il y en a plus.
Harry les fixa d’un œil sévère.
– Et