Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome II полностью

«Le premier précepte de la philosophie est celui-ci:

«Homme, suffis-toi à toi-même.

«Or, mon ami, quand vous aurez copié votre rondeau, vous aurez gagné votre nourriture d’aujourd’hui. Copiez donc votre rondeau.

– Oh! monsieur, que vous êtes bon!

– Quant au gîte, il est à vous par-dessus le marché; seulement, pas de lecture nocturne, ou, si vous usez de la chandelle, que ce soit la votre, sinon Thérèse gronderait. Avez-vous faim, maintenant?

– Oh! non, monsieur, dit Gilbert suffoqué.

– Il reste du souper d’hier de quoi déjeuner ce matin; ne faites pas de façons; ce repas est le dernier, sauf invitation, si nous restons bons amis, que vous ferez à ma table.

Gilbert commença un geste que Rousseau interrompit d’un signe de tête.

– Il y a, continua-t-il, rue Plâtrière, une petite cuisine pour les ouvriers; vous y mangerez à bon compte, car je vous y recommanderai. En attendant, allons déjeuner.

Gilbert suivit Rousseau sans répondre. Pour la première fois de sa vie il était dompté; il est vrai que c’était par un homme supérieur aux autres hommes.

Après les premières bouchées, il sortit de table et retourna travailler. Il disait vrai: son estomac, trop contracté de la secousse qu’il avait reçue, ne pouvait recevoir aucune nourriture. De tout le jour il ne leva point les yeux de dessus son ouvrage, et vers huit heures du soir, après avoir déchiré trois feuilles, il était parvenu à copier lisiblement et proprement un rondeau de quatre pages.

– Je ne veux pas vous flatter, dit Rousseau, c’est encore mauvais, mais c’est lisible; cela vaut dix sous, les voici.

Gilbert les prit en s’inclinant.

– Il y a du pain dans l’armoire, monsieur Gilbert, dit Thérèse, sur qui la discrétion, la douceur et l’application de Gilbert avaient produit un bon effet.

– Merci, madame, répondit Gilbert; croyez que je n’oublierai point vos bontés.

– Tenez, dit Thérèse en lui tendant le pain.

Gilbert allait refuser; mais il regarda Jean-Jacques et comprit, par ce sourcil qui se fronçait déjà au-dessus de cet œil subtil et par cette bouche si fine qui commençait à se crisper, que son refus pourrait bien blesser son hôte.

– J’accepte, dit-il.

Puis il se retira dans sa petite chambre, tenant en main la pièce de six sous d’argent et les quatre sous de cuivre qu’il venait de recevoir de Jean-Jacques.

– Enfin, dit-il en entrant dans sa mansarde, je suis donc mon maître, c’est-à-dire, non, pas encore, puisque j’ai là le pain de la charité.

Et, quoiqu’il eût faim, il déposa sur l’appui de sa lucarne son pain, auquel il ne toucha point.

Puis, pensant qu’il oublierait sa faim en dormant, il souffla sa chandelle et s’étendit sur sa paillasse.

Le lendemain – Gilbert avait fort peu dormi pendant toute cette nuit – le lendemain, le jour le trouva éveillé. Il se rappela ce que lui avait dit Rousseau des jardins sur lesquels donnait la fenêtre. Il se pencha hors de la lucarne, et vit en effet les arbres d’un beau jardin; au delà de ces arbres s’élevait l’hôtel auquel appartenait ce jardin, et dont l’entrée donnait rue de la Jussienne.

Dans un coin du jardin, tout entouré de jeunes arbres et de fleurs, s’élevait un petit pavillon aux contrevents fermés.

Gilbert pensa d’abord que ces contrevents étaient fermés à cause de l’heure, et que ceux qui habitaient ce pavillon n’étaient pas encore éveillés. Mais, comme les arbres naissants avaient collé leur feuillage contre ces contrevents, Gilbert comprit bientôt que ce pavillon devait être inhabité depuis l’hiver tout au moins.

Il en revint alors à admirer les beaux tilleuls qui lui cachaient le logement principal.

Deux ou trois fois la faim avait entraîné Gilbert à jeter les yeux sur le morceau de pain que, la veille, lui avait coupé Thérèse; mais, toujours maître de lui, et tout en le convoitant, il n’y avait pas touché.

Cinq heures sonnèrent, alors il pensa que la porte de l’allée devait être ouverte; et lavé, brossé et peigné – Gilbert, grâce aux soins de Jean-Jacques, avait, en remontant dans son grenier, trouvé les objets nécessaires à sa modeste toilette – et lavé, brossé, peigné, disons-nous, il prit son morceau de pain et descendit.

Rousseau, qui cette fois n’avait pas été le réveiller, Rousseau, qui par un excès de défiance peut-être, et pour mieux se rendre compte des habitudes de son hôte, n’avait point fermé sa porte la veille, Rousseau l’entendit descendre et le guetta.

Il vit Gilbert sortir son pain sous le bras.

Un pauvre s’approcha de lui, il vit Gilbert lui donner son pain, puis entrer chez un boulanger, qui venait d’ouvrir sa boutique, et acheter un autre morceau de pain.

– Il va aller chez le traiteur, pensa Rousseau, et ses pauvres dix sous y passeront.

Rousseau se trompait; tout en marchant, Gilbert mangea une partie de son pain; puis, s’arrêtant à la fontaine qui coulait au coin de la rue, il but, mangea le reste de son pain, but encore, se rinça la bouche, se lava les mains et revint.

– Ma foi, dit Rousseau, je crois que je suis plus heureux que Diogène, et que j’ai trouvé un homme.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Аламут (ЛП)
Аламут (ЛП)

"При самом близоруком прочтении "Аламута", - пишет переводчик Майкл Биггинс в своем послесловии к этому изданию, - могут укрепиться некоторые стереотипные представления о Ближнем Востоке как об исключительном доме фанатиков и беспрекословных фундаменталистов... Но внимательные читатели должны уходить от "Аламута" совсем с другим ощущением".   Публикуя эту книгу, мы стремимся разрушить ненавистные стереотипы, а не укрепить их. Что мы отмечаем в "Аламуте", так это то, как автор показывает, что любой идеологией может манипулировать харизматичный лидер и превращать индивидуальные убеждения в фанатизм. Аламут можно рассматривать как аргумент против систем верований, которые лишают человека способности действовать и мыслить нравственно. Основные выводы из истории Хасана ибн Саббаха заключаются не в том, что ислам или религия по своей сути предрасполагают к терроризму, а в том, что любая идеология, будь то религиозная, националистическая или иная, может быть использована в драматических и опасных целях. Действительно, "Аламут" был написан в ответ на европейский политический климат 1938 года, когда на континенте набирали силу тоталитарные силы.   Мы надеемся, что мысли, убеждения и мотивы этих персонажей не воспринимаются как представление ислама или как доказательство того, что ислам потворствует насилию или террористам-самоубийцам. Доктрины, представленные в этой книге, включая высший девиз исмаилитов "Ничто не истинно, все дозволено", не соответствуют убеждениям большинства мусульман на протяжении веков, а скорее относительно небольшой секты.   Именно в таком духе мы предлагаем вам наше издание этой книги. Мы надеемся, что вы прочтете и оцените ее по достоинству.    

Владимир Бартол

Проза / Историческая проза