Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome II полностью

Pendant longtemps un silence profond laissa les deux femmes, l’une à ses méditations douloureuses, l’autre à son étonnement, facile à comprendre.

Enfin Madame Louise rompit la première le silence.

– Et vous n’avez rien fait pour faciliter cet enlèvement? dit-elle.

– Rien, Madame.

– Et vous ignorez comment vous êtes sortie du couvent?

– Je l’ignore.

– Cependant un couvent est bien fermé, bien gardé; il y a des barreaux aux fenêtres, des murs presque infranchissables, une tourière qui ne quitte pas ses clefs. Cela est ainsi, en Italie surtout, où les règles sont plus sévères encore qu’en France.

– Que vous dirai-je, Madame, quand moi-même depuis ce moment je m’abîme à creuser mes souvenirs sans y rien trouver?

– Mais vous lui reprochâtes votre enlèvement?

– Sans doute.

– Que vous répondit-il pour s’excuser?

– Qu’il m’aimait.

– Que lui dites-vous?

– Qu’il me faisait peur.

– Vous ne l’aimiez donc pas?

– Oh! non, non!

– En étiez-vous bien sûre?

– Hélas! Madame, c’était un sentiment étrange que j’éprouvais pour cet homme. Lui là, je ne suis plus moi, je suis lui; ce qu’il veut, je le veux; ce qu’il ordonne, je le fais; mon âme n’a plus de puissance, mon esprit plus de volonté: un regard me dompte et me fascine. Tantôt il semble pousser jusqu’au fond de mon cœur des pensées qui ne sont pas miennes, tantôt il semble attirer au dehors de moi des idées si bien cachées jusqu’alors à moi-même, que je ne les avais pas devinées. Oh! vous voyez bien, Madame, qu’il y a magie.

– C’est étrange, au moins, si ce n’est pas surnaturel, dit la princesse. Mais, après cet événement, comment viviez-vous avec cet homme?

– Il me témoignait une vive tendresse, un sincère attachement.

– C’était un homme corrompu peut-être?

– Je ne le crois pas; au contraire, il y a quelque chose de l’apôtre dans sa manière de parler.

– Allons, vous l’aimez, avouez-le.

– Non, non, Madame, dit la jeune femme avec une douloureuse volonté, non, je ne l’aime pas.

– Alors vous auriez dû fuir, vous auriez dû en appeler aux autorités, vous réclamer de vos parents.

– Madame, il me surveillait tellement, que je ne pouvais fuir.

– Que n’écriviez-vous?

– Nous nous arrêtions partout sur la route dans des maisons qui semblaient lui appartenir, où chacun lui obéissait. Plusieurs fois je demandai du papier, de l’encre et des plumes; mais ceux à qui je m’adressais étaient renseignés par lui; jamais aucun ne me répondit.

– Mais en route, comment voyagiez-vous?

– D’abord en chaise de poste; mais à Milan nous trouvâmes non plus une chaise de poste, mais une espèce de maison roulante dans laquelle nous continuâmes notre chemin.

– Mais enfin il était obligé parfois de vous laisser seule?

– Oui. Alors il s’approchait de moi; il me disait: «Dormez.» Et je m’endormais, et ne me réveillais qu’à son retour.

Madame Louise secoua la tête d’un air d’incrédulité.

– Vous ne désiriez pas fuir bien énergiquement, dit-elle; sans quoi, vous y fussiez parvenue.

– Hélas! il me semble cependant que si, Madame… Mais aussi peut-être étais-je fascinée!

– Par ses paroles d’amour, par ses caresses?

– Il me parlait rarement d’amour, Madame, et, à part un baiser sur le front le soir et un autre baiser au front le matin, je ne me rappelle point qu’il m’ait jamais fait d’autres caresses.

– Étrange, étrange, en vérité! murmura la princesse.

Cependant, sous l’empire d’un soupçon, elle reprit:

– Voyons, répétez-moi que vous ne l’aimez pas.

– Je vous le répète, Madame.

– Redites-moi que nul lien terrestre ne vous attache à lui.

– Je vous le redis.

– Que, s’il vous réclame, il n’aura aucun droit à faire valoir.

– Aucun!

– Mais enfin, continua la princesse, comment êtes-vous venue ici? Voyons, car je m’y perds.

– Madame, j’ai profité d’un violent orage qui nous surprit un peu au delà d’une ville qu’on appelle, je crois, Nancy. Il avait quitté sa place près de moi; il était entré dans le second compartiment de sa voiture, pour causer avec un vieillard qui habitait ce second compartiment, je sautai sur son cheval et je m’enfuis.

– Et qui vous fit donner la préférence à la France, au lieu de retourner en Italie?

– Je réfléchis que je ne pouvais retourner à Rome, puisque bien certainement on devait croire que j’avais agi de complicité avec cet homme; j’y étais déshonorée, mes parents ne m’eussent point reçue.

«Je résolus donc de fuir à Paris et d’y vivre cachée, ou bien de gagner quelque autre capitale où je pusse me perdre à tous les regards et aux siens surtout.

«Quand j’arrivai à Paris, toute la ville était émue de votre retraite aux Carmélites, Madame; chacun vantait votre piété, votre sollicitude pour les malheureux, votre compassion pour les affligés. Ce me fut un trait de lumière, Madame; je fus frappée de cette conviction que vous seule étiez assez généreuse pour m’accueillir, assez puissante pour me défendre.

– Vous en appelez toujours à ma puissance, mon enfant; il est donc bien puissant, lui?

– Oh! oui.

Перейти на страницу:

Похожие книги

Аламут (ЛП)
Аламут (ЛП)

"При самом близоруком прочтении "Аламута", - пишет переводчик Майкл Биггинс в своем послесловии к этому изданию, - могут укрепиться некоторые стереотипные представления о Ближнем Востоке как об исключительном доме фанатиков и беспрекословных фундаменталистов... Но внимательные читатели должны уходить от "Аламута" совсем с другим ощущением".   Публикуя эту книгу, мы стремимся разрушить ненавистные стереотипы, а не укрепить их. Что мы отмечаем в "Аламуте", так это то, как автор показывает, что любой идеологией может манипулировать харизматичный лидер и превращать индивидуальные убеждения в фанатизм. Аламут можно рассматривать как аргумент против систем верований, которые лишают человека способности действовать и мыслить нравственно. Основные выводы из истории Хасана ибн Саббаха заключаются не в том, что ислам или религия по своей сути предрасполагают к терроризму, а в том, что любая идеология, будь то религиозная, националистическая или иная, может быть использована в драматических и опасных целях. Действительно, "Аламут" был написан в ответ на европейский политический климат 1938 года, когда на континенте набирали силу тоталитарные силы.   Мы надеемся, что мысли, убеждения и мотивы этих персонажей не воспринимаются как представление ислама или как доказательство того, что ислам потворствует насилию или террористам-самоубийцам. Доктрины, представленные в этой книге, включая высший девиз исмаилитов "Ничто не истинно, все дозволено", не соответствуют убеждениям большинства мусульман на протяжении веков, а скорее относительно небольшой секты.   Именно в таком духе мы предлагаем вам наше издание этой книги. Мы надеемся, что вы прочтете и оцените ее по достоинству.    

Владимир Бартол

Проза / Историческая проза