Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome II полностью

«J’entrai dans le chœur, et je pris ma stalle. Il y avait entre les toiles vertes qui fermaient les grilles de ce chœur, ou plutôt qui affectaient de les fermer, il y avait, dis-je, un espace assez grand pour que l’on distinguât la nef.

«Je vis, par cet espace donnant pour ainsi dire sur la terre, un homme demeuré seul debout au milieu de la foule prosternée. Cet homme me regardait, ou plutôt il me dévorait des yeux. Je sentis alors cet étrange mouvement de malaise que j’avais déjà éprouvé; cet effet surhumain qui m’attirait pour ainsi dire hors de moi-même, comme à travers une feuille de papier, une planche, un plat même, j’avais vu mon frère attirer une aiguille avec un fer aimanté.

«Hélas! vaincue, subjuguée, sans force contre cette attraction, je me penchai vers lui, je joignis les mains comme on les joint devant Dieu, et des lèvres et du cœur à la fois je lui dis:

«- Merci, merci!

«Mes sœurs me regardèrent avec surprise; elles n’avaient rien compris à mon mouvement, rien compris à mes paroles; elles suivirent la direction de mes mains, de mes yeux, de ma voix. Elles se haussèrent sur leurs stalles pour regarder à leur tour dans la nef. Je regardai aussi en tremblant.

«L’étranger avait disparu.

«Elles m’interrogèrent, mais je ne sus que rougir, pâlir et balbutier.

«Depuis ce moment, Madame, s’écria Lorenza avec désespoir, depuis ce moment, je suis au pouvoir du démon!

– Je ne vois rien de surnaturel en tout cela cependant, ma sœur, répondit la princesse avec un sourire; calmez-vous donc et continuez.

– Oh! parce que vous ne pouvez pas sentir ce que j’éprouvais, moi.

– Qu’éprouvâtes-vous?

– La possession tout entière: mon cœur, mon âme, ma raison, le démon possédait tout.

– Ma sœur, j’ai bien peur que ce démon ne fût l’amour! dit Madame Louise.

– Oh! l’amour ne m’eût point fait souffrir ainsi, l’amour n’eût point oppressé mon cœur, l’amour n’eût point secoué tout mon corps comme le vent d’orage fait d’un arbre, l’amour ne m’eût pas donné la mauvaise pensée qui me vint.

– Dites cette mauvaise pensée, mon enfant.

– J’aurais dû tout avouer à mon confesseur, n’est-ce pas, Madame?

– Sans doute.

– Eh bien, le démon qui me possédait me souffla tout bas, au contraire, de garder le secret. Pas une religieuse, peut-être, n’était entrée dans le cloître sans laisser dans le monde qu’elle abandonnait un souvenir d’amour, beaucoup avaient un nom dans le cœur en invoquant le nom de Dieu. Le directeur était habitué à de pareilles confidences. Eh bien, moi, si pieuse, si timide, si candidement innocente, moi qui, avant ce fatal voyage de Subiaco, n’avais jamais échangé une seule parole avec un autre homme que mon frère, moi qui depuis lors n’avais croisé que deux fois mon regard avec l’inconnu, je me figurai, Madame, qu’on m’attribuerait avec cet homme une de ces intrigues qu’avant de prendre le voile chacune de nos sœurs avait eues avec leurs regrettés amants.

– Mauvaise pensée, en effet, dit Madame Louise; mais c’est encore un démon bien innocent que celui qui n’inspire à la femme qu’il possède que de semblables pensées. Continuez.

– Le lendemain, on me demanda au parloir. Je descendis; je trouvai une de mes voisines de la via Frattina, à Rome, jeune femme qui me regrettait beaucoup, parce que chaque soir nous causions et chantions ensemble.

«Derrière elle, auprès de la porte, un homme enveloppé d’un manteau l’attendait comme eût fait un valet. Cet homme ne se tourna point vers moi; cependant, moi, je me tournai vers lui. Il ne me parla point, et cependant je le devinai; c’était encore mon protecteur inconnu.

«Le même trouble que j’avais déjà éprouvé se répandit dans mon cœur. Je me sentis tout entière envahie par la puissance de cet homme. Sans les barreaux qui me retenaient captive, j’eusse bien certainement été à lui. Il y avait dans l’ombre de son manteau des rayonnements étranges qui m’éblouissaient. Il y avait dans son silence obstiné des bruits entendus de moi seule, et qui me parlaient une langue harmonieuse.

«Je pris sur moi-même toute la puissance que je pouvais avoir, et demandai à ma voisine de la via Frattina quel était cet homme qui l’accompagnait.

«Elle ne le connaissait point. Son mari devait venir avec elle; mais, au moment de partir, il était rentré accompagné de cet homme, et lui avait dit:

«- Je ne puis te conduire à Subiaco, mais voici mon ami qui t’accompagnera.

«Elle n’en avait pas demandé davantage, tant elle avait envie de me revoir, et elle était venue dans la compagnie de l’inconnu.

«Ma voisine était une sainte femme; elle vit dans un coin du parloir une madone qui avait la réputation d’être fort miraculeuse, elle ne voulut point sortir sans y avoir fait sa prière, elle alla s’agenouiller devant elle.

«Pendant ce temps, l’homme entra sans bruit, s’approcha lentement de moi, ouvrit son manteau et plongea ses regards dans les miens comme il eût fait de deux rayons ardents.

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