Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome II полностью

La supérieure s’assit dans un fauteuil séculaire; il était de bois de chêne, avait été sculpté sous Henri II et avait servi aux neuf dernières abbesses des carmélites.

C’était un tribunal redoutable, devant lequel avaient tremblé bien des pauvres novices, prises entre le spirituel et le temporel.

La trésorière entra un moment après, amenant l’étrangère au long voile que nous connaissons déjà.

Madame Louise avait l’œil perçant de la famille; cet œil fut fixé sur Lorenza Feliciani du moment où elle entra dans le cabinet: mais elle reconnut dans la jeune femme tant d’humilité, tant de grâce, tant de beauté sublime, elle vit enfin tant d’innocence dans ses grands yeux noirs noyés de larmes encore récentes, que ses dispositions envers elle, d’hostiles qu’elles étaient d’abord, devinrent bienveillantes et fraternelles.

– Approchez, madame, dit la princesse, et parlez.

La jeune femme fit un pas en tremblant et voulut mettre un genou en terre.

La princesse la releva.

– N’est-ce pas vous, madame, dit-elle, qu’on appelle Lorenza Feliciani?

– Oui, Madame.

– Et vous désirez me confier un secret?

– Oh! j’en meurs de désir!

– Mais pourquoi n’avez-vous pas recours au tribunal de la pénitence? Je n’ai pouvoir que de consoler, moi; un prêtre console et pardonne.

Madame Louise prononça ces derniers mots en hésitant.

– Je n’ai besoin que de consolation, Madame, répondit Lorenza, et d’ailleurs c’est à une femme seulement que j’oserais dire ce que j’ai à vous raconter.

– C’est donc un récit bien étrange que celui que vous allez me faire?

– Oui, bien étrange. Mais écoutez-moi patiemment, Madame; c’est à vous seule que je puis parler, je vous le répète, parce que vous êtes toute puissante, et qu’il me faut presque le bras de Dieu pour me détendre.

– Vous défendre! Mais on vous poursuit donc? Mais on vous attaque donc?

– Oh! oui, Madame, oui, l’on me poursuit, s’écria l’étrangère avec un indicible effroi.

– Alors, madame, réfléchissez à une chose, dit la princesse, c’est que cette maison est un couvent et non une forteresse; c’est que rien de ce qui agite les hommes n’y pénètre que pour s’éteindre; c’est que rien de ce qui peut les servir contre les autres hommes ne s’y trouve; ce n’est point ici la maison de la justice, de la force et de la répression, c’est tout simplement la maison de Dieu.

– Oh! voilà, voilà ce que je cherche justement, dit Lorenza. Oui, c’est la maison de Dieu, car dans la maison de Dieu seulement je puis vivre en repos.

– Mais Dieu n’admet pas les vengeances; comment voulez-vous que nous vous vengions de votre ennemi? Adressez-vous aux magistrats.

– Les magistrats ne peuvent rien, Madame, contre celui que je redoute.

– Qu’est-il donc? fit la supérieure avec un secret et involontaire effroi.

Lorenza se rapprocha de la princesse sous l’empire d’une mystérieuse exaltation.

– Ce qu’il est, Madame? dit-elle. C’est, j’en suis certaine, un de ces démons qui font la guerre aux hommes, et que Satan, leur prince, a doués d’une puissance surhumaine.

– Que me dites-vous là? fit la princesse en regardant cette femme pour bien s’assurer qu’elle n’était pas folle.

– Et moi, moi! oh! malheureuse que je suis! s’écria Lorenza en tordant ses beaux bras, qui semblaient moulés sur ceux d’une statue antique; moi, je me suis trouvée sur le chemin de cet homme! et moi, moi, je suis…

– Achevez.

Lorenza se rapprocha encore de la princesse; puis, tout bas, et comme épouvantée elle-même de ce qu’elle allait dire:

– Moi, je suis possédée! murmura-t-elle.

– Possédée! s’écria la princesse; voyons, madame, dites, êtes-vous dans votre bon sens, et ne seriez-vous point…?

– Folle, n’est-ce pas? c’est ce que vous voulez dire. Non, je ne suis pas folle, mais je pourrais bien le devenir si vous m’abandonnez.

– Possédée! répéta la princesse.

– Hélas! hélas!

– Mais, permettez-moi de vous le dire, je vous vois en toutes choses semblable aux autres créatures les plus favorisées de Dieu; vous paraissez riche, vous êtes belle, vous vous exprimez raisonnablement, votre visage ne porte aucune trace de cette terrible et mystérieuse maladie qu’on appelle la possession.

– Madame, c’est dans ma vie, c’est dans les aventures de cette vie que réside le secret sinistre que je voudrais me cacher à moi-même.

– Expliquez-vous, voyons. Suis-je donc la première à qui vous parlez de votre malheur? Vos parents, vos amis?

– Mes parents! s’écria la jeune femme en croisant les mains avec douleur; pauvres parents! les reverrai-je jamais? Des amis, ajouta-t-elle avec amertume, hélas! Madame, est-ce que j’ai des amis!

– Voyons, procédons par ordre, mon enfant, dit Madame Louise essayant de tracer un chemin aux paroles de l’étrangère. Quels sont vos parents, et comment les avez-vous quittés?

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