Читаем Le Collier de la Reine - Tome II полностью

Il trouva Marie-Antoinette toute pensive et toute radieuse à la fois, car elle supposait que le docteur allait lui rendre bon compte de son malade.

Mais elle fut bien surprise; dès sa première question, Louis répondit vertement que le malade était très malade.

– Comment! s’écria la reine, hier il allait fort bien.

– Non, madame, il allait fort mal.

– Cependant j’ai envoyé Misery, et vous avez répondu par un bon bulletin.

– Je me leurrais et voulais vous leurrer.

– Qu’est-ce à dire, répliqua la reine fort pâle, s’il est mal, pourquoi me le cacher? Qu’ai-je à craindre, docteur, sinon un malheur, trop commun, hélas!

– Madame…

– Et s’il va bien, pourquoi me donner une inquiétude toute naturelle quand il s’agit d’un bon serviteur du roi?… Ainsi donc, répondez franchement par oui ou par non. Quoi sur la maladie? Quoi sur le malade? Y a-t-il danger?

– Pour lui, moins encore que pour d’autres, madame.

– Voilà où commencent les énigmes, docteur, fit la reine impatientée. Expliquez-vous.

– C’est malaisé, madame, répondit le docteur. Qu’il vous suffise de savoir que le mal du comte de Charny est tout moral. La blessure n’est qu’un accessoire dans les souffrances, un prétexte pour le délire.

– Un mal moral! monsieur de Charny!

– Oui, madame; et j’appelle moral tout ce qui ne s’analyse point avec le scalpel. Épargnez-moi d’en dire plus long à Votre Majesté.

– Vous voulez dire que le comte… insista la reine.

– Vous le voulez? fit le docteur.

– Mais sans doute, je le veux.

– Eh bien! je veux dire que le comte est amoureux, voilà ce que je veux dire. Votre Majesté demande une explication, je m’explique.

La reine fit un mouvement d’épaules qui signifiait: la belle affaire!

– Et vous croyez qu’on guérit comme cela d’une blessure, madame? reprit le docteur; non, le mal empire, et du délire passager, monsieur de Charny tombera dans une monomanie mortelle. Alors…

– Alors, docteur?

– Vous aurez perdu ce jeune homme, madame.

– En vérité, docteur, vous êtes surprenant avec vos façons. J’aurai perdu ce jeune homme! Est-ce que je suis cause, moi, s’il est fou?

– Sans doute.

– Mais vous me révoltez, docteur.

– Si vous n’en êtes pas cause en ce moment, poursuivit l’inflexible docteur en haussant les épaules, vous le serez plus tard.

– Donnez des conseils alors, puisque c’est votre état, dit la reine un peu radoucie.

– C’est-à-dire que je fasse une ordonnance?

– Si vous voulez.

– La voici. Que le jeune homme soit guéri par le baume ou par le fer; que la femme dont il invoque le nom à chaque instant le tue ou le guérisse.

– Voilà bien de vos extrêmes, interrompit la reine reprenant son impatience. Tuer… guérir… grands mots! Est-ce qu’on tue un homme avec une dureté? Est-ce qu’on guérit un pauvre fou avec un sourire?

– Ah! si vous êtes incrédule, vous aussi, dit le docteur, je n’ai plus rien à faire qu’à présenter mes très humbles respects à Votre Majesté.

– Mais, voyons, s’agit-il de moi, d’abord?

– Je n’en sais rien, et n’en veux rien savoir; je vous répète seulement que monsieur de Charny est un fou raisonnable, que la raison peut à la fois rendre insensé et tuer, que la folie peut rendre raisonnable et guérir. Ainsi quand vous voudrez débarrasser ce palais de cris, de rêves et de scandale, vous prendrez un parti.

– Lequel?

– Ah! voilà, lequel? Moi, je ne fais que des ordonnances et je ne conseille pas. Suis-je bien sûr d’avoir entendu ce que j’ai entendu, d’avoir vu ce que mes yeux ont vu?

– Allons, supposez que je vous comprenne, qu’en résultera-t-il?

– Deux bonheurs: l’un, le meilleur pour vous comme pour nous tous, c’est que le malade, frappé au cœur par ce stylet infaillible qu’on nomme la raison, voie finir son agonie qui commence; l’autre… eh bien! l’autre… Ah! madame, excusez-moi, j’ai eu le tort de voir deux issues au labyrinthe. Il n’y en a qu’une pour Marie-Antoinette, pour la reine de France.

– Je vous comprends; vous avez parlé avec franchise, docteur. Il faut que la femme pour laquelle monsieur de Charny a perdu la raison lui rende cette raison de gré ou de force.

– Très bien! C’est cela.

– Il faut qu’elle ait le courage d’aller lui arracher ses rêves, c’est-à-dire le serpent rongeur qui vit replié au plus profond de son âme.

– Oui, Votre Majesté.

– Faites prévenir quelqu’un; mademoiselle de Taverney, par exemple.

– Mademoiselle de Taverney? dit le docteur.

– Oui, vous disposerez toutes choses pour que le blessé nous reçoive convenablement.

– C’est fait, madame.

– Sans ménagement aucun.

– Il le faut bien.

– Mais, murmura la reine, il est plus triste que vous ne croyez d’aller ainsi chercher la vie ou la mort d’un homme.

– C’est ce que je fais tous les jours quand j’aborde une maladie inconnue. L’attaquerai-je par le remède qui tue le mal ou par le remède qui tue le malade?

–Vous, vous êtes bien sûr de tuer le malade, n’est-ce pas? fit la reine en frissonnant.

– Eh! dit le docteur d’un air sombre, quand bien même il mourrait un homme pour l’honneur d’une reine, combien n’en meurt-il pas tous les jours pour le caprice d’un roi? Allons, madame, allons!

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