Читаем Le Collier de la Reine - Tome II полностью

Charny s’était levé tremblant, éperdu, puis aux derniers mots il s’était laissé glisser sur ses genoux, tellement écrasé par la douleur physique et la douleur morale, que, courbé ainsi en coupable, il ne voulait ni ne pouvait se relever.

– Est-il possible, continua la reine touchée de ce respect et de ce silence, est-il possible qu’un gentilhomme, renommé autrefois parmi les plus loyaux, s’attache comme un ennemi à la réputation d’une femme? Car notez ceci, monsieur de Charny, dès notre première entrevue, ce n’est pas la reine que vous avez vue et que je vous ai montrée, c’était une femme, et vous n’eussiez jamais dû oublier.

Charny, entraîné par ces paroles sorties du cœur, voulut essayer d’articuler un mot pour sa défense: Marie-Antoinette ne lui en laissa pas le temps.

– Que feront mes ennemis, dit-elle, si vous donnez l’exemple de la trahison?

– La trahison… balbutia Charny.

– Monsieur, voulez-vous choisir? Ou vous êtes un insensé, et je vais vous ôter le moyen de faire le mal; ou vous êtes un traître, et je vais vous punir.

– Madame, ne dites pas que je suis un traître. Dans la bouche des rois cette accusation précède l’arrêt de mort, dans la bouche d’une femme elle déshonore. Reine, tuez-moi; femme, épargnez-moi.

– Êtes-vous dans votre bon sens, monsieur de Charny? dit la reine d’une voix altérée.

– Oui, madame.

– Avez-vous conscience de vos torts envers moi, de votre crime envers… le roi?

– Mon Dieu! murmura l’infortuné.

– Car, vous l’oubliez trop facilement, messieurs les gentilshommes, le roi est l’époux de cette femme que vous insultez tous en levant les yeux sur elle; le roi est le père de votre maître futur, mon dauphin. Le roi, c’est un homme plus grand et meilleur que vous tous, un homme que je vénère et que j’aime.

– Oh! murmura Charny en poussant un sourd gémissement, et pour se soutenir, il fut obligé d’appuyer une de ses mains sur le parquet.

Son cri traversa le cœur de la reine. Elle lut dans le regard éteint du jeune homme qu’il venait d’être frappé à mort, si elle ne tirait promptement de la blessure le trait qu’elle y avait enfoncé.

C’est pourquoi, miséricordieuse et douce, elle s’effraya de la pâleur et de la faiblesse du coupable, et fut près un moment d’appeler au secours.

Mais elle réfléchit que le docteur, qu’Andrée, interpréteraient mal cette pamoison du malade. Elle le releva de ses mains.

– Parlons, dit-elle, moi en reine, vous en homme. Le docteur Louis a essayé de vous guérir; cette blessure, qui n’était rien, empire par les extravagances de votre cerveau. Quand sera-t–elle guérie, cette blessure? Quand cesserez-vous de donner au bon docteur le spectacle scandaleux d’une folie qui l’inquiète? Quand partirez-vous du château?

– Madame, balbutia Charny, Votre Majesté me chasse… Je pars, je pars.

Et il fit un mouvement si violent pour partir, que, lancé hors de son équilibre, il vint tomber en chancelant dans les bras de la reine qui lui barrait le passage.

À peine eut-il senti le contact de cette poitrine brûlante qui le retenait, à peine eut-il plié sous l’étreinte involontaire du bras qui le portait, que sa raison l’abandonna entièrement, sa bouche s’ouvrit pour laisser passer un souffle dévorant qui n’était point une parole et n’osait être un baiser.

La reine elle-même, brûlée par ce contact, fléchie par cette faiblesse, n’eut pas le temps de pousser le corps inanimé sur son fauteuil, et elle voulut s’enfuir; mais la tête de Charny était retombée en arrière. Elle battait le bois du fauteuil, une légère nuance rosée colorait l’écume de ses lèvres, une goutte rose et tiède était tombée de son front sur la main de Marie-Antoinette.

– Oh! tant mieux, murmura-t-il, tant mieux! je meurs tué par vous.

La reine oublia tout. Elle revint, saisit Charny dans ses bras, le releva, pressa sa tête morte sur son sein, appuya une main glacée sur le cœur du jeune homme.

L’amour fit un miracle, Charny ressuscita. Il ouvrit les yeux, la vision disparut. La femme s’épouvantait d’avoir laissé un souvenir là où elle ne croyait donner qu’un dernier adieu.

Elle fit trois pas vers la porte avec une telle précipitation, que Charny eut à peine le temps de saisir le bas de sa robe en s’écriant:

– Madame, au nom de tout le respect que j’ai pour Dieu, moins grand que le respect que j’ai pour vous…

–Adieu! adieu! dit la reine.

– Madame! oh! pardonnez-moi!

– Je vous pardonne, monsieur de Charny.

– Madame, un dernier regard!

– Monsieur de Charny, fit la reine en tremblant d’émotion et de colère, si vous n’êtes pas le dernier des hommes, ce soir, demain vous serez mort ou parti du château.

Une reine prie quand elle commande en ces termes. Charny, joignant les mains avec ivresse, se traîna agenouillé jusqu’aux pieds de Marie-Antoinette.

Celle-ci avait déjà ouvert la porte pour fuir plus vite le danger.

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