Читаем Le Grec полностью

A un moment, le chemin suivait la déclivité d'un vallon et Lena dut descendre, ce qui lui cacha pendant quelques minutes les maisons qu'elle apercevait sur la hauteur. Ce qui la frappait surtout, c'était la qualité du silence et l'odeur parfumée de l'air. Parfois, le bruit de ses pas provoquait un glissement bref et furtif dans les herbes, fuite d'un lézard peut-être, ou d'un lapin. Malgré ce qu'elle avait à faire, elle se sentait étrangement libre, et jeune, n'arrivant pas à croire que quoi que ce soit puisse avoir l'air plus vrai que ce paysage. Quelque chose de solide, de dru et de pur à la fois, ni trafiqué ni faisandé. Sans savoir pourquoi, elle se mit à courir, heureuse de sentir ses jambes souples et le jeu délié de ses muscles. En dehors de l'asphalte stupide des courts de tennis, depuis combien de temps n'avait-elle pas couru, couru pour le plaisir, sans autre but que l'excitation de la course? Elle arriva en haut de la pente, et, progressivement, vit à nouveau les trois ou quatre grosses fermes, le toit d'abord, auquel des tuiles manquaient, puis les murs épais percés de petites ouvertures circulaires, juste sous la charpente, et, plus bas, des fenêtres aux volets gris et tavelés de vieillesse. L'air portait extraordinairement les sons. Lui parvinrent aux oreilles le gloussement d'une poule et les accords métalliques d'une guitare. Sur la gauche des maisons, elle vit, légèrement détachée, une espèce de grange flanquée d'une meule de paille, et un puits, non loin d'un olivier. Devant le puits, une silhouette d'homme qui tirait de l'eau dans un seau. L'homme était nu jusqu'à la ceinture et se mit à vocaliser en suivant les notes de la guitare. Lena s'arrêta un instant, invisible encore pour l'homme. Elle posa son sac à ses pieds et regarda, s'imprégnant de la lumière, de la mélodie, du parfum de l'atmosphère, contemplant le dos musclé et bronzé de cet homme qui, elle le voyait maintenant, avait les cheveux très longs, attachés derrière le cou en une espèce de natte. Elle pensa qu'elle vivait un instant rare, bien qu'elle s'en défendît, car il n'y avait aucune raison qu'il le fût. Pourtant, cela lui rappelait une autre seconde de grâce dont elle avait joui des années plus tôt, en Grèce, au cours d'une croisière sur le yacht de son mari, alors qu'elle nageait du fond de la mer vers la surface où elle apercevait, presque translucide à force d'être orange, le corps de son amant. Elle prit une brève inspiration, remit son sac à l'épaule et se dirigea d'un, pas décidé vers les fermes. Sur le sol, ses espadrilles ne faisaient aucun bruit. Elle n'était plus qu'à dix mètres de l'homme quand, d'instinct, il se retourna, le seau plein d'eau à bout de bras :

« Hello!… »

Elle eut un sourire gauche et répliqua :

« Hello!… »

Aucun des deux ne bougea plus. Lui, avec son seau, elle, avec son sac. Simplement, ils se regardaient, sans mot dire. Il devait avoir vingt, vingt-cinq ans, était immense, presque maigre, barbu, noir de cheveux, noir partout de soleil, sauf les dents qui fendaient son visage comme une ligne de lumière, et les yeux, très clairs, qui le trouaient comme les ouvertures d'un masque. Lena pensa que, en dehors de Marc, elle n'avait jamais vu un homme aussi beau : qu'est-ce qu'ils foutaient, les producteurs, à Hollywood, au lieu de venir chercher ce dieu dans ses labours? Elle fit un effort énorme pour revenir à la réalité. Elle se composa un masque lointain, qu'elle voulait autoritaire. Dans la maison, la guitare s'était arrêtée de scander la scène, et le silence n'en devint que plus énorme. Il la regardait toujours, amical, bienveillant, rigolard, sûr de lui. Lena jeta d'une voix brève en anglais :

« Je viens chercher ma sœur. »

Le sourcil droit du garçon se déplaça vers le haut d'un millimètre. Il posa son seau :

« Qui c'est, ta sœur? »

Lena fut stupéfaite qu'on pût la tutoyer. Elle avala sa salive :

« Melina. Melina Mikolofides. »

L'autre eut un grand sourire :

« Ça alors! Tu es la sœur de Melina? Elle est allée chercher du bois… Tu veux boire? »

Lena prit conscience qu'elle mourait de soif :

« Non, merci.

— Vas-y! Elle est fraîche!

— Merci, non.

— Goûte-là! Tiens, viens, regarde… »

Il posa le seau sur la margelle du puits, s'approcha d'elle, la prit par la main et la tira vers le puits sans qu'elle ose protester.

« Vas-y… Bois… »

Ne résistant plus, elle se pencha au-dessus du seau plein d'ombre bleue et y trempa les lèvres. L'eau était si glaciale qu'elle lui brûla la bouche. Elle but longuement, à grands traits avides.

« Alors, c'est toi, la femme de Satrapoulos, le type du pétrole? »

Et il éclata de rire. Apparemment, il n'était pas impressionné. Bien qu'il ait prononcé sa phrase sans agressivité, Lena rétorqua sèchement :

« Vous retardez de cinq ans. Je suis la duchesse de Sunderland. »

Avec un air qui lui donna envie de le tuer, il s'inclina en une vaste révérence :

« Pardonnez-moi, Your Grace, je ne savais pas. »

Et il ajouta :

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