Читаем Le Lis et le Lion полностью

Alors, dans l’espérance d’amadouer le Ciel et de négocier quelque survie, il fit ajouter à son testament ses volontés concernant la Terre sainte… « Car mon intention est d’y aller de mon vivant, dicta-t-il, et, si de mon vivant ne se peut, que cinquante mille livres soient données au premier passage général qui se fera. »

On ne lui en demandait pas tant, ni de grever d’une semblable hypothèque la fortune royale dont on avait besoin pour de plus pressants usages. Robert enrageait. Ce niais de Charles, jusqu’au bout, aurait de ces sots entêtements !

On lui demandait simplement de léguer trois mille livres au chancelier Jean de Cherchemont, autant au maréchal de Trye et à messire Miles de Noyers, président de la Chambre aux Comptes, pour leurs loyaux services rendus à la couronne… et parce que leurs fonctions les faisaient siéger de droit au Conseil des pairs.

— Et le connétable ? murmura le roi agonisant.

Robert haussa les épaules. Le connétable Gaucher de Châtillon avait soixante-dix-huit ans, il était sourd comme une marmite, et possédait des biens à ne savoir qu’en faire. Ce n’était pas à son âge que se développait l’appétit de l’or ! On raya le connétable.

En revanche, Robert, avec beaucoup d’attention, aida Charles IV à composer la liste des exécuteurs testamentaires, car cette liste constituait comme un ordre de préséance parmi les grands du royaume : le comte Philippe de Valois en tête, le comte Philippe d’Évreux, et puis lui-même, Robert d’Artois, comte de Beaumont-le-Roger.

Cela fait, on s’occupa de rallier les pairs ecclésiastiques.

Guillaume de Trye, duc-archevêque de Reims, avait été précepteur de Philippe de Valois ; et puis Robert venait de faire coucher son frère, le maréchal, sur le testament royal, pour trois mille livres qu’on sut rendre tintantes. On n’aurait pas de mécomptes de ce côté-là.

Le duc-archevêque de Langres était acquis de longue date aux Valois ; et tout également leur était dévoué le comte-évêque de Beauvais, Jean de Marigny, dernier frère survivant du grand Enguerrand. Vieilles trahisons, vieux remords, services mutuels avaient tissé de solides liens.

Restaient les évêques de Châlons, de Laon et de Noyon ; ces derniers, on le savait, feraient corps avec le duc Eudes de Bourgogne.

— Ah ! pour le Bourguignon, s’écria Robert d’Artois en écartant les bras, cela, Philippe, c’est ton affaire. Je ne peux rien auprès de lui, nous sommes lance à lance. Mais tu as épousé sa sœur ; tu dois bien avoir quelque action sur lui.

Eudes IV n’était pas un aigle de gouvernement. Toutefois il se rappelait les leçons de sa défunte mère, la duchesse Agnès, la dernière fille de Saint Louis, et comment lui-même, pour reconnaître la régence de Philippe le Long, avait gagné le rattachement de la Bourgogne-comté à la Bourgogne-duché. Eudes en cette occasion avait épousé la petite-fille de Mahaut d’Artois, de quatorze ans plus jeune que lui, ce dont il ne se plaignait pas maintenant qu’elle était nubile.

La question de l’héritage d’Artois fut la première qu’il posa lorsque, arrivant de Dijon, il s’enferma avec Philippe de Valois.

— Il est bien entendu qu’au jour du trépas de Mahaut, le comté d’Artois ira à sa fille, la reine Jeanne la Veuve, pour ensuite revenir à la duchesse mon épouse ? J’insiste fort sur ce point, mon cousin, car je connais les prétentions de Robert sur l’Artois ; il les a assez clamées !

Ces grands princes ne mettaient pas moins de défiante âpreté à défendre leurs droits d’héritage sur les quartiers du royaume que des brus à se disputer les gobelets et les draps dans une succession de pauvres.

— Jugements par deux fois ont été rendus qui ont attribué l’Artois à la comtesse Mahaut, répondit Philippe de Valois. Si aucun fait nouveau ne vient étayer les requêtes de Robert, l’Artois passera à votre épouse, mon frère.

— Vous n’y voyez point d’empêchement ?

— Je n’en vois mie.

Ainsi le loyal Valois, le preux chevalier, le héros de tournoi, avait donné à ses deux cousins, à ses deux beaux-frères, deux promesses contradictoires.

Honnête toutefois dans sa duplicité, il rapporta à Robert d’Artois son entretien avec Eudes, et Robert l’approuva pleinement.

— L’important, dit ce dernier, est d’obtenir la voix du Bourguignon, et peu importe qu’il s’ancre dans la tête un droit qu’il n’a pas. Des faits nouveaux, lui as-tu dit ? Eh bien, nous en produirons, mon frère, et je ne te ferai pas manquer à ta parole. Allons, tout est au mieux.

Il ne restait plus qu’à attendre, ultime formalité, le décès du roi, en souhaitant qu’il se produisît assez vite, pendant que cette belle conjonction de princes était réunie autour de Philippe de Valois.

Le dernier fils du Roi de fer rendit l’âme la veille de la Chandeleur, et la nouvelle du deuil royal se répandit dans Paris, le lendemain matin, en même temps que l’odeur des crêpes chaudes.

Перейти на страницу:

Похожие книги

О, юность моя!
О, юность моя!

Поэт Илья Сельвинский впервые выступает с крупным автобиографическим произведением. «О, юность моя!» — роман во многом автобиографический, речь в нем идет о событиях, относящихся к первым годам советской власти на юге России.Центральный герой романа — человек со сложным душевным миром, еще не вполне четко представляющий себе свое будущее и будущее своей страны. Его характер только еще складывается, формируется, причем в обстановке далеко не легкой и не простой. Но он — не один. Его окружает молодежь тех лет — молодежь маленького южного городка, бурлящего противоречиями, характерными для тех исторически сложных дней.Роман И. Сельвинского эмоционален, написан рукой настоящего художника, язык его поэтичен и ярок.

Илья Львович Сельвинский

Проза / Историческая проза / Советская классическая проза