Читаем Le passager полностью

Il se répétait les révélations du soir. Des femmes disparues chez Sasha. Nono comme suspect potentiel. Nono posant des questions et cherchant quelque chose auprès des postulantes du club — quoi ? Il ressassait aussi les nouvelles énigmes. S’il n’était pas le tueur de clochards, était-il un meurtrier de femmes célibataires ? Ou bien s’agissait-il du même assassin, lui ? Invariablement, il balayait toutes ces pistes d’un mouvement de tête rageur. Il avait décidé de retrouver une stricte neutralité d’enquêteur et de s’accorder à lui-même ce qu’on accordait à tous les malfrats : la présomption d’innocence.

Rue de la Roquette. Le village de lofts dormait. Le contact des pavés sous ses semelles le rassura. Il avait définitivement adopté cet atelier. Il glissa sa main parmi les bambous puis à travers la vitre brisée — il n’avait pas trouvé de clés dans son repaire. Il tourna le verrou de l’intérieur et ouvrit la porte. Il cherchait le commutateur quand il reçut un violent coup sur le crâne. Il s’écrasa sur le béton peint mais comprit tout de suite, dans un tourbillon de douleur et d’étincelles, qu’il était toujours conscient. La tentative pour l’assommer avait échoué.

Profitant de ce faible avantage, il se releva et s’élança vers l’escalier. Ses jambes se dérobèrent. Sa vision s’assombrit. Il eut l’impression qu’on lui secouait le sang à l’intérieur du crâne. À plat ventre, il se retourna et aperçut confusément son ennemi — un homme dans le prolongement de son corps, serrant ses jambes à la manière d’un rugbyman. Il libéra un pied et lui balança un coup de talon dans le visage. Le choc parut galvaniser l’adversaire. D’un seul mouvement, il se releva et bondit sur Chaplain. Un éclair traversa la verrière. Il tenait un couteau. Arnaud se jeta dans l’escalier, rata une marche, se redressa, montant les suivantes à quatre pattes.

L’homme était sur lui. Chaplain balança son coude vers l’arrière et repoussa l’agresseur qui rebondit contre les câbles d’acier de la rampe. Il n’en espérait pas tant. Les filières de voilier vibrèrent comme les cordes d’une harpe. Le bruit lui donna une idée. Il revint sur ses pas et attrapa le salopard étourdi par le col. Il lui enfonça la tête entre les filins et resserra deux câbles sur sa gorge, comme font les catcheurs à la télévision avec les cordes du ring. L’homme émit un râle déchirant. Chaplain ne lâcha pas prise. Une conviction battait les vaisseaux de son crâne : tuer ou être tué.

Il appuya encore puis lâcha tout.

L’adversaire venait de lui envoyer un coup de genou dans le bas-ventre. Ce n’était pas une sensation de souffrance. Pas seulement. Un trou noir au plus profond de son être. Plus de souffle. Plus de battements cardiaques. Plus de vision. Il serra les mains sur ses organes génitaux comme s’il pouvait en arracher la douleur et tomba à la renverse dans l’escalier.

Il se cogna la tête quelque part. Roula sur le sol. Des tubes et des pinceaux lui tombèrent sur la nuque. Le comptoir. Tendant un bras, il parvint à se relever, faisant trembler objets et produits. Il se retourna. L’ennemi chargeait déjà. Il encaissa le choc par le flanc droit sans tomber. Ils se fracassèrent tous les deux contre le bloc de briques. Les bidons, les flacons, les bouteilles se renversèrent, éclatèrent, d’autres roulèrent dans l’obscurité.

Chaplain parvint à repousser son agresseur. Dans le mouvement, il glissa sur une flaque. Il reconnut l’odeur. De l’huile de lin. Souvenir subliminal. Ce produit polymérise au contact de l’air. Assis par terre, il attrapa la bouteille qui s’était ouverte. Trouva un chiffon, l’imbiba, en frotta deux parties avec l’énergie du désespoir.

L’ombre revenait à la charge.

Chaplain ne cessait de frotter les fragments de tissu, sentant la chaleur monter entre ses doigts.

À l’instant où l’homme l’empoignait, le tissu s’embrasa, provoquant une lumière blanche assez brillante pour éclairer tout l’espace. Chaplain lui écrasa le chiffon sur le visage ou la gorge — ébloui, il ne voyait rien. La veste du gars prit feu. Il recula, chuta dans une flaque qui s’embrasa aussitôt. Il battait furieusement des membres. Une araignée ruisselante de flammes.

Chaplain se releva et attrapa un long pinceau pour lui crever les yeux ou les tempes. Il se ruait sur l’ennemi quand une main le saisit par les cheveux.

La sensation suivante fut le contact glacé d’un canon sur sa nuque.

Un peu de fraîcheur, ça ne faisait pas de mal.

— La fête est finie, Nono.

La lumière électrique éclaboussa l’atelier dévasté. Les traces de la bagarre, mais aussi d’une fouille sauvage. On avait retourné le moindre espace du loft. Chaplain s’immobilisa et vit son premier agresseur à terre. Il ne brûlait plus mais dégageait une fumée noire qui montait jusqu’aux structures du plafond. L’atmosphère était suffocante.

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