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A la caisse, la jeune personne rédige un certificat de mariage en bonne et due forme, valable dans tous les Etats, et plus si validation effective. Puis calcule le solde de la note et, enfin, clôt la boutique après qu'ils l'ont quittée.


Ils marchent bras dessus bras dessous, désormais unis pour le meilleur et le pire dans le meilleur des pires Las Vegas possibles. Ils entrent dans un casino où dégringolent les pièces, le stuc, le faux. Ils regardent. Ils ne jouent pas. Les lumières éblouissent les vitres, les glaces, la monnaie. Les hôtels débouchent directement sur les salles de jeu. Les belles de nuit recueillent les cow-boys pour les plumer de leurs derniers cents. La cliéntèle est affairée. Elle perd sans gémir. Elle gagne dans des hurlements de joie. Elle ne cesse de compter. Disneyland pour grands.

«On se barre», dit-il.

Ils cherchent une chambre. On leur propose des baldaquins nuptiaux (mille dollars), des matelas mouvants comme le Pacifique (huit cents dollars)… Ils quittent la ville et s'arrêtent dans un motel à la périphérie (dix dollars). Des araignées dorment au plafond. Jeanne refuse de marcher pieds nus sur un sol à mouches. A trois heures du matin, blottis dans les bras l'un de l'autre, ils s'endorment enfin.

Just married.


Ils traversent la vallée de la Mort, surchauffée. Au loin, brillent des cristaux de sel. Ils sont ensemble, en vacances, pour la première fois sans enfants. Libres et amoureux.

Ils filent vers le petit théâtre d'Amargosa, que Jeanne veut lui montrer. La porte est fermée. Par les fenêtres, ils aperçoivent les grands d'Espagne peints sur les murs et les plafonds. Ils y restent dix minutes. Leur temps est compté.

Ils roulent jusqu'à Los Angeles où ils changent leur conduite intérieure climatisée contre une Chevrolet décapotable.

Après un petit tour à Malibu, à Venice et à Hollywood, ils foncent sur la 101, sans souci des limitations de vitesse. Ils s'arrêtent brièvement à Big Sur puis à Carmel.

Le deuxième soir, après avoir roulé à un train d'enfer, ils arrivent à San Francisco. Ils ont tout juste le temps de découvrir les rues-toboggans de la ville, d'acheter des jouets pour les enfants, il leur faut déjà repartir.

Dans l'avion, ils se laissent tomber sur leurs sièges, épuisés. Jeanne s'endort aussitôt. Lorsqu'elle s'éveille, quelques heures plus tard, l'appareil vole au-dessus de l'Atlantique. C'est un nouveau jour.

Il appelle l'hôtesse et commande une coupe de champagne et un verre de bordeaux.

Il se penche vers Jeanne et lui prend la main. Elle incline le visage sur son cou. Il effleure la veinule de la vie et murmure:

«Bon anniversaire, mon amour.»

Elle a trente ans aujourd'hui.

II.

Jeanne déménage. Elle quitte le XIIe arrondissement pour se rapprocher de chez lui.

Ils ont longtemps cherché avant de découvrir un petit appartement de trois pièces distant d'une rue et demie de sa propre maison. Cette proximité constitue la cote la mieux taillée possible pour la satisfaction de tous, surtout celle des enfants. Non pas Tom et Victor, qui, n'habitant pas chez leur père, se soucient assez peu de ses organisations. Mais pour Héloïse et surtout Paul, qui suivent d'un œil suspicieux l'évolution générale de la situation.

Jusqu'alors, ils l'aimaient bien. Ni trop ni pas assez. Troisième au hit-parade. Ils le jugeaient sympa. C'était le copain de leur mère. De lui, rien ne les étonnait. Sauf, peut-être, qu'il ne les accompagne jamais à l'école. Mais ce n'est pas grave. Ça viendra sans doute. Il nous achète des livres, c'est déjà pas mal.

Les choses ont imperceptiblement changé lorsqu'ils ont appris la nouvelle. C'était un dimanche, dans le bois de Vincennes. La bande des Quatre regardait des joueurs de boules. Les parents s'étaient éloignés. Ils s'embrassaient sous les arbres lorsqu'un concert d'applaudissements les a séparés. Tom, Héloïse, Paul et Victor. Trois sourires édentés qui les ont cueillis à froid, ponctués par le commentaire admiratif de Victor, adressé à son pere:

«T'embrasses longtemps!»

Les garçons se sont esclaffés. Jeanne a dit, presque à brûle-pourpoint:

«Les enfants, nous allons déménager.

– Ils se la pètent! a fait Victor.

– Où?» a demandé Héloïse.

Elle leur a dit.

«Quand?»

Elle leur a dit.

Paul ne mouftait pas. Sa mère lui a pris la main et a ajouté:

«Tu auras ta chambre. Et ta sœur, aussi. Chacun la vôtre.»

C'était un avantage qui avait guidé leurs recherches. Un argument à faire valoir.

«Papa est au courant?

– Pas encore.

– Il ne sera pas content.»

Ils marchaient à la lisière. Ce n'était pas comme l'instant précédent, quand les enfants couraient devant, les parents suivant. Ils avançaient désormais de front. Tom avait pris la main de son père; Victor allait à son côté. Héloïse et Paul encadraient leur mère. Ensemble, mais chacun chez soi.

«Pourquoi ils déménagent? a questionné Tom. Ce n'était pas bien avant?

– Très compliqué», a-t-il répondu.

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