Читаем Roses à crédit (Lecture à domicile) полностью

— Tu n’es pas fatiguée, ma chérie ? Si ? On fait la sieste ?… La sieste se prolongea. Ils passèrent le reste de la journée dans leur chambre. Personne ne vint les déranger. Le soir ils traversèrent l’étage désert pour descendre l’escalier de pierre dans le vestibule et sortir sur la route goudronnée. La nuit embaumait, il faisait beau. Lorsqu’ils revinrent sur leurs pas, la ferme, de loin, parut à Martine très grande, un château fort[122] du moyen âge.

— On dirait un château inhabité, murmura-t-elle, pas de lumière…

— Tout le monde dort… On se lève avec le soleil…

<p>XIII. SOUS LES PAS DU GARDIEN DES ROSES</p>

Les rangées parallèles de rosiers s’en allaient devant eux, très loin, ils étaient en pleine floraison. Il y en avait de déjà fanées, les bords des pétales desséchés… Martine se dit qu’une roseraie, ce n’est jamais impeccable.

— C’est ici, dit M. Donelle, que grand-père a planté ses premiers rosiers, c’est là que tout a commencé… Depuis la Rose des Mages[123] nous nous sommes compliqués…

— Père, il fait chaud, dit Daniel, qui avait l’impression que Martine s’ennuyait.

— Bon, bon… Je disais que grand-père avait planté ici même les premiers rosiers. On n’a qu’à rentrer si vous trouvez qu’il fait trop chaud. J’essaie de t’intéresser à la question, Martine… Il faut bien, puisque d’une façon ou d’une autre Daniel s’occupera des roses… Un membre de la famille Donelle qui ne s’intéressait pas à la culture des roses, cela ne s’est encore jamais vu !.. Tu iras voir tout de même comment les hommes là-bas greffent ces quelques milliers de petits églantiers ? Et ton mari qui est une tête brûlée[124], au lieu de se contenter du pain quotidien que lui donnent ces rosiers, s’est fait chercheur d’or… Créer les roses nouvelles revient aussi cher qu’une écurie de courses !

— Tu dois ton commerce à grand-père. — Daniel avait une voix blanche[125]. — Tu n’aurais pas ton pain quotidien, s’il n’y avait eu d’abord un chercheur d’or : grand-père…

Martine, saisie, regardait Daniel. Elle savait que cette question de la création de roses nouvelles était une question malade entre eux, mais elle ne savait pas que c’était aussi grave.

— Grand-père s’amusait sur des rosiers qui ne lui coûtaient pas cher… Tes hybrides, à toi, c’est une distraction pour les rois, mon fils ! Si tu as de l’influence sur lui, Martine, tu lui feras peut-être passer son goût de la génétique… Il m’abîme très scientifiquement mes meilleurs rosiers, il en fait des sujets d’expérience… Ah, je t’assure que j’aurais préféré qu’il joue aux cartes, à la roulette ! Au moins il n’abîmerait pas la marchandise !

— Père… Daniel était rouge foncé — père, je ne sais pas ce qui te prend… Qu’est-ce qu’il t’a raconté hier soir, Bernard ? Qu’est-ce qu’il a fait ?… Viens, Martine, tu vas attraper mal…

Daniel mit sa main sur le bras de Martine.

— On se verra au déjeuner ! leur cria M. Donelle.

Martine suivit Daniel dans le sentier, parmi les herbes folles[126]. Le dos athlétique de Daniel, sa nuque hâlée, la tête ronde aux cheveux coupés ras… quelle tendresse elle avait pour cette tête ronde…

Les chiens les reçurent par un ensemble d’aboiements mal orchestrés : ils ne connaissaient pas encore Martine, bien sûr, depuis la veille qu’elle était là… A la porte de la cuisine Daniel dit : « Je vais faire un tour[127]… », et elle n’insista pas.

Martine monta dans sa chambre, celle de Daniel… Ici il faisait frais, le store était baissé, le dessus de lit net et bien tiré. Martine changea de souliers, se refit une beauté[128]. Des voix en bas… Martine jeta encore un coup d’œil dans la petite glace au mur : il faudrait changer de rouge à lèvres, celui-ci commençait à paraître trop pâle pour sa peau brûlée[129].

Martine descendit l’escalier et s’arrêta à la dernière marche curieuse et gênée : il y avait une dizaine d’hommes, en pantalon bleu plein de terre. Ceux qui étaient déjà assis autour de la table se levèrent à son apparition…

— Je ne te présente personne, — dit M. Donelle, le seul en pantalon kaki, en bras de chemise[130]. — C’est la jeune mariée, les gars, Mme Donelle… Elle est belle, hein ?

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Юрий Петрович Щекочихин

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