Читаем Saga полностью

Fred: Mais je les ai déjà toutes faites, et les plus inimaginables… Tu dois être épuisée.

evelyne : Je suis fière…

le délégué (discret, à Fred): Dites, professeur… J'ai une petite faveur à vous demander… C'est ma femme… elle me fait une vie tous les soirs… elle veut être prioritaire… elle a cinq kilos à perdre.

Fred, atterré, lève les yeux au ciel.


*


J'ai enfin compris ce que cache le départ de Charlotte: elle m'a simplement mis au défi de comprendre pourquoi elle est partie. Elle m'a mis au défi de vivre sans elle. Elle m'a mis au défi de la retrouver. Je vais tous les relever un par un dès la fin de Saga. D'ici quelques semaines, je vais pouvoir crier haut et fort que j'ai un métier. Je suis trop près du but pour tout lâcher maintenant.


*


Au bureau, tout le monde est un peu sur les nerfs en attendant le Vieux qui avait rendez-vous avec Séguret pour relire nos cinq derniers épisodes. Depuis qu'il s'est mis en tête de maîtriser les événements, notre cher producteur se sent une vocation de scénariste. Il est 21 heures passées et le Vieux n'est toujours pas là. Tristan non plus, il est devenu très copain avec William, le monteur.

– Le plus dur, c'est de voir le frangin grimper les escaliers, dit Jérôme. Il me fait penser à une poupée à trois sous qui va se déboîter les chevilles.

– Qu'est-ce qu'il peut bien faire devant une table de montage?

– C'est un matériel ultrasophistiqué qui vient des États-Unis. Une grosse bécane qui fait des bricolages virtuels et des images de synthèse. Je ne comprends pas grand-chose mais Tristan trouve ça magique. Il a le sentiment d'assister à la fabrication d'images au lieu de les engouffrer telles quelles.

On entend au loin le pas rapide du Vieux dans l'immeuble désert. II déboule, s'assoit dans un canapé en poussant un soupir. Je me précipite sur son paquet de gauloises pour lui en allumer une. Jérôme lui tend une bière.

– Mes enfants, remerciez-moi, la partie a été rude. J'ai l'impression d'avoir joué aux échecs contre une armada de petits êtres malveillants qui déplacent les pièces en douce. Même mes séances de boulot avec le Maestro n'ont jamais été si dures. Séguret n'aime pas du tout l'histoire de Camille et du terroriste, il veut qu'on change la fin. Il aimerait aussi qu'on clarifie toute la séquence où Jonas est dévoré d'angoisse le jour de ses 33 ans, il trouve ça «sibyllin et un peu trop métaphorique pour les spectateurs du matin». Il pense que la lipose est «un concept extravagant dont il vaut mieux ne pas imaginer les répercussions pratiques». Il ne comprend pas davantage où s'embarque Mildred avec celui qu'il appelle «le sauvage». Il m'a fait quelques suggestions aussi absurdes les unes que les autres; la Créature apprend à parler et à porter des vêtements, il découvre qu'il est le fils caché de je ne sais trop quel prince en exil.

– Il a parlé de son numéro de sécu et de sa carte d'électeur, ricane Jérôme.

Mathilde a du mal à contenir sa colère quand on s'avise de toucher à ces deux personnages-là. C'est tout juste si elle admet une petite critique venant de nous.

– Qu'avez-vous répondu à tout ce chapelet d'idioties, Louis?

– Qu'il n'était pas question de changer quoi que ce soit. Il m'aurait volontiers fracassé le crâne avec une hache. J'ai lu dans ses yeux ce qu'il avait sur le cœur: «Vous voulez jouer aux apprentis sorciers mais je ne vous laisserai pas faire.»

Les parties de bras de fer avec Séguret sont de plus en plus fréquentes. Nous devons passer chacune de ses phrases au scanner pour découvrir ce qu'elles cachent. Il est pénible d'avoir à décoder les arguments du seul type censé nous appuyer.

– J'en ai marre de me demander à longueur de journée d'où parlent les gens et ce qu'ils ont derrière la tête, dit Jérôme.

– On ne peut pas lutter contre l'hypocrisie ordinaire du langage, fait Mathilde, nous mentons tous sans même le vouloir.

– Le plus triste c'est cette débauche de mots inutiles, dit le Vieux. Ça les affadit. Ça les dénature.

Circonvolutions, ronds de jambe, périphrases, métaphores protocolaires, et au bout de tout ça, on n'est même pas sûr d'avoir fait passer son message. Pendant quelques instants, je me mets à rêver d'une langue sans voiles et sans fard. Une langue interdite aux courtisans et aux patelins.

– Au lieu de noyer le poisson dans un flot de palabres, dis-je, il suffirait de quatre phrases très précises et très sincères pour dire exactement ce qu'on pense.

– Ce serait la fin du monde.

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