Читаем Sans famille полностью

Je me précipitai sur la boule ; elle était en papier fin roulé et entassé autour d’un gros grain de plomb : il me sembla que des caractères étaient tracés sur ce papier, mais il ne faisait pas encore assez clair pour que je pusse les lire ; je devais donc attendre le jour.

Je refermai ma fenêtre avec précaution et vivement je me couchai dans mon hamac, tenant la boule de papier dans ma main.

Lentement, bien lentement pour mon impatience, l’aube jaunit, et à la fin une lueur rose glissa sur mes murailles ; je déroulai mon papier et je lus :

« Tu seras transféré demain soir dans la prison du comté : tu voyageras en chemin de fer dans un compartiment de seconde classe avec un policeman ; place-toi auprès de la portière par laquelle tu monteras ; quand vous aurez roulé pendant quarante-cinq minutes (compte-les bien) votre train ralentira sa marche pour une jonction ; ouvre alors ta portière et jette-toi à bas bravement : élance-toi, étends tes mains en avant et arrange-toi pour tomber sur les pieds ; aussitôt à terre, monte le talus de gauche, nous serons là avec une voiture et un bon cheval pour t’emmener ; ne crains rien ; deux jours après nous serons en France ; bon courage et bon espoir ; surtout élance-toi au loin en sautant et tombe sur tes pieds. »

Sauvé ! Je ne comparaîtrais pas aux assises ; je ne verrais pas ce qui s’y passerait !

Ah ! le brave Mattia, le bon Bob ! car c’était lui, j’en étais certain, qui aidait généreusement Mattia : « Nous serons là avec un bon cheval ; » ce n’était pas Mattia qui tout seul avait pu combiner cet arrangement.

Et je relus le billet : « Quarante-cinq minutes après départ ; le talus de gauche ; tomber sur les pieds. »

Certes oui, je m’élancerais bravement, dussé-je me tuer. Mieux valait mourir que de se faire condamner comme voleur.

Ah ! comme tout cela était bien inventé :

« Deux jours après nous serons en France. »

Cependant, dans mon transport de joie, j’eus une pensée de tristesse : et Capi ? Mais bien vite j’écartai cette idée. Il n’était pas possible que Mattia voulût abandonner Capi ; s’il avait trouvé un moyen pour me faire évader, il en avait trouvé un aussi certainement pour Capi.

Je relus mon billet deux ou trois fois encore, puis, l’ayant mâché, je l’avalai ; maintenant je n’avais plus qu’à dormir tranquillement ; et je m’y appliquai si bien, que je ne m’éveillai que quand le geôlier m’apporta à manger.

Le temps s’écoula assez vite et le lendemain, dans l’après-midi, un policeman que je ne connaissais pas entra dans mon cachot et me dit de le suivre : je vis avec satisfaction que c’était un homme d’environ cinquante ans qui ne paraissait pas très-souple.

Les choses purent s’arranger selon les prescriptions de Mattia, et, quand le train se mit en marche, j’étais placé près de la portière par laquelle j’étais monté ; j’allais à reculons ; le policeman était en face de moi ; nous étions seuls dans notre compartiment.

– Vous parlez anglais ? me dit-il.

– Un peu.

– Vous le comprenez ?

– À peu près, quand on ne parle pas trop vite.

– Eh bien, mon garçon, je veux vous donner un bon conseil : ne faites pas le malin avec la justice, avouez : vous vous concilierez la bienveillance de tout le monde ; rien n’est plus désagréable que d’avoir affaire à des gens qui nient contre l’évidence ; tandis qu’avec ceux qui avouent on a toutes sortes de complaisances, de bontés ; ainsi moi, vous me diriez comment les choses se sont passées, je vous donnerais bien une couronne : vous verriez comme l’argent adoucirait votre situation en prison.

Je fus sur le point de répondre que je n’avais rien à avouer, mais je compris que le mieux pour moi était de me concilier la bienveillance de ce policeman, selon son expression, et je ne répondis rien.

– Vous réfléchirez, me dit-il, en continuant, et quand en prison vous aurez reconnu la bonté de mon conseil, vous me ferez appeler, parce que, voyez-vous, il ne faut pas avouer au premier venu, il faut choisir celui qui s’intéressera à vous, et moi, vous voyez bien que je suis tout disposé à vous servir.

Je fis un signe affirmatif.

– Faites demander Dolphin ; vous retiendrez bien mon nom, n’est-ce pas ?

– Oui, monsieur.

J’étais appuyé contre la portière dont la vitre était ouverte ; je lui demandai la permission de regarder le pays que nous traversions, et comme il voulait « se concilier ma bienveillance », il me répondit que je pouvais regarder tant que je voudrais. Qu’avait-il à craindre, le train marchait à grande vitesse.

Bientôt l’air qui le frappait en face l’ayant glacé, il s’éloigna de la portière pour se placer au milieu du wagon.

Pour moi, je n’étais pas sensible au froid ; glissant doucement ma main gauche en dehors je tournai la poignée et de la droite je retins la portière.

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