Читаем Sans famille полностью

Et elle développa cette idée en l’appuyant de bien des raisons, qui à mesure qu’elle les expliquait me paraissaient toutes meilleures les unes que les autres.

— Alors nous allons partir pour Paris, dis-je, c’est entendu.

Mais Mattia ne montra aucune approbation pour cette résolution, tout au contraire.

— Tu trouves que nous ne devons pas aller à Paris, lui dis-je, pourquoi ne donnes-tu pas tes raisons comme mère Barberin a donné les siennes ?

Il secoua la tête.

— Tu me vois assez tourmenté pour ne pas hésiter à m’aider.

— Je trouve, dit-il enfin, que les nouveaux ne doivent pas faire oublier les anciens : jusqu’à ce jour ta famille c’était Lise, Étiennette, Alexis et Benjamin, qui avaient été des sœurs et des frères pour toi, qui t’avaient aimé ; mais voilà une nouvelle famille qui se présente, que tu ne connais pas, qui n’a rien fait pour toi que te déposer dans la rue, et tout à coup tu abandonnes ceux qui ont été bons pour ceux qui ont été mauvais ; je trouve que cela n’est pas juste.

— Il ne faut pas dire que les parents de Rémi l’ont abandonné, interrompit mère Barberin ; on leur a peut-être pris leur enfant qu’ils pleurent et qu’ils attendent, qu’ils cherchent depuis ce jour.

— Je ne sais pas cela, mais je sais que le père Acquin a ramassé Rémi mourant au coin de sa porte, qu’il l’a soigné comme son enfant, et que Alexis, Benjamin, Étiennette et Lise l’ont aimé comme leur frère, et je dis que ceux qui l’ont accueilli ont bien au moins autant de droits à son amitié que ceux qui, volontairement ou involontairement, l’ont perdu. Chez le père Acquin et chez ses enfants, l’amitié a été volontaire ; ils ne devaient rien à Rémi.

Mattia prononça ces paroles comme s’il était fâché contre moi, sans me regarder, sans regarder mère Barberin. Cela me peina, mais cependant sans que le chagrin de me voir ainsi blâmé m’empêchât de sentir toute la force de ce raisonnement. D’ailleurs j’étais dans la situation de ces gens irrésolus qui se rangent bien souvent du côté de celui qui a parlé le dernier.

— Mattia a raison, dis-je, et ce n’était pas le cœur léger que je me décidais à aller à Paris sans avoir vu Étiennette et Lise.

— Mais tes parents ! insista mère Barberin.

Il fallait se prononcer ; j’essayai de tout concilier.

— Nous n’irons pas voir Étiennette, dis-je, parce que ce serait un trop long détour ; d’ailleurs Étiennette sait lire et écrire, nous pouvons donc nous entendre avec elle par lettre ; mais avant d’aller à Paris nous passerons par Dreuzy pour voir Lise ; si cela nous retarde, le retard ne sera pas considérable ; et puis Lise ne sait pas écrire, elle ne sait pas lire et c’est pour elle surtout que j’ai entrepris ce voyage ; je lui parlerai d’Alexis et en demandant à Étiennette de m’écrire à Dreuzy je lui lirai cette lettre.

— Bon, dit Mattia en souriant.

Il fut convenu que nous partirions le lendemain, et je passai une partie de la journée à écrire une longue lettre à Étiennette, en lui expliquant pourquoi je n’allais pas la voir comme j’en avais eu l’intention.

Et le lendemain, une fois encore, j’eus à supporter la tristesse des adieux ; mais au moins je ne quittai pas Chavanon comme je l’avais fait avec Vitalis ; je pus embrasser mère Barberin et lui promettre de revenir la voir bientôt avec mes parents ; toute notre soirée, la veille du départ, fut employée à discuter ce que je lui donnerais : rien ne serait trop beau pour elle ; n’allais-je pas être riche ?

— Rien ne vaudra pour moi ta vache, mon petit Rémi, me dit-elle, et avec toutes tes richesses tu ne pourras me rendre plus heureuse que tu ne l’as fait avec ta pauvreté.

Notre pauvre petite vache, il fallut aussi nous séparer d’elle ; Mattia l’embrassa plus de dix fois sur le mufle, ce qui parut lui être agréable, car à chaque baiser elle allongeait sa grande langue.

Nous voilà de nouveau sur les grands chemins, le sac au dos, Capi en avant de nous ; nous marchons à grands pas ou, plus justement, de temps en temps sans trop savoir ce que je fais, poussé à mon insu par la hâte d’arriver à Paris, j’allonge le pas.

Mais Mattia, après m’avoir suivi un moment, me dit que, si nous allons ainsi, nous ne tarderons pas à être à bout de forces, et alors je ralentis ma marche, puis bientôt de nouveau je l’accélère.

— Comme tu es pressé ! me dit Mattia d’un air chagrin.

— C’est vrai, et il me semble que tu devrais l’être aussi, car ma famille sera ta famille.

Il secoua la tête.

Je fus dépité et peiné de voir ce geste que j’avais déjà remarqué plusieurs fois depuis qu’il était question de ma famille.

— Ne sommes-nous pas frères ?

— Oh ! entre nous bien sûr, et je ne doute pas de toi, je suis ton frère aujourd’hui, je le serai demain, cela je le crois, je le sens.

— Eh bien ?

— Eh bien ! pourquoi veux-tu que je sois le frère de tes frères si tu en as, le fils de ton père et de ta mère ?

— Est-ce que si nous avions été à Lucca je n’aurais pas été le frère de ta sœur Cristina ?

— Oh ! oui, bien sûr.

— Alors pourquoi ne serais-tu pas le frère de mes frères et de mes sœurs si j’en ai ?

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