Les Y'ezidis ont pour premier principe de s'assurer l'amiti'e du Diable, et de mettre l''ep'ee `a la main pour sa d'efense. Aussi s'abstiennent-ils non-seulement de le nommer, mais m^eme de se servir de quelque expression dont la consonnance approche de celle de son nom. Par exemple un fleuve se nomme dans le langage ordinaire
Le Diable n'a point de nom dans le langage des Y'ezidis. Ils se servent tout au plus pour le d'esigner de cette p'eriphrase,
Le matin, `a peine le soleil commence-t-il `a para^itre, qu'ils se jettent `a genoux les pieds nus, et que tourn'es vers cet astre, ils se mettent en adoration, le front contre terre. Pour faire cet acte de d'evotion, ils se retirent `a part, loin de la pr'esence des hommes; ils font leur possible pour n'^etre point vus quand ils s'acquittent de ce devoir, dont ils se dispensent m^eme suivant les circonstances.
Ils n'ont ni je^unes, ni pri`eres, et disent pour justifier l'omission de ces њuvres de religion, que le scheikh Y'ezid a satisfait pour tous ceux qui feront profession de sa doctrine jusqu'`a la fin du monde, et qu'il en a recu l'assurance positive dans ses r'ev'elations; c'est en cons'equence de cela qu'il leur est d'efendu d'apprendre `a lire et `a 'ecrire. Cependant tous les chefs des tribus et des gros villages soudoient un docteur mahom'etan pour lire et interpr'eter les lettres qui leur sont adress'ees par les seigneurs et les pachas Turcs, et pour y r'epondre. Relativement aux affaires qu'ils ont entre eux, ils ne se fient jamais `a aucune personne d'une autre religion; ils envoient leurs ordres et font faire toutes leurs commissions de vive voix, par des hommes de leur secte.
N'ayant ni pri`eres, ni je^unes, ni sacrifices, ils n'ont aussi aucune f^ete. Ils tiennent cependant le 10 de la lune d'ao^ut une assembl'ee dans le voisinage du tombeau du scheikh Adi. Cette assembl'ee, `a laquelle beaucoup des Y'ezidis se rendent de contr'ees 'eloign'ees, dure toute cette journ'ee et la nuit suivante. Cinq ou six jours avant ou apr`es celui o`u elle a lieu, les petites caravanes courent risque d'^etre attaqu'ees dans les plaines de Moussol et du Kurdistan, par ces p'elerins qui voyagent toujours plusieurs ensemble, et il est rare qu'une ann'ee se passe sans que ce p'elerinage donne lieu `a quelque f^acheux 'ev'enement. On dit qu'un grand nombre de femmes des Y'ezidis, `a l'exception cependant des filles qui ne sont point encore mari'ees, se rendent des villages voisins `a cette r'eunion, et que cette nuit-l`a, apr`es avoir bien bu et mang'e, l'on 'eteint toutes les lumi`eres, et l'on ne parle plus jusqu'aux approches de l'aurore, instant auquel tout le monde se retire. On peut se faire une id'ee de ce qui se passe dans ce silence et `a la faveur des t'en`ebres.