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«Vous connaîtrez donc là-bas des palmeraies et des oiseaux de toutes couleurs… L'oasis se rendra à vous parce que vous portez dans le cœur la religion de l'oasis alors que ceux que vous en chassez n'en sont plus dignes. Leurs femmes elles-mêmes, lavant leur linge dans le ruisseau qui chante sur de petites pierres rondes et blanches, croient accomplir un triste devoir universel quand elles célèbrent une fête. Mais vous, qui vous êtes racornis dans le sable et desséchés dans le soleil et salés de la croûte brûlante des salines, vous les épouserez et, les poings sur les hanches, les regardant laver leur linge dans l'eau bleue, vous savourerez votre victoire.

«Vous durez aujourd'hui dans le sable à la façon du cèdre grâce aux ennemis qui vous cernent et vous durcissent, vous durerez, l'ayant conquise, dans l'oasis si l'oasis pour vous n'est point l'abri où l'on s'enferme et où l'on oublie, mais une victoire permanente sur le désert.

«Ceux-là, vous les avez vaincus, car ils s'enfermaient dans leur égoïsme, satisfaits par leurs provisions. Ils ne voyaient dans la couronne de sable qui les assiégeait qu'un ornement pour oasis, riant des importuns qui cherchaient à les émouvoir afin qu'au seuil de cette patrie de fontaines l'on relevât les sentinelles qui s'endormaient.

«Ils croupissaient dans l'illusion du bonheur qu'ils tiraient de biens possédés. Alors que le bonheur n'est que chaleur des actes et contentement de la création. Ceux qui n'échangent plus rien d'eux-mêmes et reçoivent d'autrui leur nourriture, fût-elle la mieux choisie et la plus délicate, ceux-là mêmes qui, subtils, écoutent les poèmes étrangers sans écrire leurs propres poèmes, jouissent de l'oasis sans la vivifier, usent des cantiques qu'on leur fournit, ceux-là s'attachent d'eux-mêmes à leurs râteliers dans l'étable et, réduits au rôle de bétail, sont prêts pour l'esclavage.»

Je leur ai dit: «L'oasis une fois conquise, rien d'essentiel n'a changé pour vous. Ce n'est qu'une autre forme de campement dans le désert. Car mon empire est menacé de toutes parts. Sa matière n'est qu'un assemblage familier de chèvres, de moutons, de demeures et de montagnes, mais si se rompt le nœud qui les noue ensemble, il n'en restera rien que matériaux en vrac et offerts au pillage.»


VIII


Il m'apparut qu'ils se trompaient sur le respect. Car je me suis moi-même exclusivement préoccupé des droits de Dieu à travers l'homme. Et certes le mendiant lui-même, sans m'exagérer son importance, je l'ai toujours conçu comme un ambassadeur de Dieu.

Mais les droits du mendiant et de l'ulcère du mendiant et de sa laideur honorés pour eux-mêmes comme idoles, je ne les ai pas reconnus.

Qu'ai-je côtoyé de plus repoussant que ce quartier de ville bâti au flanc d'une colline et qui coulait comme un égout jusqu'à la mer? Les corridors qui débouchaient sur les ruelles versaient par bouffées molles une haleine empestée. La racaille n'émergeait de ces profondeurs spongieuses que pour s'injurier d'une voix usée et sans colère véritable, à la façon des bulles molles qui éclatent, régulières, à la surface des marais.

J'y ai vu ce lépreux, riant grassement et s'épongeant l'oeil d'un linge sordide. Il était avant tout vulgaire et se plaisantait soi-même par bassesse.

Mon père décida l'incendie. Et cette tourbe qui tenait à ses bouges moisis commença de fermenter, réclamant au nom de ses droits. Le droit à la lèpre dans la moisissure.

«Ceci est naturel, me dit mon père, car la justice selon eux c'est de perpétuer ce qui est.»

Et ils criaient dans leur droit à la pourriture. Car, fondés par la pourriture, ils étaient pour la pourriture.

«Et si tu laisses se multiplier les cafards, me dit mon père, alors naissent les droits des cafards. Lesquels sont évidents. Et il naîtra des chantres pour te les célébrer. Et ils te chanteront combien grand est le pathétique des cafards menacés de disparition.

«Être juste…, me dit mon père, il faut choisir. Juste pour l'archange ou juste pour l'homme? Juste pour la plaie ou pour la chair saine? Pourquoi l'écouterai-je, celui-là qui vient me parler au nom de sa pestilence?

«Mais je le soignerai à cause de Dieu. Car il est aussi demeure de Dieu. Mais non point selon son désir qui n'est que désir exprimé par l'ulcère.

«Quand je l'aurai nettoyé et lavé et enseigné, alors son désir sera autre et il se reniera lui-même tel qu'il était. Et pourquoi, aurais-je, moi, servi d'allié à celui-là qu'il aura lui-même renié? Pourquoi l'aurais-je, selon le désir du lépreux vulgaire, empêché de naître et d'embellir?

«Pourquoi prendrais-je le parti de ce qui est contre ce qui sera. De ce qui végète contre ce qui demeure en puissance?»


«La justice selon moi, me dit mon père, est d'honorer le dépositaire à cause du dépôt. Autant que je m'honore moi-même. Car il reflète la même lumière. Aussi peu visible qu'elle soit en lui. La justice est de le considérer comme véhicule et comme chemin. Ma charité c'est de l'accoucher de lui-même.

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