Читаем Ensemble, c’est tout полностью

— Je peux mettre ton marcel gris ? demanda Myriam depuis sa chambre.

Il se frotta énergiquement les dents et s'adressa de nouveau à la fille du miroir en se mettant du dentifrice plein le menton :

— Chegidiotchméjechegblutotjavectoigjjequegchavaisgelenviejedormirj...

— Pardon ? fit-elle en fronçant les sourcils.

Il recracha :

— Je disais : c'est plutôt idiot quand on n'a pas de toit pour dormir...

— Ah oui, fit-elle en souriant, oui c'est idiot. Vraiment...

Elle se retourna vers lui :

— Écoute-moi, Franck, j'ai un truc important à te dire... Hier je t'ai avoué que je ne tenais jamais mes résolutions, mais là, il y en a une que je voudrais qu'on prenne ensemble et qu'on respecte...

— Tu veux qu'on arrête de boire ? !

— Non.

— De fumer ?

— Non.

— Qu'est-ce que tu veux, alors ?

— Je voudrais que tu arrêtes ce petit jeu-là avec moi...

— Quel jeu ?

— Tu le sais très bien... Ton sexual planning, là, toutes tes petites allusions bien lourdes... Je... j'ai pas envie de te perdre, j'ai pas envie qu'on se fâche. J'ai envie que ça se passe bien, ici, maintenant... Que ça reste un endroit... Enfin, tu vois, un endroit où l'on soit bien tous les trois... Un lieu calme, sans embrouilles... Je... Tu... On... on ira nulle part tous les deux, tu t'en rends bien compte, non ? Enfin, je veux dire, on... Bien sûr, on pourrait coucher ensemble, oui, bon, mais après ? Nous deux, ce serait n'importe quoi et je... Enfin, ce serait dommage de tout gâcher, quoi...

Il était dans les cordes et mit plusieurs secondes avant de lui chiquer le mollet :

— Attends, de quoi tu me causes, là ? Je t'ai jamais dit que je voulais coucher avec toi ! Même si je voulais, je pourrais jamais ! T'es beaucoup trop maigre ! Comment tu veux qu'un mec ait envie de te caresser ? Touche-toi, ma vieille ! Touche-toi ! Tu délires complètement...

— Tu vois comme j'ai raison de te mettre en garde ? Tu vois comme je suis lucide ? Ça ne pourrait jamais marcher entre nous... J'essaye de te dire les choses avec le plus de tact possible et toi, tu n'as rien d'autre à me proposer en échange que ta petite agressivité de merde, ta bêtise, ta mauvaise foi et ta méchanceté. Heureusement que tu pourrais jamais me caresser ! Heureusement ! J'en veux pas de tes sales pattes rougeaudes et de tes ongles tout rongés ! Garde-les donc pour tes serveuses !

Elle se retenait à la poignée de la porte :

— Bon, ben c'est raté mon truc... J'aurais mieux fait de me taire... Oh ! je suis con... Je suis trop con... En plus, d'habitude je ne suis pas comme ça. Pas du tout... Je suis plutôt du genre à faire le gros dos et à partir sur la pointe des pieds quand ça sent le roussi...

Il s'était assis sur le bord de la baignoire.

— Oui, c'est comme ça que j'agis d'habitude... Mais, là, comme une idiote, je me suis fait violence pour te parler parce que...

Il releva la tête.

— Parce que quoi ?

— Parce que... je te l'ai dit, ça me semble important que cet appart reste un lieu paisible... Je vais avoir vingt-sept ans et pour la première fois de ma vie, j'habite un endroit où je me sens bien, où je suis heureuse de rentrer le soir et même si je n'y suis pas depuis très longtemps, tu vois, malgré toutes les horreurs que tu viens de me balancer à la gueule, je suis encore là, à piétiner mon amour-propre pour ne pas risquer de le perdre... Euh... tu comprends ce que je te dis, là, ou c'est du charabia ?

— ...

— Bon, ben... Je vais me toucher euh... me coucher...

Il ne put s'empêcher de sourire :

— Excuse-moi, Camille... Je m'y prends comme un manche avec toi...

— Oui.

— Pourquoi je suis comme ça ?

— Bonne question... Bon alors ? On l'enterre cette hache ?

— Vas-y. Je creuse déjà...

— Super. Bon, on se la fait cette bise, alors ?

— Non. Coucher avec toi à la rigueur, mais t embrasser sur la joue, surtout pas. Pour le coup, ce serait beaucoup trop dur...

— Tu es bête...

Il mit un moment avant de se relever, se recroquevilla, regarda longtemps ses doigts de pied, ses mains, ses ongles, éteignit la lumière et prit Myriam distraitement en la plaquant sur l'oreiller pour que l'autre n entende pas.

5

Même si cette conversation lui avait beaucoup coûté, même si elle s'était déshabillée ce soir-là en frôlant son corps avec plus de défiance encore, impuissante et découragée par tous ces os qui saillaient aux endroits les plus stratégiques de la féminité, les genoux, les hanches, les épaules, même si elle avait mis du temps à s'endormir en comptant ses mauvais points, elle ne la regretta pas. Dès le lendemain, à la façon dont il bougeait, dont il plaisantait, dont il était attentif sans en faire des tonnes et égoïste sans même s'en rendre compte, elle comprit que le message était passé.

La présence de Myriam dans sa vie facilita les choses, et même s'il la traitait toujours par-dessus la jambe, il découchait souvent et revenait plus détendu.

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