Aussi en s'excusant pour sa langue et son style, il parle de sa modeste position et de l'éducation qu'il a reçue dans son ermitage forestier. La véracité du récit constitue son souci particulier:
Il ne manque pas une occasion de dire d'où il tire telle ou telle information, car quant à lui il est arrivé en retard à la fête et a dû ou questionner les témoins oculaires ou utiliser les notes des secrétaires qui étaient présents à la tribune aux côtés des juges. Mais souvent il lui manque quelques éléments, et alors il s'explique et promet de découvrir plus tard ce qui lui échappe encore. Sous ce rapport notre auteur se comporte comme beaucoup d'autres auteurs de son temps pour qui la vérité était un des buts les plus importants de la relation d'événements. Et cette vérité était atteinte avant tout par l'expérience, c'est-à-dire par l'observation personnelle, et aussi grâce au questionnement de témoins oculaires. Mais à la différence de beaucoup d'autres, la quête de la vérité est chez notre auteur colorée d'une charge émotionnelle particulière. Comme s'il craignait les reproches, il insiste constamment sur la véracité de ses paroles et même s'écrie:
Quand a-t-il travaillé sur son œuvre? Il en a reçu la commande, on peut le supposer, lors de son arrivée à Saumur, bien qu'à la vérité on ne puisse exclure la possibilité qu'il ait eu spontanément l'intention de décrire les festivités, en dehors de toute commande, mais celle-ci le força à diriger l'attention sur ce qui intéressait le roi René.
Jusqu'à ce qu'on se séparât il rassembla des informations mais il n'eut pas le temps d'en obtenir beaucoup, ce dont il se plaint au début de son poème. Exposant le vaste plan de sa description, il remarque que
Néanmoins, malgré le défaut d'informations, il se mit au travail sans désemparer. Pendant qu'il compose il reçoit sans cesse de nouveaux renseignements que, semble-t-il, quelqu'un lui communique. Parlant de l'un des participants à la joute, Jean Cosse, il remarque
Il veut dire qu'il donnera la description des heaumes au fur et à mesure que ces chevaliers apparaîtront en lice au cours du récit, car beaucoup d'entre eux furent engagés plusieurs fois.
Les informations nécessaires apparemment ne manquaient pas, aussi notre auteur promet-il qu'il donnera plus tard une description plus complète et plus accomplie des festivités. De ce qu'il a écrit, voici ce qu'il dit:
Il compte pour son travail à venir sur la collaboration des participants qu'il n'a pas vus et avec lesquels il n'a pas eu le temps de s'entretenir, mais il craint qu'ils ne soient plus de ce monde. Aussi citant l'un ou l'autre de ceux-ci, il ajoute assez souvent:
Ou
Il donne l'impression d'avoir écrit assez longtemps après la joute, à un moment où beaucoup avaient déjà eu le temps de mourir. Mais cette impression est fausse, et il s'est mis au travail très vite après la clôture de la joute. Mais la vie humaine était alors fragile et courte, particulièrement la vie d'un soldat. Bien que la trêve entre les rois anglais et français ne datât que de la veille, la guerre civile et ses affrontements ne cessaient pas, et un chevalier pouvait mourir à n'importe quel moment. Aussi notre auteur a-t-il des craintes pour la survie des participants.