Читаем JOSEPH BALSAMO Mémoires d’un médecin Tome I полностью

– Hélas! on eût dit que la dauphine devinait mon embarras: «Ne craignez rien, me dit-elle, mon séjour ne sera pas long; mais, puisque vous me menacez d’un accueil qui me fera souffrir, nous serons quittes, car, moi aussi, je vous ai fait souffrir à mon entrée à Strasbourg.» Comment résister à de si charmantes paroles? Dites, mon père!

– Oh! c’était impossible, dit Andrée, et Son Altesse royale, si bonne à ce qu’il paraît, se contentera de mes fleurs et d’une tasse de mon lait, comme elle a dit.

– Oui, dit le baron; mais elle ne se contentera pas de mes fauteuils qui lui briseront les os, de mes lambris qui lui attristeront la vue. Au diable les caprices! Bon! la France sera encore bien gouvernée par une femme qui a de ces fantaisies-là. Peste! voilà l’aurore d’un singulier règne!

– Oh! mon père, pouvez-vous dire de semblables choses d’une princesse qui nous comble d’honneurs!

– Qui me déshonore bien plutôt! s’écria le vieillard. Qui songe en ce moment aux Taverney? Personne. Le nom de la famille dort sous les ruines de Maison-Rouge, et j’espérais qu’il n’en sortirait que d’une certaine façon et quand le moment serait venu; mais non, j’espérais à tort, et voilà que le caprice d’une enfant va le ressusciter terni, poudreux, mesquin, misérable. Voilà que les gazettes, à l’affût de tout ce qui est ridicule, pour en tirer le scandale dont elles vivent, vont consigner dans leurs sales recueils la visite d’une grande princesse au taudis de Taverney. Cordieu! j’ai une idée!

Le baron prononça ces paroles d’une façon qui fit tressaillir les deux jeunes gens.

– Que voulez-vous dire, mon père? demanda Philippe.

– Je dis, mâchonna le baron, que l’on sait son histoire, et que, si le comte de Médina a bien incendié son palais pour embrasser une reine, je puis bien, moi, brûler une bicoque pour être dispensé de recevoir une dauphine. Laissez arriver la princesse.

Les deux jeunes gens n’avaient entendu que les derniers mots, et ils se regardaient avec inquiétude.

– Laissez-la arriver, répéta Taverney.

– Elle ne peut tarder, monsieur, répéta Philippe. J’ai pris la traverse par le bois de Pierrefitte pour gagner quelques minutes sur le cortège, mais il ne doit pas être loin.

– En ce cas, il n’y a pas de temps à perdre, dit le baron.

Et, agile encore comme s’il eût eu vingt ans, le baron sortit du salon, courut à la cuisine, arracha du foyer un tison brûlant, et courut aux granges pleines de paille sèche, de luzerne et de féveroles; il l’approchait déjà des bottes de fourrage lorsque Balsamo surgit derrière lui et lui saisit le bras.

– Que faites-vous donc là, monsieur? dit-il en arrachant le brandon des mains du vieillard; l’archiduchesse d’Autriche n’est point un connétable de Bourbon dont la présence souille une maison à ce point qu’on la brûle plutôt que de la laisser y mettre le pied.

Le vieillard s’arrêta, pâle, tremblant, et ne souriant plus comme d’habitude. Il lui avait fallu réunir toutes ses forces pour adopter au profit de son honneur, du moins à la façon dont il l’entendait, une résolution qui faisait d’une médiocrité encore supportable une misère complète.

– Allez, monsieur, allez, continua Balsamo, vous n’avez que le temps de quitter cette robe de chambre et de vous habiller d’une façon convenable. Quand j’ai connu au siège de Philippsburg le baron de Taverney, il était grand-croix de Saint-Louis. Je ne sache pas d’habit qui ne redevienne riche et élégant sous une pareille décoration.

– Mais, monsieur, reprit Taverney, avec tout cela la dauphine va voir ce que je ne voulais pas même vous montrer à vous: c’est que je suis malheureux.

– Soyez tranquille, baron; on l’occupera tellement, qu’elle ne remarquera pas si votre maison est neuve ou vieille, pauvre ou riche. Soyez hospitalier, monsieur, c’est votre devoir comme gentilhomme. Que feront les ennemis de Son Altesse royale, et elle en a bon nombre, si ses amis brûlent leurs châteaux pour ne pas la recevoir sous leur toit? N’anticipons pas sur les colères à venir, monsieur; chaque chose aura son tour.

M. de Taverney obéit avec cette résignation dont une fois déjà il avait donné la preuve, et alla rejoindre ses enfants, qui, inquiets de son absence, le cherchaient de tous côtés.

Quant à Balsamo, il se retira silencieusement comme pour achever une œuvre commencée.

<p id="_Toc103004297">Chapitre XIV Marie-Antoinette-Josèphe, archiduchesse d’Autriche</p>

Il n’y avait pas de temps à perdre en effet, comme l’avait dit Balsamo; un grand bruit de voitures, de chevaux et de voix retentissait dans le chemin, si paisible d’ordinaire, qui conduisait de la route à la maison du baron de Taverney.

On vit alors trois carrosses, dont l’un, chargé de dorures et de bas-reliefs mythologiques, n’était pas, malgré sa magnificence, moins poudreux ou moins éclaboussé que les autres, s’arrêter près de la porte que tenait ouverte Gilbert, dont les yeux dilatés et le tremblement fébrile indiquaient la vive émotion à l’aspect de tant de grandeurs.

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