Читаем L'Empire des anges полностью

Edmond Wells s'élève en lévitant.

– Un jour viendra où Igor, Jacques et Venus te rejoindront ici et te fixeront dans les yeux. Et ce moment sera terrible pour toi car alors ils sauront qui tu es et ce sera à toi de leur rendre des comptes.

Honteux, je baisse la tête.

– Autre chose encore. N'écoute pas les mauvais élèves. Ce n'est pas sur eux qu'il faut t'aligner. Ce ne sont pas eux qui au jour de la pesée de leur âme s'expliqueront à ta place avec tes clients.

Mon instructeur a un mouvement du menton en direction de Raoul qui volette non loin.

– Par chance, Michael, tu as reçu de bonnes âmes au départ. Il n'est pas dit que la prochaine distribution te sera aussi favorable. En général, c'est lorsqu'on a échoué avec ses premiers clients et qu'on touche sa nouvelle couvée qu'on se rend compte combien on avait été bien servi la première fois.

Je me recroqueville. Je voudrais me faire tout petit sous ce regard.

– Pour un mortel, échouer c'est se réincarner, tonne-t-il. Pour un ange, c'est… recevoir de nouveaux clients.

<p>131. IGOR. 18 ANS</p>

Stanislas et moi avons droit à des médailles. Le colonel Dukouskoff nous donne l'accolade.

– Désormais vous êtes sergents-chefs.

Un parterre de militaires en uniforme impeccable se lève et applaudit. On hisse le drapeau de la nation et résonne à mes oreilles le doux hymne de la mère patrie. Le colonel Dukouskoff me chuchote à l'oreille:

–Vous êtes les deux seuls à vous en être tirés après vous être battus à un contre dix. Quel est votre secret?

Je respire très fort et j'hésite. Je ne vais tout de même pas lui parler de mon ange gardien.

– J'ai survécu à ma mère, dis-je.

Il sourit, compréhensif.

Et, à cet instant, j'exulte d'avoir dix-huit ans et d'être vivant.

<p>132. VENUS. 18 ANS</p>

Je suis dans les bras du champion du monde de boxe poids lourds qui faisait partie du jury. Nous faisons l'amour. C'est une brute. Il halète comme sur un ring. Le bruit est assourdissant. De ses grosses pattes il m'étend sous lui et j'étouffe. Cent vingt kilos de muscles qui dégagent de la vapeur et vous oppressent, autant faire l'amour avec une locomotive ou un camion. Aucune délicatesse.

Ça avait pourtant bien commencé. Après l'élection, il m'a contactée et m'a demandé si on pouvait se voir. J'ai accepté. Il est venu vers moi et m'a couverte de compliments comme quoi j'étais vraiment la plus belle du concours. Puis ça s'est gâté. Il m'a rappelé que c'était lui, avec son vote de 10 sur 10, qui m'avait fait gagner le titre. À l'entendre, je lui étais redevable de ma victoire! Ah, ces hommes, à les écouter, on n'arriverait à rien sans eux. Mais moi, je sais que si j'ai réussi, c'est parce que j'ai prononcé la bonne prière au bon moment. J'ai même ressenti une présence amie se manifester pour la première fois. Mon ange gardien, sûrement.

Par politesse, je le laisse aller jusqu'au bout puis il s'endort en poussant un grand ronflement et j'en profite pour partir.

Je suis vraiment trop gentille.

<p>133. JACQUES. 18 ANS</p>

J'écris de moins en moins. Je lis de moins en moins. Je reste parfois avachi dans mon canapé cinq heures d'affilée devant la télévision, sous une couverture, le chat posé sur mes genoux en train de ronronner. Je ne regarde même pas une émission en particulier. Je zappe.

Mon emploi de serveur suffit à subvenir à mes besoins. De toute façon, je ne coûte pas cher. Je me nourris de bols de pâtes déshydratées qui regonflent quand on verse de l'eau bouillante dessus.

Mona Lisa II est ravie que je regarde la télévision. Elle est persuadée de m'avoir montré la voie de la sagesse.

Je crois qu'avec Les Rats, j'ai écrit un bon livre. Mais si les éditeurs sont incapables de s'en rendre compte, c'est comme si je n'avais rien fait, alors autant ne rien faire pour de bon.

Au rythme où je grossis, avec mes pâtes, je ne vais pas tarder à me transformer en «Mona Lisa humain». Par paresse de me raser, je me laisse pousser la barbe.

Peu à peu, zappant toujours, je descends dans la hiérarchie des programmes. Des informations, je passe aux films, des films aux téléfilms, puis aux séries, puis aux sitcoms, puis à ces abominables jeux d'«érudition» du matin où deux candidats s'affrontent en tentant de répondre le plus vite possible à des questions nulles du genre: «Quelle est la nourriture préférée des chiens?»

Moi, je me fiche des chiens, j'ai un chat, mais je regarde quand même.

Je pense que je peux continuer à vivre comme ça pendant quarante ans. J'ai renoncé. Et pourtant, un jour, une émission me fait réagir.

C'est une émission littéraire. L'émission hebdomadaire littéraire de référence. D'ordinaire je l'ignore, mais aujourd'hui je suis saisi d'un attrait morbide.

Thème de l'émission: l'amour. Premier invité, un vieil acteur qui a connu son heure de gloire. Il égrène ses souvenirs et énumère, la mine coquine, les comédiennes qu'il a comme il dit «honorées». Le présentateur, la mine tout aussi égrillarde, plaisante et renchérit dans les allusions grivoises.

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