Читаем La Bible amusante полностью

Pour l’instant, occupons-nous seulement de l’arbre dont le fruit causa la chute de l’homme. Rappelons que l’empereur Julien le Philosophe, dont la mémoire est si exécrée par les gens d’église, se livra, au sujet de ce merveilleux arbre, à quelques remarques pleines de bon sens. Il nous semble, écrivit-il, que le seigneur Dieu aurait dû au contraire ordonner à l’homme, sa créature, de manger beaucoup de cet arbre de la science du bien et du mal; que non seulement Dieu lui avait donné une tête pensante qu’il fallait nécessairement instruire, mais qu’il était encore plus indispensable de lui faire connaître le bien et le mal, pour qu’il remplît ses devoirs; que la défense était tyrannique et absurde; que c’était cent fois pis que si on lui avait fait un estomac pour l’empêcher de manger.

Une autre réflexion que l’on ne peut s’empêcher de se faire, c’est que le point de départ de l’historiette prouve que le seigneur Jéhovah avait une arrière-pensée et qu’il était bien aise que l’homme péchât. En somme, Adam aurait été en droit de lui dire:

— Mon petit père Elohim, si je ne me trompe, le bien est ce qui est moralement bon, ce qui vous plaît, et le mal, par contre, est ce qui est mauvais, ce qui vous déplaît… Est-ce bien cela?

— Parfaitement, mon fiston, aurait répondu le Créateur.

— Par conséquent, aurait continué Adam, laissez-moi apprendre en quoi consiste le mal, afin que je l’évite; ou bien pourquoi avoir mis ici cet arbre, s’il ne faut pas que j’y touche?…

Ce sont les curés qui se chargent de la réplique, au lieu et place de leur drôle de Bon Dieu.

— Dieu, disent-ils, imposait une épreuve à l’humanité naissante; il voulait voir si Adam lui obéirait, alors qu’il ne lui demandait qu’une seule et très petite privation.

Mais il est facile de répliquer à la réplique. D’après les curés eux-mêmes, Dieu connaît l’avenir: il avait donc prévu ce qui allait arriver; et, comme rien ne se fait sans sa volonté, il savait parfaitement que l’homme mangerait du fruit de l’arbre en question. Il voulait donc la chute de nos premiers parents, cela ne fait aucun doute.

D’ailleurs, toute la suite de l’histoire se retourne contre le seigneur Jéhovah.

Voyons comment les choses se passèrent, selon le chapitre 3 de la Genèse:

«1. Or, le serpent était le plus rusé de tous les animaux de la terre que l’Éternel Dieu avait faits; et il dit à la femme: Quoi! Dieu aurait-il dit; Vous ne mangerez point de tout arbre du jardin?

2. Et la femme répondit au serpent: Nous mangeons du fruit des arbres du jardin;

3. Mais, quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit: Vous n’en mangerez point et vous n’y toucherez point, de peur que vous ne mouriez.

4. Alors, le serpent dit à la femme: Vous ne mourrez nullement;

5. Mais Dieu sait qu’au jour que vous en mangerez vos yeux seront ouverts, et vous serez comme les dieux, connaissant le bien et le mal.

6. La femme donc vit que le fruit de cet arbre était bon à manger et d’un aspect agréable, et que cet arbre était désirable pour donner de la science; et elle en prit du fruit et en mangea; et elle en donna aussi à son mari, l’entraînant avec elle; et il en mangea.»

Ce qui frappe tout d’abord, dans ce récit, c’est que le discours du serpent, sa conversation avec la femme, le fait même de parler, de s’exprimer dans la même langue que nos premiers parents, n’est pas donné par l’auteur sacré comme une chose surnaturelle, miraculeuse, ni comme une allégorie. C’est bien le serpent lui-même que la Genèse présente; c’est ce reptile, jouant un rôle d’animal plein de malice et d’astuce, qui se fait le tentateur de la femme, avec une facilité d’élocution que lui envierait un perroquet.

Перейти на страницу:

Похожие книги