Читаем La dame de Montsalvy полностью

— Les officiers ne demanderaient que cela. Mais les hommes de troupe sortent à peu près tous des familles de travailleurs ou du bas peuple qu'avec de la bière et un peu d'or on fait brailler sur le mode que l'on veut. Voyez-vous, les choses en sont venues au point où, même s'il était en mon pouvoir de laisser sortir votre maîtresse, je me garderais bien de le faire car ce serait la vouer au massacre. Les esprits se montent de plus en plus, jeune homme, et vous n'imaginez pas à quel point le peuple, surchauffé, se montre rétif et insolent. En toute honnêteté, j'ai cru, en gardant ici dame Catherine, agir pour le bien de ma cité, pour sa richesse et pour ses privilèges séculaires. A présent, je me demande si j'ai eu raison. Je... je ne sais plus !

Silencieusement, Gauthier alla jusqu'à un dressoir, y emplit deux gobelets de malvoisie et vint en offrir un au bourgmestre.

— Asseyez-vous, messire... et buvez ceci. Je crois que vous en avez besoin.

Avec une grimace qui pouvait passer à la rigueur pour l'ombre d'un sourire, Van de Walle accepta le vin et le siège que le jeune homme lui avançait. Gauthier le laissa boire et se détendre un peu dans le moelleux des coussins. Cet homme qu'il y a un instant encore il imaginait tout-puissant, monolithique et impitoyable, lui faisait pitié à présent. Il ressemblait bien plus à un gibier traqué qu'au premier magistrat d'une cité souveraine...

1 Les chapelets, faits d'ambre, dont Bruges possédait le monopole, étaient une des grandes spécialités de la ville.

Quand il eut vu un peu de couleur revenir à son visage blême, Gauthier, doucement, demanda :

— Les choses vont si mal avec le Duc ?

Il s'attendait à voir son vis-à-vis se refermer comme une huître et partir sans ajouter un seul mot. Il n'en fut rien. Van de Walle devait être à bout de nerfs car il se laissa aller à soupirer, puis répondit :

— Plus encore que vous n'imaginez ! Lorsque nous avons envoyé, fin janvier, auprès de Monseigneur pour continuer les pourparlers et l'informer de la présence de dame Catherine en notre ville, il n'a même pas voulu recevoir les messagers. Mais, le 11 février, il déclarait hautement que le Franc formerait à l'avenir le quatrième membre du pays avec Gand, Ypres et Bruges et qu'en aucun cas ses habitants ne pourraient se faire admettre dans la bourgeoisie de Bruges. C'est la liberté pour le Franc... et un coup très rude pour notre économie !

— Et l'Écluse ?

— Il n'en a pas été question mais je vous rappelle qu'elle fait aussi partie du Franc. Alors...

— Vous n'avez rien fait depuis ?

Bien sûr que si ! Puisque nos envoyés n'ont pas été reçus, mon collègue Maurice de Varssenare s'est rendu en personne à Lille. Il venait de partir quand nous avons appris que, le 11 mars, le Duc avait confirmé, par charte, les droits du Franc à une organisation indépendante. Depuis nous sommes sans nouvelles. Nous ne savons même pas ce qu'il est advenu de Varssenare. J'ai peur que le Duc ne l'ait fait jeter en prison. Ce qui n'empêche pas les gens d'ici de crier déjà à la trahison et de réclamer sa tête ! Nous vivons des temps difficiles, jeune homme, mais j'ai peur qu'ils ne le deviennent plus encore. Alors, je vous en conjure, faites tout ce que vous pouvez pour votre maîtresse mais gardez-la en vie. Demain, mon épouse, Gertrude, viendra la voir. Voilà des semaines qu'elle me supplie de le lui permettre car elle a beaucoup de sympathie pour elle. Peut-être arrivera-t-elle à la raisonner, à l'inciter à se nourrir, à lutter. Et puis...

demandez-lui de me pardonner !

— Ne vaudrait-il pas mieux essayer de la faire partir d'ici ? Que se passera-t-il si les croquants qui gardent cette maison décident un jour d'y mettre le feu ou d'en massacrer tous les habitants ?

— Je sais mais je n'y peux rien. Croyez bien que si sa fuite était possible ce serait déjà fait. Mais...

— Mais ce serait signer votre arrêt de mort, n'est-ce pas ?

Le bourgmestre baissa la tête.

— ... et surtout celui de ma famille car ces gens ne feraient pas de différence. Et j'ai des enfants...

Comme pour apporter un contrepoint sinistre à ses craintes, une clameur s'éleva à l'extérieur, dans la rue même où s'ouvrait la maison, une clameur d'où jaillit, isolé et menaçant, le cri de « Mort aux traîtres

!... » Van de Walle se leva.

— Qu’ont-ils pu découvrir encore ? soupira-t-il. Il vaut mieux que j'aille voir. Les inondations n'arrangent rien...

Et il partit, laissant Gauthier méditer à loisir les nouvelles inquiétantes qu'il lui avait données...

Cette nuit-là. le jeune homme ne dormit guère. Enfermé avec Bérenger dans leur chambre, sans parvenir à trouver le sommeil, les deux garçons tournèrent et retournèrent dans leurs têtes les données d'un problème apparemment insoluble : comment faire évader Catherine et la ramener dans ce pays de France qui leur semblait une sorte de paradis perdu en dépit des violences qui le ravageaient encore.

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