Читаем La planète des singes полностью

— Et un très grand savant. Avec son appui, je suis sûre que tu persuaderas le congrès.

— Zira, murmurai-je à son oreille, quand je fus installé sur la banquette arrière, je te devrai la liberté et la vie. » Je me rendais compte de tout ce qu’elle avait fait pour moi depuis ma capture. Sans elle, je n’aurais jamais pu entrer en contact avec le monde simien. Zaïus eût été bien capable de me faire enlever le cerveau pour démontrer que je n’étais pas un être raisonnable. Grâce à elle, j’avais maintenant des alliés et pouvais envisager l’avenir avec un peu plus d’optimisme.

« Je l’ai fait par amour pour la science, dit-elle en rougissant. Tu es un cas unique, qu’il faut préserver à tout prix. »

Mon coeur débordait de reconnaissance. Je me laissais prendre à la spiritualité de son regard, parvenant à faire abstraction de son physique. Je posai la main sur sa longue patte velue. Elle tressaillit et je sentis dans ce regard un grand élan de sympathie pour moi. Nous étions tous deux profondément troublés et nous restâmes silencieux pendant tout le trajet du retour. Quand elle m’eut ramené à ma cage, je repoussai brutalement Nova, qui se livrait à des démonstrations puériles pour m’accueillir.

V

Zira m’a prêté en cachette une lampe électrique et me passe des livres, que je dissimule sous la paille. Je lis et je parle couramment maintenant le langage des singes. Je passe plusieurs heures chaque nuit à étudier leur civilisation. Nova a d’abord protesté. Elle est venue flairer un livre en montrant les dents, comme si c’était un adversaire dangereux. Je n’ai eu qu’à braquer sur elle le faisceau de ma lampe pour la voir se réfugier dans un coin, tremblante et gémissante. Je suis le maître absolu chez moi depuis que je possède cet instrument et n’ai plus besoin d’arguments frappants pour la faire tenir tranquille. Je sens qu’elle me considère comme un être redoutable et je m’aperçois à beaucoup d’indices que les autres prisonniers me jugent ainsi. Mon prestige a considérablement augmenté. J’en abuse. Il me prend parfois fantaisie de la terroriser sans motif en brandissant la lumière. Elle vient ensuite me demander pardon de ma cruauté.

Je me flatte d’avoir maintenant une idée assez précise du monde simien.

Les singes ne sont pas divisés en nations. La planète entière est administrée par un conseil de ministres, à la tête duquel est placé un triumvirat comprenant un gorille, un orang-outan et un chimpanzé. A côté de ce gouvernement, il existe un Parlement composé de trois Chambres : la Chambre des gorilles, celle des orangs-outans, celle des chimpanzés, chacune de ces assemblées veillant aux intérêts des siens.

En fait, cette division en trois races est la seule qui subsiste chez eux. En principe, tous ont des droits égaux et peuvent être admis à n’importe quel poste. Pourtant, avec des exceptions, chaque espèce se cantonne dans sa spécialité.

D’une époque assez éloignée où ils régnaient par la force, les gorilles ont gardé le goût de l’autorité et forment encore la classe la plus puissante. Ils ne se mêlent pas à la foule ; on ne les voit guère dans les manifestations populaires, mais ce sont eux qui administrent de très haut la plupart des grandes entreprises. Assez ignorants en général, ils connaissent d’instinct la manière d’utiliser les connaissances. Ils excellent dans l’art de tracer des directives générales et de manoeuvrer les autres singes. Quand un technicien a fait une découverte intéressante, tube lumineux par exemple ou combustible nouveau, c’est presque toujours un gorille qui se charge de l’exploiter et d’en tirer tout le bénéfice possible. Sans être véritablement intelligents, ils sont beaucoup plus malins que les orangs-outans. Ils obtiennent tout ce qu’ils veulent de ceux-ci en jouant de leur orgueil. Ainsi, à la tête de notre Institut, au-dessus de Zaïus, qui est le directeur scientifique, il y a un gorille administrateur, que l’on voit très rarement. Il n’est venu dans ma salle qu’une fois. Il m’a dévisagé d’une certaine façon et j’ai failli machinalement rectifier la position pour me mettre au garde-à-vous. J’ai noté l’attitude servile de Zaïus, et Zira, elle-même, semblait impressionnée par ses grands airs.

Les gorilles qui n’occupent pas des postes d’autorité remplissent en général des emplois subalternes nécessitant de la vigueur. Zoram et Zanam, par exemple, ne sont là que pour de grossières besognes et surtout pour rétablir l’ordre quand c’est nécessaire.

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