Читаем Le Grec полностью

Sur sa lancée, Socrate voulait maintenant refaire le même coup à Achille, comme si on pouvait assimiler Joan à ces fantoches mondains! Jusqu'à présent, il avait tout essayé pour les faire rompre, intimidations, chantage, menaces d'être déshérité. Il avait même essayé d'acheter Joan! Joan qui, pour le suivre, se serait contentée de boire de l'eau et de manger du pain, Joan qui préférait les blue-jeans aux robes du soir, les petits bistrots pas chers aux restaurants à la mode, Joan, qui se moquait de l'argent au point de se mettre en danger!

Discrètement, Achille, qui était l'homme d'une seule femme, avait souscrit une assurance-vie sur sa tête en faveur de la jeune femme. S'il lui arrivait quoi que ce soit, elle serait parée pour le restant de son existence. Elle toucherait cinquante millions de dollars. Évidemment, Achille ne lui avait rien dit. Il craignait qu'elle ne se fâche quand il serait obligé de lui avouer le montant extravagant des primes qu'il avait dû payer.

Il regarda sa montre. C'était l'heure de partir. Il était navré du rendez-vous que lui avait imposé son père. Navré d'avoir, une fois de plus, à lui dire non. Navré aussi qu'il ne comprenne rien à son amour pour Joan. Désolé d'avoir dû écouter jusqu'au bout les atroces insinuations de son oncle.

Toutes ces histoires étaient lamentables et il commençait à comprendre qu'elles ne le concernaient pas. Lui, il n'avait jamais trahi personne, il n'avait jamais menti, il n'avait pas demandé à être ce qu'il était. Alors, qu'on lui foute la paix! Désormais, il ne supporterait plus d'observations de quiconque, ni de conseils.

Tant pis pour son père s'il se mettait en travers de ses projets!

Il y eut un long silence où leurs regards s'affrontèrent. Chacun des deux avait le sentiment, pour des raisons qui lui étaient propres, que la bataille qui allait se jouer serait décisive et que l'autre ne céderait pas.

Achille parce qu'il jouait son statut d'homme à part entière. Socrate parce qu'il refusait d'abandonner la mainmise gagnée de haute lutte sur ce fils unique dont il voulait faire son successeur et son légataire universel.

Sur l'invitation muette de son père, Achille s'était assis dans le fauteuil qui faisait face à son immense bureau. Pas du tout impressionné. Pour la première fois de sa vie, au contraire, il se toisait d'un œil critique. Il trouvait même qu'il avait l'air minuscule, précisément parce qu'il avait choisi ce bureau ridiculement trop grand. Le Grec attaqua le premier, méprisant, hautain :

« Pauvre type! »

Achille ne broncha pas. Chose curieuse, sans le savoir, il avait repris à son compte le tic de son père : il fourrageait nerveusement dans la poche de sa veste où il avait fourré deux lettres que Joan lui avait écrites. Au même instant, le Grec tripotait la liasse de billets de banque qui ne quittaient jamais la poche droite de son pantalon.

« Tu te prends pour un homme parce que tu baises une femme assez vieille pour être ta mère! »

Achille l'arrêta calmement :

« Tu épouses bien des femmes assez jeunes pour être tes filles! »

Le coup était si direct — jamais Achille n'avait osé lui parler sur ce ton — que Socrate feignit de ne pas avoir été atteint. Il passa outre :

« Non seulement elle est âgée, divorcée, usée, mais en plus, tu l'entretiens! »

C'était faux. Achille se retint pour ne pas le lui crier au visage. Il préféra rester impassible et le défier :

« Ma foi… ce doit être un tic de famille. »

Le Grec bondit et rugit :

« Tu vas la fermer!… Tu n'es qu'un petit con! Et elle aussi te prend pour un con! Elle se fout de toi! Je sais tout! L'assurance, les cinquante millions de dollars sur sa tête, tout!… Tu es cinglé? Tu crois que je vais tolérer que mon fils foute en l'air, pour une putain, le pognon que je me suis crevé à gagner!… »

Achille avait l'impression de vivre un rêve. Plus exactement, d'assister à une scène de cauchemar où quelqu'un d'autre, à sa place, aurait affronté son père et lui aurait dit en face ce qu'il n'avait même pas osé penser en secret. Il entendit cet « autre » répondre calmement :

« Après tout, je ne te demande pas pour qui tu dépenses ton argent. »

Suffoqué, Socrate ouvrit des yeux ronds et martela les mots :

« Qu'est-ce que tu dis?… Depuis quand ai-je des comptes à te rendre?… C'est moi qui t'entretiens ou c'est toi qui me fais vivre?

— Tu m'entretiens peut-être, mais je ne vis pas que d'argent!

— Pauvre petit couillon! Si tu étais sans un, tu ne garderais pas ta Joan dix minutes!

— Essaie d'être fauché toi-même! Tu verras si tu garderas ta Peggy! »

Le Grec marqua un temps d'arrêt. Ce dialogue le pétrifiait.

« Qu'est-ce que ça veut dire? dit-il.

— Rien. Je me comprends. »

Sous le coup, le visage du Grec sembla s'affaisser. Achille eut un élan de pitié quand il le vit prendre sa tête à deux mains et demeurer immobile, les yeux dans le vague. Il eut la force de ne pas y céder. Il était encore trop fragile pour se permettre ce luxe. Il bredouilla :

« Papa… »

Le Grec ne répondit pas. Achille répéta :

« Papa… »

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