Читаем Le Grec полностью

— Il faut que j'essaie le Bonanza pour les réglages… Là ou ailleurs, j'ai pensé que je pourrais repérer le coin… Ça me fera un but…

— Tu prends le zinc maintenant?

— Oui…

— Tu le ramènes dans combien de temps?

— Une heure ou deux… L'aller et retour.

— Ça va être trop tard pour que j'y colle les mécanos Surveille le badin, j'ai l'impression qu'il déconne.

— Je vais voir ça… Bon, à tout à l'heure. Et merci!

— A tout à l'heure! Hé!… Joan est avec toi?

— Non, j'y vais seul.

— Tu veux que je t'accompagne?

— Non, papa! Merci! »

Trois quarts d'heure plus tard, Achille survolait le paysage fantastique d'où, vingt et un ans plus tôt, le convoi funéraire s'était envolé pour gagner le large. Il tournoya un moment au-dessus des quelques bicoques du village, imaginant mal la vie de ceux qui s'y abritaient. Il ira et, d'un coup d'aile, survola le promontoire rocheux d'une blancheur écarlate, apercevant au passage la silhouette d'un berger gardant quelques chèvres éparpillées dans la rocaille. Dans deux heures, il ferait nuit. Il régla les gaz jusqu'à ce que le cadran des vitesses indique cent miles et prit le soleil rougeoyant qui entamait déjà son mouvement de bascule sur l'horizontale de la mer. Il vérifia l'heure, crispé sur son siège, et se mit à réfléchir intensément à tout ce passé qu'on lui avait caché. Maintenant qu'il était seul, il subissait à retardement l'émotion qu'il avait voulu contenir pendant le récit de son père. On se croit protégé, à l'abri, sans histoire, et l'on s'aperçoit que les événements qui vous ont précédé ont été chaotiques, avec des larmes, de la folie, des meurtres, des viols, du sang. Il se sentait bizarrement relié à cette trame mystérieuse qui l'avait pris en charge avant même qu'il ne soit né et qui se soudait brusquement à sa peau, le rendant solidaire des autres maillons de la chaîne, l'obligeant malgré lui à en être l'inévitable aboutissement.

N'étant pas passé par les mêmes expériences, n'ayant pas vécu les mêmes luttes, il comprenait mal que des hommes aient pu se battre pour un peu d'argent et tant de vanité, qu'ils se soient déchirés pour la conquête d'une puissance relevant beaucoup plus de l'imagination que du réel. Le réel, ce n'était pas l'abstraction des bilans, la considération de ses contemporains ou les chiffres d'affaires de millions de tonnes de pétrole transportées sur toutes les mers du monde. Le réel, c'était le soleil, les vagues, le sable, les cheveux de Joan.

Il volait depuis trente minutes : c'était là. Il décrivit des cercles concentriques, réduisant sa vitesse au maximum, volant si bas qu'il frôlait les vaguelettes, imaginant de toutes ses forces ce qui s'était passé à cet endroit précis alors qu'il était encore au berceau. Il vit son père, sa mère — un jour où elle était-vêtue d'une robe blanche et qu'elle l'avait pris dans ses bras en riant bien qu'il fut couvert de boue — il « vit » aussi des poignées de cendres qui s'éparpillaient au vent. Les larmes lui vinrent aux yeux…

« Merde! »

Quelque chose venait de caler dans le moteur! L'aile droite laboura la mer… Achille redressa le Bonanza qui grimpa de quelques mètres, tournoya sur son erre et piqua soudain du nez comme une pierre.

Il se fracassa si vite contre la surface de l'eau qu'Achille n'eut le temps ni de desserrer ses sangles ni de lancer un S.O.S.

Des projecteurs fouillaient la nuit, accrochant des traînées de lumière blafarde à la crête des vagues. Les recherches duraient maintenant depuis quatre heures La mer grouillait de vedettes rapides prenant pour point de ralliement un aviso de la Marine nationale que survolaient les hydravions et des hélicoptères patrouillant sans relâche dans un rayon de plusieurs milles. Certains appareils rasaient les flots, à la recherche du moindre indice pouvant signaler un éventuel point d'impact, tache d'huile ou débris de l'appareil.

Il était hors de question que le Bonanza se soit écrasé à terre. Les sauveteurs avaient exploré les moindres recoins de la ligne de vol suivie par Achille. De village en village, la gendarmerie avait été alertée pour ratisser le terrain : personne n'avait rien vu, ni entendu ni trouvé quoi que ce soit. Seul, un berger du nom de Spiro avait déclaré qu'il avait vu, peu avant le coucher du soleil, un avion tournoyer au-dessus de son troupeau et piquer vers le large, droit vers l'Ouest. Tiré de sa cabane par des soldats de l'Armée de l'Air, il leur avait indiqué la direction prise par l'appareil. Il avait voulu ajouter que, vingt ans plus tôt, alors qu'il était encore enfant, c'est un convoi entier d'hélicoptères noirs qui s'était envolé du même endroit pour accomplir vraisemblablement un trajet identique. Mais les soldats étaient pressés et Spiro avait préféré se taire. En le quittant, ils ne l'avaient même pas remercié.

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