L’enfant chantait; la mère au lit, exténuée,Agonisait, beau front dans l’ombre se penchant;La mort au-dessus d’elle errait dans la nuée;Et j’écoutais ce râle, et j’entendais ce chant.L’enfant avait cinq ans, et, près de la fenêtre,Ses rires et ses jeux faisaient un charmant bruit;Et la mère, à côté de ce pauvre doux êtreQui chantait tout le jour, toussait toute la nuit.La mère alla dormir sous les dalles du cloître;Et le petit enfant se remit à chanter…La douleur est un fruit: Dieu ne le fait pas croîtreSur la branche trop faible encor pour le porter.
Paris, janvier 1835.
XXIV .
Heureux l’homme, occupé de l’éternel destin,Qui, tel qu’un voyageur qui part de grand matin,Se réveille, l’esprit rempli de rêverie,Et, dès l’aube du jour, se met à lire et prie!À mesure qu’il lit, le jour vient lentementEt se fait dans son âme ainsi qu’au firmament.Il voit distinctement, à cette clarté blême,Des choses dans sa chambre et d’autres en lui-même;Tout dort dans la maison; il est seul, il le croit;Et, cependant, fermant leur bouche de leur doigt,Derrière lui, tandis que l’extase l’enivre,Les anges souriants se penchent sur son livre.
Paris, septembre 1842.
XXV. Unité
Par-dessus l’horizon aux collines brunies,Le soleil, cette fleur des splendeurs infinies,Se penchait sur la terre à l’heure du couchant;Une humble marguerite, éclose au bord d’un champ,Sur un mur gris, croulant parmi l’avoine folle,Blanche, épanouissait sa candide auréole;Et la petite fleur, par-dessus le vieux mur,Regardait fixement, dans l’éternel azur,Le grand astre épanchant sa lumière immortelle.«Et, moi, j’ai des rayons aussi!» lui disait-elle.