Читаем Les pistolets de Sans Atout полностью

– Et alors? Est-ce que nous dormons, nous? Il forma un numéro et, après une assez longue attente, obtint la communication. François, allongé dans le fauteuil, essayait de récupérer. Il était à bout et, comme il arrive dans les cas de grande fatigue, sa pensée courait, courait, formait les hypothèses les plus folles. Il ne parvenait pas à la maîtriser, à fixer le point le plus délicat de l'affaire. «On» connaissait manifestement tout de la vie et des travaux de M. Skinner. «On» savait que, ce soir, l'inoffensive Mrs. Humphrey serait seule à la maison. Et pourtant, «on» avait envoyé l'homme à la barbe en éclaireur, ce qui semblait prouver qu'on ignorait la disposition des lieux. Fallait-il admettre que cet adversaire si parfaitement renseigné n'avait encore jamais franchi le seuil de la villa?… Et si l'homme à la barbe n'avait été envoyé que pour donner le change? Et si c'était M. Merrill le coupable? S'il avait voulu se débarrasser de l'ingénieur et garder pour lui tous les profits?… Mais, dans ce cas… Non, ça ne tenait pas debout… Est-ce que Bob allait téléphoner toute la nuit?… Est-ce que… Bob le secoua par l'épaule.

– Eh bien? Tu dors?… Ça y est. Elle arrive demain. Elle voulait partir tout de suite. Elle est chic; ça, je dois le reconnaître. Beaucoup de sang-froid. Elle est comme moi: elle envoie M. Tom au diable!

Les mains dans les poches, baissant la tête, il réfléchissait. Enfin il se décida:

– Montons, dit-il. Je crois que l'inspecteur a raison; l'hôpital ne répondrait pas.

Il prit les pistolets.

– Autant les remettre à leur place… Pas la peine qu'on se moque encore de moi.

Mrs. Humphrey n'était pas encore couchée. La porte de sa chambre était entrebâillée et elle avança la tête, quand elle entendit, dans l'escalier, le pas des garçons.

– M. Skinner n'est pas avec vous?

– Non, dit Bob. Papa a eu un accident.

– Mon Dieu!

Dans son désarroi, elle laissa la porte s'ouvrir davantage et François eut envie de rire en apercevant la chemise de nuit à dentelles de la vieille dame.

– Il est à l'hôpital, continua Bob. On ne sait rien de plus. Je viens de téléphoner à Miss Mary. Elle sera là demain matin. Il faudra lui préparer la chambre d'ami.

Mrs. Humphrey pinça ses lèvres minces et referma sa porte. Bob entra chez François.

– Tu n'as besoin de rien? Tu seras assez couvert?… C'est un phénomène, cette brave Mrs. Humphrey. Tu as vu?… Elle n'aime pas beaucoup la pauvre Mary. Tu comprends, elle règne sur cette maison depuis je ne sais combien d'années. Alors, une nouvelle Mrs. Skinner, ça ne l'emballe pas. Il y aura sûrement des accrochages… Je te dis cela parce que je suis désolé de te recevoir dans des conditions pareilles… Tu ne nous en voudras pas?

– Bob! Tu penses!

– Je suis tellement heureux que tu sois prés de moi… Bonne nuit.

Miss Mary

Le lendemain, Miss Margrave arriva juste comme sonnaient huit heures. François, qui achevait sa toilette, l'entendit qui causait avec Bob, dans la salle à manger. Sa voix était douce, agréable, et faisait un contraste amusant avec celle de Bob qui, par instants, déraillait dans les sons graves. François ne se pressa pas. Il préférait attendre que le premier moment d'émotion fût passé. Il n'aimait pas beaucoup les effusions. Mais Bob vint l'appeler, au pied de l'escalier. Un ultime coup de peigne, pour paraître à son avantage. Il descendit.

S'il avait craint des larmes, il s'était bien trompé. Miss Mary, sous son aspect fragile, semblait être une femme de tête. Elle était longue et mince, d'un blond nordique un peu étrange, comme si elle avait été coiffée de lumière. Mais son visage était régulier; ses yeux d'un bleu un peu dur n'exprimaient aucune émotion. Elle savait se tenir. Sa poignée de main était franche, directe, une poignée de main de sportive.

– Merci, dit-elle. Bob m'a tout raconté. Vous l'avez aidé énormément.

Du bout des doigts, elle effleura la joue de Bob.

– Son père et lui ne sont pas toujours d'accord, mais ils s'aiment bien. J'espère que l'hôpital va nous donner de bonnes nouvelles… Bob, soyez gentil. Portez ma valise dans ma chambre. Elle attendit un peu et, quand Bob fut parti, elle reprit en baissant la voix:

– Je sais que vous êtes un garçon de ressource… Que pensez-vous de tout cela?

– Je pense, avoua François, que tout, ici, est bizarre… Aussi bien M. Tom que… le visiteur…

Elle l'interrompit:

– Vous avez trouvé le mot. Bizarre… Dès que je suis ici, je ne suis plus la même. J'en arrive à croire que ces marionnettes ont une mauvaise influence. Bob travaille de plus en plus mal. Jonathan est obsédé par son invention… Mrs. Humphrey grogne sur tout. Et maintenant, ce drame… C'est pourquoi je vous le demande à mon tour. Restez! Vous êtes le témoin devant qui chacun s'efforce d'être raisonnable.

Elle sourit d'une façon charmante.

– Soyons alliés, monsieur Robion.

François rougit de plaisir.

– C'est promis, dit-il. Je me bornerai à dire à mes parents que M. Skinner a été victime d'un accident.

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