Elle va confier le contenu de sa communication avec les saints au capitaine Baudricourt, commandant la place de Vaucouleurs. Sans sourciller, Baudricourt, séduit par cette jeune fille en habits d’hommes, par son audace mêlée d’une grâce trouble, lui accorde une escorte. Et la voilà partie pour Chinon où se trouve le roi avec sa cour. Pendant dix jours, elle va voyager dans une campagne infestée de brigands de toutes sortes, d’Anglais, de Bourguignons. Vêtue de noir, les cheveux coupés au bol, montée sur une haridelle et entourée de son escorte composée d’une dizaine de gens en armes, elle arrive à Chinon précédée d’une rumeur qui la présente comme porteuse d’une incroyable nouvelle pour le roi Charles. On se demande bien ce que va révéler cette jeune fille de dix-sept ans !
L’inexplicable arrive alors : elle s’avance vers l’estrade du roi, remarque un petit groupe d’hommes et s’agenouille devant celui à qui elle dit : « Gentil dauphin de France, Dieu vous donne longue vie ! » L’homme lui répond : « Ce n’est pas moi, c’est lui », en montrant son voisin le comte de Clermont de la bataille des harengs. Mais Jeanne insiste, affirme qu’elle ne se trompe pas, et délivre son message. Le roi est troublé. Il s’en va vers une fenêtre, discute une heure avec la pucelle et revient transfiguré parmi les siens : Jeanne vient de lui révéler un secret qui ôte définitivement le doute sur sa filiation. Il est bien roi de France et non bâtard. Dans les jours qui suivent, la foule chinonaise encourage le roi, la pucelle et l’armée qui partent vers Orléans, en faisant un petit détour de trois semaines par Poitiers. Pourquoi ? Pour que le Parlement et l’Université de Paris, transférés dans cette ville, s’assurent que Jeanne n’est pas une illuminée de plus, car l’époque en regorgeait, palliatif à une institution spirituelle en déshérence.
Dans le mois qui suit, Jeanne ne cesse de remporter des succès qui ouvrent à Charles VII la route de Reims où il entre le 16 juillet 1429. Le 17, il est sacré roi de France. D’autres combats sont engagés, d’autres victoires sont remportées contre les Anglais, mais Paris reste à prendre ! Et, contrairement à ce qu’on peut penser, Charles VII n’est pas pressé de reprendre la capitale. Il préfère la négociation à l’affrontement. Et Jeanne la guerrière commence à le gêner dans ses démarches de paix. Bientôt, la pucelle se retrouve seule, presque abandonnée lorsqu’elle engage un siège devant une ville. Cela n’empêche pas le roi de l’anoblir ainsi que toute sa famille et la descendance de celle-ci.