Je pense qu'il est plus prudent que tu gardes l'anonymat car Jérusalem est pleine de Romains et il serait injuste de compromettre le généreux ami qui t'a rendu ta liberté. Ton cas, néanmoins, n'est pas nouveau mon frère. Je suis dans cette ville depuis presque un an et ces pauvres lits ont vu défiler les plus singulières créatures. Moi qui étais un misérable pêcheur, ai acquis une grande expérience du monde pendant ces quelques mois ! À ces portes ont frappé des hommes en haillons qui furent un jour des hommes politiques importants, des femmes lépreuses qui furent presque des reines ! En contact avec l'histoire de tant de rêves déchus par le jeu des vanités mondaines, je reconnais maintenant que les âmes ont besoin du Christ, par dessus tout.
Ces explications singulières étaient d'un grand réconfort pour Jeziel, qui l'interrogea avec reconnaissance :
Et vous pensez que je pourrais vous servir en quoi que ce soit ? Moi qui ai été captif des hommes, je désirerais être l'esclave du Sauveur qui a su vivre et mourir pour nous tous.
Tu seras mon fils, désormais - s'exclama Simon transporté de joie.
Et puisque je dois me reformer en Jésus Christ, comment m'appellerai-je ? - a demandé Jeziel avec des yeux remplis de joie.
L'apôtre a réfléchi un moment et lui a dit :
Pour que tu n'oublies pas l'Achaïe où le Seigneur a daigné aller te chercher pour son ministère divin, dans le nouveau credo, je te baptiserai du nom grec d'Etienne.
Les liens d'affection qui les avaient rapprochés dès le premier instant se sont encore consolidés, et le jeune homme n'oublia jamais cette rencontre avec le Christ à l'ombre des dattiers auréolés de lumière.
Durant un mois, Jeziel, maintenant connu sous le nom d'Etienne, s'est imprégné de l'étude des exemples et des enseignements du Maître qu'il n'avait pu connaître de son vivant.
La maison des apôtres à Jérusalem offrait une aide chaque fois plus grande aux nécessiteux, exigeant un taux élevé d'affection et de dévouement. Il y avait des fous qui arrivaient de toutes les provinces, des vieux abandonnés, des enfants faibles et affamés. Et ce n'était pas tout. À l'heure des repas, de longues files de mendiants imploraient l'aumône de la soupe. Avec d'énormes sacrifices tout en cumulant les tâches, Jean et Pierre soutenus par leurs compagnons, avaient construit un modeste pavillon, destiné aux services de l'église et qui devait servir à diffuser les messages de la Bonne Nouvelle. Toutefois l'assistance aux pauvres ne laissait aucune trêve au labeur des idées évangéliques. C'est alors que
Jean se dit qu'il n'était pas raisonnable que les disciples directs méprisent la semence de la parole divine et passent leur temps au service du réfectoire et des infirmeries, vu qu'à chaque jour qui passait, se multipliait le nombre de malades et de malheureux qui faisaient appel aux partisans de Jésus comme dernier espoir à leur cas particulier. Il y avait des malades qui frappaient à la porte des bienfaiteurs de la nouvelle institution exigeant des conditions spéciales pour leurs protégés, des amis qui demandaient que des mesures fussent prises en faveur des orphelins et des veuves.
Lors de la première réunion dans l'humble église, Simon Pierre a alors demandé que soient nommés sept assistants pour le service des infirmeries et des réfectoires, une décision qui fut approuvée à la satisfaction générale. Parmi les sept frères choisis, Etienne qui avait la sympathie de tous fut désigné.
Pour le jeune de Corinthe une vie nouvelle a commencé. Les mêmes vertus spirituelles qui illuminaient sa personnalité et qui avaient tellement contribué à la guérison du patricien qui lui avait rendu sa liberté, diffusaient parmi les malades et les indigents de Jérusalem les plus saintes consolations. Une grande partie des souffrants, rassemblés dans la grande maison des disciples, avait retrouvé la santé. Des vieux accablés reprenaient courage sous l'influence de ses paroles inspirées par la source divine de l'Évangile. Des mères angoissées venaient le voir pour des conseils ; des femmes du peuple, épuisées par le travail et les angoisses de la vie, désireuses de trouver la paix et la consolation, se disputaient le réconfort de sa présence douce et fraternelle.
Simon Pierre ne cachait pas son contentement face aux victoires de son fils spirituel. Les nécessiteux avaient l'impression d'avoir reçu un nouveau messager de Dieu pour soulager leurs douleurs.