Читаем Révolte sur la Lune полностью

— Mannie, si on m’a fourni ce pour quoi j’ai payé, notre émetteur nous a identifiés comme étant l’Alouette depuis maintenant dix minutes… et en ce moment, il émet le matricule du Lotus. De toute façon, nous serons bientôt fixés : il n’y a qu’un seul vaisseau susceptible de nous faire sauter et il doit nous attaquer dans… (Il s’est arrêté pour regarder sa montre) les vingt-sept prochaines minutes s’il veut avoir de bonnes chances de nous atteindre, d’après ce que m’a dit le brave robot qui pilote ce rafiot. Si vous avez quelques inquiétudes, dire vos prières ou envoyer un message, ou tout ce que l’on fait dans de telles circonstances, c’est le moment.

— Devrions-nous réveiller Prof ?

— Non, laissons-le dormir. Croyez-vous qu’il existe une manière plus agréable de faire le grand saut qu’en sommeillant paisiblement dans un nuage de gaz étincelant ? Pensez-vous qu’il veuille accomplir quelque devoir religieux ? Il ne m’a jamais paru très religieux, du moins pas dans une acception orthodoxe.

— En effet. Mais vous, si vous-même avez de telles préoccupations, je ne veux pas vous en empêcher.

— Merci ! J’ai fait ce qui m’a semblé nécessaire avant de décoller. Et vous, Mannie ? Je n’ai pas grand-chose d’un prêtre, mais je ferai mon possible pour vous aider. Des péchés sur la conscience, vieux frère ? Si vous avez besoin de vous confesser, vous savez, j’en connais un bout en la matière.

Je lui ai répondu que mes besoins actuels n’étaient pas de cet ordre ; puis je me suis rappelé mes péchés, certains fort agréables, et je lui en ai fait un récit plus ou moins authentique. Cela lui en a rappelé quelques-uns des siens, qui en ont amené d’autres… L’heure H est passée alors que nous nous racontions encore nos exploits. Stu La Joie est vraiment le type parfait pour passer ses derniers instants, même si en fin de compte ce ne sont pas les derniers.

Pendant deux jours, nous n’avons rien eu à faire, à part d’interminables et pénibles formalités destinées à nous empêcher d’importer d’innombrables maladies sur Luna. Je n’ai prêté aucune attention aux frissons et aux brûlants accès de fièvre tant je me sentais bien en état d’apesanteur, heureux de rentrer à la maison.

Presque heureux, en fait. Prof m’a demandé ce qui me préoccupait.

— Rien. L’impatience de rentrer enfin chez nous… à dire vrai, j’ai du mal à me faire à l’idée de notre échec. Prof, quelle erreur avons-nous commise ?

— Un échec, mon garçon ? Quel échec ?

— Je ne vois pas comment nous pourrions qualifier ça autrement. Nous demandions à être reconnus, ce n’est pas exactement ce que nous avons obtenu.

— Manuel, je vous dois des excuses. Vous devez vous souvenir des chances que nous donnait Adam Selene juste avant notre départ.

Stu ne pouvait nous entendre, mais par sécurité nous n’utilisions jamais le nom de « Mike ».

— Bien sûr que je m’en souviens ! Une sur cinquante-trois ; quand nous avons atteint la surface de Terra, nos chances sont tombées à une contre cent. Et combien maintenant ? Une sur mille ?

— J’ai reçu de nouvelles prévisions tous les deux ou trois jours… et c’est pourquoi je dois m’excuser auprès de vous. La dernière analyse, reçue juste avant notre départ, tenait compte de la réussite supposée de notre évasion de Terra et de notre retour chez nous en un seul morceau – au moins pour l’un de nous trois. Cela explique pourquoi nous avons demandé au camarade Stu de venir avec nous : comme tous les Terriens, il est doté d’une grande résistance aux fortes accélérations. Huit prévisions ont donc été effectuées pour envisager tous les scénarios possibles – de notre mort à tous les trois à notre survie. Acceptez-vous de miser quelques dollars sur ces dernières prévisions ? Vous n’avez qu’à m’indiquer votre fourchette, d’après vos propres calculs. Je vais quand même vous donner une indication : vous vous montrez beaucoup trop pessimiste.

— Euh… Non, zut ! Mais dites-moi !

— Les chances adverses ne sont maintenant que de soixante-dix contre une… et elles ont diminué continuellement depuis un mois. C’est ce que je ne pouvais pas vous dire.

J’étais surpris, ravi, heureux… et blessé.

— Que voulez-vous dire… que vous n’aviez pas le droit de m’en parler ? Vous savez, Prof, si vous ne me faites pas confiance, vous n’avez qu’à m’écarter et inclure Stu dans la cellule de direction.

— Je vous en prie, mon garçon. Il y aura sa place s’il arrive quelque chose à l’un d’entre nous, à vous, à moi ou à notre chère Wyoming. Je n’avais pas le droit de vous en parler tant que nous nous trouvions sur Terra. Maintenant je le peux, non parce que vous seriez indigne de confiance mais parce que vous n’êtes pas bon comédien. Vous jouiez beaucoup mieux votre rôle en pensant effectivement que notre but consistait à faire reconnaître notre indépendance.

— Et c’est maintenant qu’il m’en parle !

— Manuel, Manuel, nous devions lutter férocement à chaque instant… et perdre.

— Je vois ! Est-ce que je suis assez grand maintenant pour que vous m’expliquiez ?

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